Sa politique extérieure
Sésostris III – Musée de Louxo
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Afin de garder les bonnes relations commerciales avec la
Palestine, Sésostris III, engage une première campagne militaire dans la région,
sans doute dans une tentative pour arrêter l’infiltration des Asiatiques et punir très probablement
quelques tribus de voleurs nomades qui avaient essayé d’entrer en Égypte. Le nombre de textes
d’exécration (Type particulier de textes magiques qui sont des inscriptions de
lieux, ou de groupes ethniques, ou d’individus qui ont été considérés comme
dangereux) trouvés en
Syrie/Palestine est assez élevé, ce qui montre la politique anti-Asiatiques
de Sésostris III. Le Roi en profite pour éliminer des Gouverneurs locaux qui
avaient maintenu leur puissance depuis la
Première Période Intermédiaire. Les Égyptiens, lors de cette campagne, vont se retrouver confrontés aux populations de
Sichem
et du Litani. Devenu le type idéal de conquérant, Sésostris III sera divinisé au
Nouvel Empire. Il reçoit un culte à
Ouronarti où une chapelle lui est dédiée, ainsi qu’à Bouhen.
Une des trois statues en granit représentant Sésostris III provenant de
Deir el-Bahari – British Museum
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Sa politique intérieure
En politique intérieure, Sésostris III est
celui par qui le pouvoir sera centralisé. Il est souvent crédité d’avoir enfin réussi à
briser le pouvoir des Nomarques bien qu’il n’y ait aucune preuve directe pour soutenir
cette affirmation. Ce qui est sûr c’est qu’il fait face à la menace que constituaient
les dynasties de féodaux en réorganisant radicalement l’administration et en
tentant d’éliminer ces dernières lignées de Nomarques. Cette organisation,
débutée sous son père, reposait sur une division du pays en trois régions, le
Nord, le Sud et la "Tête du Sud"
(Éléphantine
et la Basse Nubie). Chacune d’entre elles était gouvernée par un ministre
(Ouâret), un assistant et un conseil (Djadjat) placés sous l’autorité du
Vizir. La disparition de l’ancienne caste dirigeante va laisser la place à une
nouvelle bourgeoisie attestée par l’apparition de monuments funéraires privés.
En ce qui concerne les hauts fonctionnaires en fonction sous sont règne, on a
connaissance de deux Vizirs datés avec certitude : Sobekemhat et Nebit. Ils sont
connus de leurs mastabas qui furent mis au jour à côté de
la pyramide du Roi de
Dahshour. Un autre Vizir au
nom de Khnoumhotep, est peut-être à ajouter, car par contre on est sur qui fut en activité sous
Amenemhat III.
Plusieurs trésoriers peuvent être regroupées sous Sésostris III : Sobekemhat qui
portait ce titre avant d’être nommé Vizir ; Senânkh qui était en activité en
l’an 8 et Iykhernofret à la fin du règne du Roi. Celui-ci apparaît sur une
stèle, sur laquelle il est nommé avec un autre fonctionnaire, Inpy, qui
exerçait déjà sous le règne de Sésostris II.
Sa renommée, ses constructions
Sésostris III apparait dans des sources plus tardives
comme l’un des grands Rois de l’Égypte, même s’il n’est pas toujours évident de savoir si cela s’applique à
ses actes réels ou si plus tard les historiens ont extrapolé des légendes qui
se rapportaient à lui.
Hérodote (Historien
Grec, v.484-v.425, Livre II, 102-104) raconte les conquêtes de
Sésostris III par la mer Rouge. Il a également signalé des stèles qui ont été
érigées par le souverain dans les territoires conquis. Sésostris III n’a pas une
grande activité de bâtisseur. Il est possible qu’il fut trop impliqué dans sa
politique étrangère pour passer une grande partie de son temps sur la
construction. Il fait ériger cependant quelques temples dans la région de
Thèbes,
notamment celui en l’honneur du Dieu
Montou et il fait
réaliser beaucoup de statues à son effigie. Dans ce domaine,
sur le plan artistique, Sésostris III semble avoir été un réformateur. Depuis le
début de la période dynastique, le Roi a toujours été, et quel que soit son âge
et ses capacités physiques, représenté comme un jeune homme vigoureux, avec un
visage sans âge. Contrairement à cette tradition, de nombreux reliefs et statues
de Sésostris III le montrent comme un homme âgé et fatigué. Il convient toutefois
de noter que le reste de son corps est toujours celui d’un jeune homme musclé.
