Définition de la période
On appel première période intermédiaire, la période commençant avec
l’effondrement de l’Ancien
Empire, que l’on situe traditionnellement à la fin de la
VIe dynastie, sous le règne de la Reine
Nitocris (2151-2150),
et finissant avec la victoire définitive de la
XIe dynastie Thébaine
et la réunification de l’Égypte, au couronnement de
Montouhotep II (2022-2010).
Cette réunification marquant le début du
Moyen Empire. Cette période comprend donc les
VIIe,
VIIIe,
IXe
et Xe dynasties et une partie de la
XIe dynastie. Il faut préciser que
certains chercheurs situent le début de cette Première Période Intermédiaire à partir de la fin du règne de
Pépi II (2246-2152 –
VIe dynastie). De plus beaucoup d’entres eux qui ont
tenté d’écrire 1’histoire de cette période ont, du fait de la rareté des sources et de leur imprécision, souvent été
entraînés à émettre des hypothèses très incertaines sujettes à de nombreuses spéculations et controverses.
Les différentes sources en notre possession
¹
Nous avons déjà les sources contemporaines à cette période. Ce sont celles
auxquelles il faut se référer avant tout. Elle comprennent en grande partie des sources littéraires. Les différentes sources sont :
▪ “Les lamentations d’Ipou-Our” (ou Prophétie d’Ipour-Our ou
Admonitions d’Ipou-Our). Ces textes sur papyrus dit “papyrus de Leiden“, sont répertoriés au
musée de Leyde (Hollande) sous le N° 344. L’auteur y
fait état d’une situation chaotique dans le pays où toutes les valeurs traditionnelles sont bouleversées, si bien que certains
chercheurs ont pensé qu’ils décrivaient l’état du pays pendant la Période. Aujourd’hui la tendance est plutôt de considérer ces
descriptions comme un thème purement littéraire ne se rattachant pas à des faits précis, mais servant seulement à mettre en
exergue les bienfaits d’une bonne administration. De part leur contenu, ces textes ont laissé une appréciation négative de
l’ensemble de la période qu’il faudrait peut-être aujourd’hui de réviser.
▪ "Le conte du Paysan éloquent” (ou Conte de l’Oasien ou Les Plaintes du Fellah).
Les trois principaux papyrus datent de la XIIe dynastie (191-1783) et le
quatrième de la fin du Moyen Empire (2022-1650). L’histoire se déroule
aux alentours de la IXe ou
Xe dynastie et raconte les
mésaventures d’un paysan, nommé Khoun-Inpou (#wn-Jnpw), de la région du
Ouâdi Natroum, qui ayant décidé de vendre ses produits se
mit en route vers Hérakléopolis, la résidence royale à
cette époque et se fit voler ses ânes par ruse. Après plusieurs plaintes, il finira par obtenir
réparation de son préjudice.
▪ L’enseignement pour Mérikarê, œuvre
destinée à l’éducation du Roi Mérikarê II (fin de la
Xe dynastie) dont le contenu a un réalisme que l’on ne trouve pas dans
les autres enseignements et semble faire écho à des événements bien réels. Sa rédaction doit se situer à la fin de la
période ou au début du Moyen Empire.
▪ Les listes royales. Celles-ci sont postérieures à la période : Les
tables d’Abydos, dont la première n’est que
fragmentaire et mentionne 17 noms de Rois entre Pépi II et
Montouhotep II. Elle est actuellement au British Museum
;
La deuxième ne tient pas compte des Rois d’Héracléopolis
de la IXe et
Xe dynastie, ni des premiers Rois Thébains avant
Montouhotep II, comme si ces souverains n’avaient pas été
reconnus à Abydos, mais elle est la seule source qui donne la
plupart des dirigeants de la VIIe et
VIIIe dynasties, de sorte que cette liste a une valeur hautement
importante ; Le Papyrus de Turin
qui est particulièrement lacunaire à l’endroit de la période, mais nous donne certaines informations intéressantes.
