Les
listes royales représentent la mémorisation des Rois et Pharaons qui ont régné
sur l’Égypte. Elles permettent aux spécialistes d’établir une chronologie.
Malheureusement dans presque tous les cas elles sont incomplètes, volontairement
de la part du rédacteur, Rois retirés car bannis, où parce que trop abîmées
lorsqu’elles nous sont parvenues. Elles peuvent se trouver sur différents
supports. Nous connaissons aujourd’hui :
Le papyrus de Turin
ou Canon royal de Turin
Le
papyrus de Turin, appelé également Canon royal de Turin, est écrit en hiératique.
La face avant du papyrus, donne des listes de nom de personnes et d’institutions
avec ce qui semble être une taxe ou un impôt pour chaque évaluation. Le verso
contient une liste des Dieux, des demi-Dieux, des esprits et les noms et années de règne de plus de
300 Rois, souvent précises au jour près, depuis le règne des Dieux jusqu’aux
débuts de la XVIIIe dynastie (1549-1295).
Presque toutes les dynasties y sont énumérées, y compris la dynastie des
Hyksôs
(XVe dynastie, v.1663-1530), mais le nom de ses Rois ne
sont pas dans un cartouche et un signe
hiéroglyphique a été ajouté pour indiquer qu’ils étaient des étrangers. Onze
colonnes de texte subsistent, chaque ligne donne le nom d’un Roi dans son
cartouche,
suivi par le nombre d’année de son règne. Des erreurs manifestes ont été
commises sur les durées de règne les plus anciennes, avec des périodes énormément élevées.
Vue d’une partie du Papyrus
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On constate également d’autres anomalies comme le
fait que les Rois de la III e dynastie (2647-2575)
possèdent leur nom dans un cartouche,
alors que celui-ci n’est utilisé qu’à la fin de cette dynastie, ou encore des
imprécisions concernant les noms. Parfois ce sont les
noms d’Horus
qui sont utilisé parfois non. Il faut encore souligner que le texte ne divise
pas les groupes en dynasties. Les Rois sont rassemblés selon leur capitale, de ce fait, ces regroupements ne
correspondent pas tout à fait aux dynasties telles que nous les connaissons
d’après Manéthon.
Lorsqu’il fut découvert dans la nécropole
Thébaine en
1820 par Bernardino Drovetti, il semble que le papyrus était en grande partie intact et devait
comporter près de 300 noms entiers. Malheureusement de mauvaises conditions de conservation au
Musée de
Turin, qui l’a acquis en 1823/1824, l’ont beaucoup détérioré. Le
papyrus est aujourd’hui très endommagé et est maintenant composé
d’environs 160 morceaux. Il faisait 1,07 m long et 0,41 m de hauteur. Il
est actuellement exposé au Museo Egizio de Turin (musée Égyptien).
L’égyptologue Français
Jean-François Champollion
sera le premier à s’intéresser à ce papyrus et produit un dessin de ce qu’il a pu déchiffrer.
Pui plus tard, le chercheur Saxon Gustav Seyffarth réexamine les fragments,
certains ont seulement 1 cm² de la taille. Il fait une reconstruction plus
complète du papyrus se fondant uniquement sur ses fibres, comme il ne pouvait
pas encore déterminer le sens des personnages en hiératiques.
Dessin du papyrus
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Des
travaux ultérieurs sur les fragments ont été faits par l’égyptologue Munichois
Lauth Jens Peter, qui a largement confirmé la reconstruction de Seyffarth.
Toutefois, seulement environ 50% de la surface est reconstruite. Même si ils ont réussi à placer
la plupart des fragments dans le bon ordre, l’intervention diligente de ces hommes est arrivée trop
tard et de nombreuses pièces de cet important papyrus sont toujours portées disparues.
Le début et la fin de la liste, sont aujourd’hui perdues, ce qui signifie que
l’introduction de la liste, si jamais elle a existé et l’énumération des Rois
suivant la XVIIe dynastie sont manquants.
Par conséquent, on ne sait pas avec certitude quand, après
avoir composé la liste des taxes et impôts sur le recto, un scribe inconnu a
utilisé le verso pour écrire cette liste des Rois.
