Statue d’Horus du temple
d’Edfou |
La ville, noms et localisation
Edfou (ou Edfu, en Égyptien : Behdet ou Béhédet ou Behédet :
BHd.t ou Djéba : DB3
"la ville du Flotteur" , en
Grec :
Απολλινόπολις η μεγάλη Apollinopolis Magna,
en Copte : Atbô, en arabe :
دفو Intfou) est une ville
de Haute-Égypte. Elle est identifiée au site de la ville moderne de Tell el-Balamoûn. Ce sont les
Grecs, qui avaient identifié le Dieu
Horus avec Apollon, qui lui donnèrent le nom d’Apollinopolis
Magna (ou Apollonopolis). La cité se développa sur la colline où se situait la ville antique de Behédet (ou Behdet) et où
se trouvera plus tard celle d’Apollinopolis Magna.
Elle est située sur la rive Ouest du Nil, dans une région particulièrement riche en blé, au
débouché des pistes caravanières venant du désert et des mines d’or de Nubie. Entre
Assouan et
Thèbes, elle est située
à 105 km au Sud de celle-ci et à 755 km du Caire. En 237 av.J.C, au milieu de la petite ville,
Ptolémée III Évergète I (246-222) fit
construire le temple colossal dédié à la triade :
Horus,
Hathor et Harsomtous,
qui fut achevée en 57 av.J.C. Il est aujourd’hui encore presque intact, c’est un des monuments les mieux conservés de
toute l’antiquité et aussi un des plus visités aujourd’hui.
À environ 5 km au Nord de la cité ont été trouvés les vestiges d’une
petite pyramide.
C’est une
pyramide à degrés à trois niveaux, située le long de la vallée du Nil, près du village de Naga el-Goneima.
Elle est construite avec des blocs de grès rougeâtres. Elle est attribuée au Roi
Houni (2599-2575,
IIIe dynastie). On pense qu’elle ne serait
pas un tombeaux, mais un des nombreux cénotaphes (Monument élevé à la mémoire d’une personne ou d’un groupe de personnes)
à degrés de ce Roi.
Le Tell d’Edfou, l’histoire…
L’importance d’Edfou est attestée dès la plus haute époque. Selon la légende
Behdet, l’ancienne colonie d’Edfou, vit le jour à l’emplacement où
Horus tua Seth.
Le Dieu faucon Horus fut, de ce fait, le Dieu tutélaire de la
cité. Les vestiges de Behdet, sont situés à environ 50 m à l’Ouest du temple
Ptolémaïque, sur la gauche du pylône du temple. Ce site est
aussi connu sous le nom de Wetjeset-Hor qui donnera en Latin Apollinopolis Magna.
Ce site
d’Edfou contient des preuves sur l’histoire Égyptienne d’un bien plus grand intérêt archéologique que le temple
Ptolémaïque par lui même. Il est suffisamment bien préservé
pour nous permettre d’obtenir des informations remontant aussi loin que la
Période pré-Dynastique (v.3500-v.3150).
On a d’ailleurs découvert dans le désert proche des artéfacts portant le nom du Roi
Horus Djet (ou Ouadji, 2927-2914, Ière dynastie).
Vue d’ensemble des temples |
Les vestiges du site donnent un
aperçu du développement d’Edfou depuis la fin de l’
Ancien Empire (2647-2150) jusqu’à la période Byzantine. La ville fut la capitale du
2ème nome de Haute-Égypte, le "nome du Trône
d’Horus" (Ts Hrw et elle joua un rôle important dans la région.
La plus ancienne partie de la cité, qui est donc datée de la fin de
l’Ancien Empire, se trouve sur la partie Est
du Tell, non loin du temple Ptolémaïque.
Il est prouvé que la ville prospéra au cours de la
Première Période Intermédiaire (2140-2022)
et s’agrandit largement à cette époque vers l’Ouest.