Le Papyrus de Turin ne semble faire état que d’une
seule dynastie Héracléopolitaine ; La chapelle (ou chambre)
des ancêtres de Thoutmosis III à Karnak (Louvre El348Ibis)
mentionne les premiers Rois de la IXe dynastie et leurs précurseurs ;
Enfin la liste de Manéthon, mais les transcriptions rapportées
par les différents auteurs ne sont quasiment pas exploitables. Leur seul mérite est de faire mention du premier Roi
d’Hérakléopolis, un certain Achthôes,
que l’on identifie à Khety I, ce qui semble être corroboré
par l’expression “maison de Khety” que l’on rencontre dans l’Enseignement pour Mérikarê et d’autres sources contemporaines.
Les raisons du changement
Durant
la VIe dynastie on assiste à une décomposition de l’unité Égyptienne
due à l’affaiblissement progressif du pouvoir des Rois au profit des grands responsables administratifs et administrateurs. De ce
fait les Nomarques, qui considèrent leurs charges comme propriété familiale, agissent en potentats
dans leur nome et ignorent le faible souverain du moment. Ils
sont les véritables maîtres du pays. Ils cumulent les titres civils comme : Gouverneur, Grand chef de
nome, avec des titres religieux comme : Directeur
des prophètes, et ils se donnent aussi pour certains le titre de Directeur du Sud. On dit souvent que l’accroissement
du pouvoir de ces potentats locaux à atteint son point culminant sous le long règne du Roi
Pépi II (94 ans),
dont la vieillesse empêchait de contrôler le pays avec énergie et que c’est de lui que vient la chute finale
de l’Ancien Empire.
En fait on peut considérer que ce sont ces Gouverneurs provinciaux, les Nomarques, qui sont le facteur
principal du déclin de l’Ancien Empire.
Car il est aussi probable que des changements climatiques, ayant pour résultat
une diminution des crues du Nil, aient affecté la société Égyptienne. Le
gouvernement central ne pouvant pas faire face à cette crise, il appartenait
aux Nomarques et autres Gouverneurs locaux de fournir une solution pour irriguer
mieux leur propre territoire. Beaucoup de ces Nomarques se laissent tenter par l’ambition, ils s’associent
à d’autres chefs de nomes
pour constituer une force susceptible d’attaquer les territoires voisins, les alliances se faisant et se défaisant
tour à tour. La première conséquence de ces batailles incessantes est la multiplication des famines. De plus en
plus le peuple se révolte contre les féodaux. Les tombes sont pillées sans que le pouvoir ne puisse s’y opposer.
VIIe et VIIIe dynastie
Il n’y a aucune certitude concernant l’identité
des souverains de la VIIe dynastie, son existence même est remise en
cause par beaucoup de spécialistes et est très contestée encore aujourd’hui. Pourtant on recense onze Rois sur une période très
courte. Selon Manéthon
70 Rois de Memphis en 70
jours (Africanus) ou 5 en 75 jours (Eusebius). La présence de tant de Rois sur les deux dynasties
(VIIe
et VIIIe),
indique peut-être un système de gouvernement collégial du style oligarchie.
La VIIIe
dynastie, semble être plus ou moins apparentée à la
VIe,
et est installée à Memphis.
La liste royale du
Papyrus de Turin mentionne 17 noms, considérés comme légitimes, mais d’autres documents
donnent 25 noms. La liste des Rois de la
VIIIe dynastie est, de ce fait, également très incertaine, elle nous est connue que par le
Papyrus
de Turin, les
Tables d’Abydos et Manéthon.
Les Nomarques de Haute-Égypte
¹
Après
la chute de la VIIIe dynastie et l’émergence des Rois
Héracléopolitains qui
prétendaient pourtant recueillir l’héritage des Rois Memphites,
plusieurs Nomarques du Ier au
XVe nome de Haute-Égypte sont connus pour avoir régné en toute
indépendance sur leur nome et souvent sur quelques
nomes voisins. Leurs tombes nous ont laissé les témoignages les
plus significatifs de la période dans de nombreuses nécropoles. À part le cas bien attesté des ceux
d’Assiout, ces Nomarques
n’ont montré aucune allégeance (ou presque) au Roi
d’Héracléopolis. Le problème
majeur est de les situer chronologiquement, à commencer par le mieux connu
d’entre eux, Ânkhtyfy, Gouverneur des trois
nomes de
l’extrême Sud de l’Égypte, qui fut un des rares fidèles aux Rois
d’Héracléopolis,
réunifiant ainsi la Haute-Égypte (Thèbes,
Abydos et
Thinis), dont la tombe se trouve à Moalla (ou Hefat
ville située en Haute-Égypte, au Sud de Louxor). L’action d’Ânkhtyfy ne peut se situer, qu’après l’époque de Shemaï
(ou Chemay) de Coptos, Vizir et Gouverneur de Haute-Égypte,
qui épouse Neber (ou Nebet) la fille du Roi Néferkaouhor,
mais avant l’émergence d’un pouvoir fort à Thèbes, donc
probablement avant le temps du Nomarque Antef et certainement avant les Rois Antef de la
XIe dynastie. En effet, à l’époque du
Roi Antef II (2118-2069), Hotepi
d’El Kab contrôlait pour le compte du Roi
Thébain les trois premiers
nomes de Haute-Égypte, tout comme Ânkhtyfy. Ils ne pouvaient
donc pas vivre au même moment.