Il semble, d’après certains spécialistes, qu’il a été écrit plus de 200 ans
après la mort du dernier Roi qu’il mentionne. Sa conception
daterait du règne de Ramsès II (1279-1213),
mais une date plus tardive comme la XXe dynastie ne peut
être exclue.
L’usage de l’arrière d’un vieux papyrus pour l’écriture de la liste des Rois
indiquent que la liste n’avait pas une grande importance aux yeux de l’écrivain.
Le scribe a-t-il simplement recopié un texte déjà existant ou probablement
avait-il accès aux archives des temples et il a établi la liste pour lui-même ?
Cette dernière possibilité peu semblé la plus probable vu que la Liste de Turin
est en effet un document unique. En 2009, des fragments inédits en bon état ont été découverts dans la salle
d’entreposage du Musée égyptien de Turin. Une nouvelle édition du papyrus est attendue.
Bibliographie
Pour
plus de détails sur le Papyrus de Turin voir :
Description et traduction de la liste – (The Ancient Egypt site)
et les ouvrages de :
Alan Henderson Gardiner :
– The Royal Canon of Turin, Griffith Institute, 1959 et (posthume) 1988 – Aris & Phillips, Wiltshire, 1997.
Jaromir Malek :
– The Original Version of the Royal Canon of Turin, pp. 93-106,
JEA 68, London, 1982.
Francesco Rossi, Willem Pleyte et Museo egizio di Torino :
– Papyrus de Turin, E.J.Brill, Leiden, 1869, 1876 et 1896 – LTR-Verlag, Wiesbaden, 1981.
John Gardner Wilkinson :
– The fragments of the hieratic papyrus at Turin : Containing the names of Egyptian kings, T. Richards,
London, 1851 – Kessinger Publishing Mai 2009.
Pierre de Palerme – Musée de Palerme –
Italie
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La pierre de Palerme
La
pierre de Palerme est un grand fragment d’un monument où figuraient les annales royales. Ce fragment
en basalte noir se trouve aujourd’hui au musée archéologique régional Salinas à Palerme, en Italie,
d’où il tire son nom. Le terme de Pierre de Palerme, le fragment le plus important,
est parfois appliqué à tort par les historiens en référence à l’ensemble du monument contenant les annales royales, qui
l’incluent avec six autres fragments situés aujourd’hui : Cinq au musée du Caire et un a l’University College de Londres,
des musées
qui n’ont donc jamais été à Palerme. Le fragment de pierre de Palerme est entré
dans la collection du musée
archéologique de la ville en 1877 dans le cadre de la collection permanente. Le
nom Annales Royales est le nom correct pour désigner la totalité de ce fragmentaire monument.
Sur la datation de la Pierre de Palerme les avis des égyptologues sont très
diverses, ils discutent encore pour savoir si tel ou tel passage aurait été
inscrit lors de la a a IVe dynastie (2575/3 à 2465) de la
Ve (2465-2323),
voire même de la VIe
(2321-2150). Certains spécialistes ont aussi avancés l’idée que la Pierre de
Palerme pourrait être une copie tardive.
Rolf Krauss
et Hans Wolfgang Helck
pensent qu’elle appartient à un monument datant de le
Troisième Période Intermédiaire (1080-656). Pellegrini à proposé la
Période Ptolémaïque
(305-30). L’argument en faveur d’une datation de
l’Ancien
Empire (2647-2150) réside dans le fait que les graphies des noms des Rois
des premières dynasties ne sont pas corrompues, c’est à dire que les
compilateurs ont eu accès directement aux documents anciens.
Ces annales comprennent la liste des Rois qui ont gouverné sur l’Égypte
unie, des dynasties 0 à
V, jusqu’au Roi
Néferirkarê I Kakai (2446-2438),
bien que la liste ait enregistré des événements après son règne sur une portions
qui a été perdu. La Pierre de Palerme est divisée en deux registres, le registre supérieur est une liste
hiéroglyphique sous la forme d’un tableau qui comporte les noms de Rois, tandis
que sur le second on trouve les éléments marquants de leur règne : Les fêtes religieuses
(tels que les fêtes Sed ou Heb-Sed), les guerres,
la hauteur de la crue du Nil, les expéditions, l’imposition, les sculptures, etc.).