Fait intéressant, car elle fut l’une des rares cités dans le Sud de l’Égypte qui prospéra, alors que tout
le pays et en particulier le Nord et le Delta était en plein déclin économique. Aujourd’hui certaines parties du Tell font
encore jusqu’à 20 m de hauteur et conservent des séquences complètes archéologiques d’une occupation datant de
l’Ancien Empire jusqu’à l’époque Gréco-romaine,
soit plus de 3000 ans d’histoire, offrant ainsi des conditions idéales pour étudier le développement d’une ville
capitale de province. La partie centrale du site fut explorée en 1921 et 1922 par Henri Henne, de l’Institut d’égyptologie
de Lille (Liste des stratèges des nomes Égyptiens à l’époque Gréco-romaine,
IFAO, 1935).
Intérieur du temple |
Son équipe identifia les décombres d’un petit sanctuaire datant de la période
Ptolémaïque où fut construite, par
Psammétique I (664-610), une petite chapelle dédiée
au Dieu Osiris.
Henri Henne fut suivi dans ses excavations, en 1928, par Octave Guéraud, puis, en 1931, par Maurice Alliot, qui ont chacun
exploré et fouillé les différents aspects du site. À partir des couches supérieures on trouve des traces d’habitat
de l’époque Byzantine, puis Romaine, puis
Ptolémaïque. En 1937-1939, une mission Franco-polonaise, dirigé par
Bernard Bruyère, Jerzy Manteuffel et
Kazimierz Michalowski, mit au jour
à l’Ouest du site, une nécropole datant de l’Ancien Empire
(2647-2150) et du Moyen Empire (2022-1650).
Dont dans celle-ci, un mastaba appartenait à l’Isi, un administrateur local de la
VIe dynastie (2321-2150) qui fut cité comme le chef
"du grand du nome d’Edfou". Isi vécut pendant les règnes de plusieurs Rois, de
Djedkarê Isési (2389-2357) de la
Ve dynastie à
Pépi I (2289-2255)
VIe dynastie. Malheureusement, depuis le milieu des années
1939 il n’y a plus de recherche approfondie et de ce fait pas de nouvelles découvertes à
l’exception des récents travaux réalisés par
Barry J.Kemp de l’Université de Cambridge. Depuis 2001, le "Tell Edfou projet" est dirigé par Nadine
Moeller (Oriental Institute, University of Chicago). Son travail se concentra
dans un premier temps sur la partie Est du site.
Le centre administratif de la ville ancienne fut découvert avec des vestiges d’une salle à colonnes
datant de l’Ancien Empire, ainsi qu’un grand
grenier qui fonctionnait comme une réserve de céréales pour cette capitale provinciale. Au moins sept importants silos
ronds ont été fouillés, avec un diamètre compris entre 5,50 et 6,50 mètres qui les rend les plus grands découverts à ce
jour dans un centre urbain de l’Egypte ancienne.
Une des colonnes du temple |
Apollinopolis Magna
Apollinopolis Magna (ou Apollonopolis Magna, en
Grec :
πόλις μεγάλη Aπόλλωνος
ou Apollinopolis Magma, en Latin : Superioris Apollonos) était assignée par Ptolémée
(ou Claudius Ptolemaeus, astronome et astrologue
Grec, v.90-v.168) comme faisant parti du 4e nome
Hermonthite, le "nome du Sceptre" (wAst),
mais la ville est plus communément considérée comme une des capitales du
2ème nome, le "nome du Trône d’Horus"
(Ts Hrw). Ce sont les
Grecs, qui avaient identifié le Dieu
Horus avec Apollon, qui donnèrent le nom d’Apollinopolis
Magna à Edfou. À l’Époque Romaine elle fut le
siège d’un évêché et, selon le Notitia dignitatum (Document de la chancellerie Romaine), une partie de la légion
"Legio II Traiana Fortis" y avait son quartier-général. Ses habitants étaient
des ennemis du crocodile et de ses adorateurs.
Autre vue de la statue d’Horus
|
La cité antique tira sa réputation de deux temples principaux, qui
sont considérés, avec celui de Dendérah, comme des spécimens parmi
les ouvrages sacrés d’Égypte. Le temple le plus vaste, dédié à Noun, est en bon état et est en cours de fouille. Le petit
temple, parfois improprement appelée Typhonium, est apparemment un appendice de ce dernier et ses sculptures représentent
la naissance, l’éducation et la jeunesse d’Horus,
dont les parents, Kneph ou Noun et
Hathor, étaient
vénérées dans l’édifice plus vaste.