La carrière d’Ânkhtyfy est connue par l’inscription biographique gravée sur les piliers de sa tombe.
Dans sa biographie, il souligne son action pour lutter contre la famine qui semblait régner de façon endémique à cette époque.
Il n’est pas le seul durant la période à faire état de fourniture alimentaire à la population. On a douté
de la réalité de cette situation de famine, pensant qu’il s’agissait seulement un thème de propagande pour mettre en évidence
la bonne gestion du Nomarque qui prenait soin de ses administrés en lieu et place d’un pouvoir central ?. Ânkhtyfy ne
mentionne aucun Roi dans sa biographie, toutefois dans une peinture de sa tombe apparaît de façon très anecdotique la légende :
“Horus apporte l’inondation à son fils NéferKarê“, qui serait vraisemblablement Néferkarê VII.
Toutefois cela ne prouve pas avec certitude sa fidélité au pouvoir
Héracléopolitain. Ce fut peut-être ses propres
intérêts qui le motivaient avant tout.
IXe et Xe dynastie
Peu à peu, une alliance de
nome, à
Héracléopolis Magma, au Sud du Fayoum,
se transforme en une monarchie (IXe dynastie),
inspirée sur le model Memphite.
Cette monarchie contrôle le Delta et une partie de la Moyenne-Égypte en s’appuyant sur la puissante famille des Nomarques
d’Assiout.
Les IXe
et Xe dynasties prennent comme capitale et résidence
Héracléopolis Magna, qui était la
capitale du 20e nome
de Haute-Égypte, le nome
"supérieur du Laurier rose" (nart-xnt). La
IXe dynastie est fondée par
Khéty I (ou Achtoi), en plus
de ce dernier elle comprend 6 autres Rois, relativement connus, dont un
Néferkarê VII,
évoqué par le Nomarque d’Héracléopolis, Ânkhtyfy.
À peu près à la même époque ou fut créé dans le Nord la
IXe dynastie, une autre dynastie, la
XIe,
voyait le jour à Thèbes en Haute-Égypte, avec
Montouhotep I (2134-2130)
comme premier Roi. Cette dynastie Thébaine,
avec l’aide de la ville de Coptos
va réussir à se rallier toute la Haute-Égypte.
Les monarques de ces dynasties
ne vont pas cesser de se combattre pendant plus d’un siècle plongeant le pays dans la guerre civile.
La région d’Abydos et
Thinis devient
la zone frontière entre les deux royaumes et un champ de bataille permanent. La dynastie
Thébaine avec
Montouhotep II (2061-2010)
parviendra à imposer son pouvoir sur tout le pays, mettant fin à la
Ière Période Intermédiaire.
Cette victoire va marquer le début d’une nouvelle ère d’unité et de prospérité en ouvrant le
Moyen Empire.
L’art au cour de la période
L’effondrement du gouvernement central et l’arrêt du développement dans plusieurs
provinces indépendantes ont également eu des conséquences sur le niveau artistique. Sans
l’appui de l’État, les ateliers à Memphis
n’étaient plus capables de produire les objets façonnés et la décoration de haute qualité qu’ils avaient
employé jusque là. Les Gouverneurs locaux choisirent d’utiliser leurs propres ateliers avec des artisans
manquant de formation. Les bas-reliefs et les statues qui furent créés pendant cette
période manque de finesse et de créativité. L’art
était plutôt maladroit et l’iconographie présente des visages rigides et disproportionnés.
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