Fragment de l’University College de Londres
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Cette liste est lacunaire, presque tous les Rois de la
IIe dynastie (2828-2647)
ont disparu. De plus, la datation est confuse car les dates
citées semblent se rapporter au nombre de recensements bisannuels de bétail (hesbet),
plutôt qu’au nombre d’années où le Roi a régné. Il faudrait donc multiplier
par deux pour avoir le nombre réel d’années de règne ?. Malgré
ces problèmes, elle reste une des sources les plus importantes pour notre
compréhension des premières dynasties de
l’Ancien Empire.
La pierre originale était inscrite sur les deux faces. Elle est probablement le
plus ancien texte Égyptien connu. Elle devait faire à l’origine environ 2.2 m de haut, 61 cm de large et de 6.5
centimètres d’épaisseur, mais elle a donc été divisée en un certain nombre de pièces, dont beaucoup ont
disparu. L’emplacement initial de cette stèle reste inconnu, on est même pas
certain que tous les morceaux trouvés appartiennent bien au même monument. Une
proposition fait provenir de la même pièce la Pierre de Palerme (PP) et les fragments 1 et 3 du
musée
du Caire, alors que les fragment 2 et 4 du
musée de
Londres seraient eux d’une autre et même pierre. L’ensemble des fragments n’a pas subi d’analyse pétrologique.
Plus de treize études principales ont été entreprises sur la pierre de Palerme
proprement dite. Il en ressort que cette pierre est plus certainement un document politique qu’historique.
Aujourd’hui on pense que selon toute vraisemblance cette stèle devait être placée dans un sanctuaire,
probablement à Memphis,
son origine est très discutée. L’égyptologue
Henry Edouard Naville, qui a été le premier à proposer une origine, la
situait à l’époque issue d’Héliopolis,
en raison du collationnement du texte. Mais cette idée fut bien vite abandonnée
lorsque furent découvert d’autres fragments. En 1910 les avis changèrent de
nouveau et on la situait plutôt provenant d’El-Minieh (Al-Minya, Moyen-Égypte).
Ce plus grand fragment du monument est à Palerme depuis 1866, il
avait été acquis par un collectionneur Italien F.Gaudiano qui en fit don au
musée en 1877. Cependant à l’époque il
n’était pas reconnu pour son importance. Il est "redécouvert" par un archéologue
Français qui visitait le musée en 1895 et a reconnu sa signification. Son contenu est publié pour la première fois en 1902
par Johan Heinrich Schäfer. Il existe donc d’autres pièces importantes dans les
musées. Vers
1903, deux nouveaux fragments sont découverts. En 1910 le
musée du Caire les
achète au marché noir des antiquités avec un quatrième. Un avait été utilisé comme butoir de porte, ce
qui l’a endommagé et effacé une partie importante.
Autre fragment aujourd’hui au Musée du Caire
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En 1916 un cinquième fragment est trouvé par
Georges Daressy, qui fouillait le sebakh
(Terme utilisé pour décrire des matériaux organiques décomposés qui peuvent être utilisés à la fois comme engrais agricole
ou comme combustible) sur le site archéologique de Memphis.
Ce sera le seul trouvé lors d’une fouille. En 1914, Sir
William Matthew Flinders Petrie fait l’acquisition, au marché des
antiquités, d’un sixième fragment bien conservé sur ses deux faces, provenant peut-être d’El-Minieh. Il se trouve
depuis 1963 à l’University College de Londres, auquel Petrie l’a donné. Enfin, en
1963, un fragment supplémentaire, dont l’origine n’est pas connue, a été acquis au marché des antiquités
par Françoise De Cénival et se trouve à aujourd’hui au musée du Caire.
De nombreuses listes existent, faites à des dates plus tardives comme le
Canon de Turin et la
Liste royale de Karnak.