L’entrée dans le temple d’Apollinopolis se fait par une passerelle flanquée de deux ailes convergentes en
forme de
pyramides tronquées, s’élevant à 33 m. Ces ailes contiennent des pièces qui ont sans doute servi de chambres ou de
dortoirs pour les Prêtres et les serviteurs du temple. Ces propylées (Vestibules menant à un sanctuaire) conduisaient à une
grande place, entourée d’une colonnade couverte de granit. Sur le côté opposé se trouvait un pronaos (Désigne le vestibule
ou l’entrée d’un temple) ou portique, de 16 m de hauteur qui avait une triple rangée de six colonnes.
Le temple faisait 44 m de large et 129 m de long de l’entrée à l’extrémité opposée. Chaque partie des murs
était couverte de hiéroglyphes et la cour principale monte graduellement au pronaos par de larges marches. Comme beaucoup
de temples Égyptiens, celui d’Apollinopolis était susceptible d’être employée comme une forteresse. Les sculptures, soigneusement
et parfaitement exécutées, sont de la période Ptolémaïque (305-30).
La plus ancienne partie du temple avait été érigé par
Ptolémée VI Philométor (180-145) en 181 av.J.C.
Le temple d’Horus
Entrée du temple |
En 237, au milieu de la petite ville, le Roi
Ptolémée III Évergète I (246-222) fit construire
le temple colossal d’Horus, qui fut achevée en 57 av.J.C.
Il est aujourd’hui encore presque intact, c’est un des monuments les mieux conservés de toute l’antiquité. C’est
le plus grand et le plus important temple construit sous la
Dynastie des Ptolémée. Il est le deuxième édifice en grandeur après Karnak. Ses dimensions sont de 137 m x 79 m sur une
hauteur de 36 m pour les pylônes.
Selon la légende, il fut construit d’après un modèle tombé du ciel à
Saqqarah.
Dans le terrain sacré formé par l’enceinte en briques la plus large, il y avait le mammisi (Petite chapelle construite près
d’un temple majeur). Le temple fut érigé sur un beaucoup plus ancien. Il est entièrement construit en grès et il est remarquable
sur le plan de ses proportions.
La conception de l’édifice est faite de telle manière que le niveau du sol s’élève en pente douce jusqu’au
sanctuaire et les plafonds s’abaissent progressivement dans le même sens. Lorsqu’il fut trouvé il était ensablé et il fut en
partie dégagé par l’égyptologue
Auguste Edouard Mariette.
Comme beaucoup de bâtiments religieux de cette époque, le temple était complété par tout un ensemble de constructions, qui sont
malheureusement aujourd’hui recouvertes par les maisons du village moderne.
L’architecture est très belle et les textes,
très abondants, sont très riches. Les murs et colonnes racontent les différents rites accomplis par le Roi. On y trouve aussi
les récits des guerres que se sont livrés le Dieu Horus et
le Dieu Seth et la victoire
d’Horus sur ses ennemis. Sur le mur d’enceinte, on peut voir
représenté la fête célébrant la pose de la première pierre. Sur les pylônes on trouve les scènes classiques du massacre
d’ennemis de l’Égypte par le Pharaon brandissant une massue.
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A – Pylônes
B – Cour péristyle
C – Première salle hypostyle
D – Deuxième salle hypostyle
E – Escalier Ouest
F – Salle des offrandes
G – Salle de l’Ennéade
H – Couloir de ronde
I – Escalier Est
J – Puits
K – Salle centrale du sanctuaire
L – Naos
M – Couloir mystérieux
N – Laboratoire |
Naos du sanctuaire |
On entre dans le temple par deux grands pylônes (A), décorés d’énormes reliefs
montrant le Roi et les Dieux. Ces grands pylônes donnent sur la cour péristyle (B) qui est entourée de colonnes sur trois
de ses côtés. Face aux pylônes, un mammisi (Petite chapelle construite près d’un temple majeur) est consacré au Dieu Ihy,
fils d’Horus et
Hathor. Il fut conçu à l’occasion de la fête de
la rencontre qui est représentée au dos des pylônes. Chaque année, la Déesse
Hathor de
Dendérah (ou Tentirys) venait en bateau rendre visite à son époux
Horus, accompagnée de nombreux pèlerins. Deux portiques à
chapiteaux bordent la grande cour dallée.
Au fond, à l’entrée de la première salle hypostyle (C)
on peut voir une statue d’Horus en granit gris, coiffé de la
double couronne de Haute et Basse-Égypte.
Sur la droite, s’ouvre la petite bibliothèque où étaient stockés des papyri sacrés. La deuxième salle
hypostyle (D), ou salle des fêtes, est plus réduite. Elle est flanquée à gauche de la chambre des offrandes solides et d’un
laboratoire (N) et à droite de la chambre des offrandes liquides. Elle donne aussi accès au couloir de ronde (H), ou
déambulatoire, compris entre l’enceinte et le mur du temple, décoré avec des gargouilles à tête de lion.
De cette salle hypostyle, on accède à une autre salle des offrandes (F) d’où un escalier montent à la terrasse où avaient
lieu les cérémonies du Nouvel An.
Celle-ci s’ouvre sur la salle centrale du sanctuaire (K). Un naos (L) en granit gris
monolithique, d’une hauteur de 4 m occupe le centre du sanctuaire. Les inscriptions que l’on y a découvert permettent de
l’attribuer au Pharaon Nectanebo II (360-342,
XXXe dynastie). Il serait donc antérieur à la construction du
temple et pourrait provenir de l’ancien temple qui se trouvait au même endroit. Le plafond est orné de scènes représentant
la Déesse Nout et les douze étapes accomplies par
le soleil sur la barque divine. Les fresques murales représentent le Roi
Ptolémée IV Philopator (222-204) offrant de
l’encens devant la barque du Dieu Horus et de la Déesse
Hathor. Il est flanqué tout autour de chapelles.
L’une de ces chapelles abrite une réplique de la barque sacrée.
Bibliographie
Pour d’autres détails sur la cité et ses monuments voir les ouvrages de :
Maurice Alliot :
– Tell Edfou, FIFAO 9.2,
IFAO, Le Caire, 1933.
– Une stèle magique d’Edfou,
IFAO, Le Caire, 1934.
Jean-Jacques Ampère :
– Edfou et Kom Ombo, pp. 285-293, Voyage en Egypte, 2003.
Bernard Bruyère,
Jean Sainte-Fare Garnot, Jerzy Manteuffel,
Kazimierz Michałowski et
Charles Kuentz :
– Tell Edfou, 1937-1939, Fouilles Franco-polonaises 1-3,
FIFAO,
IFAO, Le Caire, janvier 1937 et 1950.
Sylvie Cauville :
–La théologie d’Osiris à Edfou,
BiEtud,
IFAO, Le Caire, 1983.
– Edfou, BiGen 6,
IFAO, Le Caire, 1984.
Sylvie Cauville et
Didier Devauchelle :
– Le temple d’Edfou XV,
IFAO, Le Caire, Janvier 1985.
Émile Gaston Chassinat : Son œuvre.
Etienne Drioton :
– Parchemin magique Copte provenant d’Edfou, L. Durbecq, Louvain, 1946.
Octave Guéraud :
– Rapport sur les fouilles de Tell Edfou : I,6,4, 1928,
IFAO, Le Caire, Janvier 1929.
Henri Henne :
– Tell Edfou, FIFAO 1.2,
IFAO, Le Caire, 1924.
Barry J.Kemp,
Salima Ikram et
Aidan Marc Dodson :
– Beyond the horizon : studies in Egyptian art, archaeology and history in honour of Barry J.Kemp,
Publications of the Supreme Council of Antiquities, Le Caire, Janvier 2009.
Nadine Moeller :
– A New Royal Name Sealing from Tell Edfu, pp. 150-154, Zeitschrift für Ägyptische Sprache und
Altertumskunde 136, N°2, 2009.
– Tell Edfu : Preliminary Report on Seasons 2005-2009,
JARCE 46, J.J. Augustin, Princeton, 2010.
Karol Mysliwiec :
– Edfu : Szanse archeologii, Państwowe Wydawn. Naukowe, Warszawa, 1981.
Jean Sainte Fare Garnot :
– Les mastabas : Tell Edfou, 1937,
IFAO, Le Caire, 1937.
Serge Sauneron :
– Edfou et Philae, Les derniers temples d’Égypte, Editions Chêne, Janvier 1975.
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