Elles identifient toutes Ménès/Narmer
comme le premier Roi de la Ière dynastie (v.3040-2828)
et lui créditent l’unification de l’Égypte. La particularité de la Pierre de Palerme, qui est sensiblement plus âgés, est
qu’elle donne une liste des dirigeants qui sont antérieurs à
Ménès/ Narmer. Elle semble indiquer que l’unification du
pays a eu lieu plus tôt que le désigne la datation traditionnelle. Les travaux de
Manéthon indiquent qu’il a utilisé les informations contenues sur
cette pierre comme une source pour sa documentation de l’histoire de l’Égypte ancienne. Les chercheurs sont divisés sur la
façon d’interpréter les implications de la stèle. Comme pour d’autres documents, les informations qui y sont contenues sont
à relativiser. Certains Rois n’y figurent pas, sans doute considérés comme illégitimes. Ce qui fait penser à certains
spécialistes que leur inclusion dans la liste a seulement une valeur idéologique.
Bibliographie
Pour
plus de détails sur le Papyrus de Turin voir :
James Henry Breasted :
– Ancient records of Egypt : Historical documents from the earliest times to the Persian conquest,
Vol.1, The first to the seventeenth dynasties, C. Scribner’s Sons 1905 – The University of Chicago press,
Chicago, 1906, 1907 et (posthume) 1962 – Simon Publications, Décembre 1937 – University of Illinois Press, Mai 2001.
Georges Daressy :
– La Pierre de Palerme et la chronologie de l’Ancien Empire, pp. 161-214,
BIFAO 12, Le Caire, 1916.
Henri Gauthier :
– Quatre nouveaux fragments de la pierre de Palerme, Musée des Antiquités
Égyptiennes, Le Caire, 1915.
Gérard Godron :
– Quel est le lieu de provenance de la "Pierre de Palerme"?,
FÉRÉ, Bruxelles, 1952.
Rodolphe Hertsens :
– L’enigme de la Pierre de Palerme : Sa lecture et son contenu selon l’œuvre de Fernand Crombette,
CESHE, Tournai, Belgique, 1998.
Heinrich Schäfer :
– Ein Bruchstuck altägyptischer Annalen. Mit
Beitragen von Ludwig Borchardt und Kurt Sethe, Verlag der Königlichen
Akadamie der Wissenschaften, Berlin, 1902.
Toby Alexander Howard Wilkinson :
– Royal annals of ancient Egypt : The Palermo
stone and its associated fragments, Kegan Paul International, New York,
Distributed by Columbia University Press, Janvier 2000.
Les Tables
d’Abydos
ou Listes
d’Abydos
On
distingue deux listes différentes de Rois dites tables
d’Abydos.
Celle du Temple funéraire de Séthi I,
(XIXe dynastie, 1294-1279)
et celle découverte dans le Temple de Ramsès II
(1279-1213, XIXe dynastie).
La liste de Séthi I
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La liste de Séthi I
Elle
est située dans un passage, dit "couloir des Rois", qui était à l’origine la chapelle de
Sekhmet.
Elle montre le Roi Séthi I
et son fils Ramsès II
(1279-1213) qui font une offrande à leurs prédécesseurs.
Elle fut découverte par
Auguste Édouard Mariette. Elle comprend 76 noms de Roi et de Pharaons.
Elle se compose de trois rangées de 38
cartouches
sur chaque ligne. Les deux rangées supérieures contiennent les noms des
souverains qui sont présentés à priori dans l’ordre chronologique réel,
tandis que la troisième ligne ne fait que répéter le nom règne
Séthi I.
Elle commence à partir du Roi
Narmer/ Ménès
et les Rois de l’Ancien Empire, puis
donne les Rois du Moyen et
Nouvel Empire et se
terminent avec le Roi Séthi I. Cette liste ne
tient pas compte des Rois d’Héracléopolis
de la IXe et
Xe dynastie, mais elle est la seule source qui donne la plupart des dirigeants de la
VIIe et
VIIIe dynasties, de
sorte que cette liste a une valeur hautement importante.
Elle ne comprend pas les noms de nombreux souverains qui sont considérés comme n’ayant pas existé :
Hatchepsout (1479-1457),
Amenhotep IV (Aménophis ou Akhénaton, 1353/52-1338),
Semenkhkarê
(ou Smenkhkarê, 1336),
Toutânkhamon (1336/5-1327) et
Aÿ II (1327-1323).
De plus, les chevauchements de règnes sont systématiquement effacés.
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