Sésostris III – Musée Égyptien du Caire
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Sa sépulture
Sésostris III est le deuxième Roi de la
XIIe dynastie à choisir
Dahshour comme lieu pour
son
complexe funéraire. Il le construit non loin au Nord-est de la
pyramide rouge de
Snéfrou (2575-2551,
IVe dynastie).
La pyramide est découverte par J.S.Perring en septembre 1839. Elle sera
fouillée successivement par
Karl Richard Lepsius, qui lui donne le numéro 47 sur sa liste, par
Gaston Maspero, Jacques Jean Marie de Morgan et plus récemment par
Dieter Arnold, qui de 1990 à 1999, pour le compte du Metropolitan Museum of
Fine Arts de Boston a achevé d’étudier l’ensemble
du
complexe. La
pyramide mesurait 105 m de base, mais pour sa hauteur les
spécialistes sont loin d’être unanimes, on trouve : 61,25 m, 64,13 m et environ 78 m ?.
Ce qui reste de la
pyramide aujourd’hui est une colline avec un énorme
cratère en son centre. Â ses cotés, on trouve
sept plus petites pyramides, ainsi que sept autres tombeaux. Certains pour
les filles et la "mère" du Roi. Une galerie souterraine conduisait aux quatre
pyramides des Reines. Les tombeaux ont livré d’étonnants trésors d’orfèvrerie connus
sous le nom de "Trésor de
Dahshour". Certains spécialistes pensent que le Roi aurait été enterré
dans son deuxième complexe funéraire, à
Abydos, car la
chambre funéraire de
sa pyramide ne semble pas avoir été utilisée. Toutefois nous n’avons pas retrouvé à ce jour
d’ossements qui confirmerait ce lieu d’enterrement. En l’absence de restes, la
sépulture réelle de Sésostris III doit encore être trouvée.
(Voir l’article sur
son complexe funéraire).
Sa famille
Sésostris III eut quatre ou cinq épouses qui lui sont attestées en fonction des
spécialistes. Certains comme
Joyce Anne Tyldesley
n’en comptent que trois. Sous le règne de Sésostris III apparaît pour la première fois le titre de
Grande Épouse Royale :
Pectoral Sésostris III – Musée Égyptien du Caire
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• Néferousobekshedeti (ou Sobekshedeti Néferou) dont on ne sait pas grand chose.
Il faut signaler que cette union est loin de faire l’unanimité. Elle n’est donc pas reconnue par
tous les spécialistes et le fait que ce soit cette femme qui donna au Roi son fils
Amenemhat III est de ce fait
aussi très controversé. Le Roi eut cinq autres enfants dont nous ne connaissons pas les
mères, il est possible que cette "Reine" fut la mère de certains.
• Khenemetnéferhedjet II Khered (ou Oueret II – "la Jeune"
ou Knemetnéferhedjet ou Chnumneferhedjet ou Chenmetneferhedjet
– Xnmt nfr-HDjt –
"Celle qui est unie à la Couronne Blanche (à la Parfaite)".
Elle est mentionnée sur deux des statues de son mari, aujourd’hui situées au
British Museum et au Musée Égyptien du Caire. Elle possède
une pyramide dans le
complexe de son époux à
Dahshour où ses bijoux furent retrouvés en 1994.
Sa pyramide a la particularité de posséder une infrastructure accessible par
un puits dont l’accès se trouve près de celle de son époux. Le puits débouche sur deux galeries.
Un appartement funéraire se trouve sous la
grande pyramide du Roi
tandis que l’autre se trouve sous la
pyramide de la Reine.
Il est évident que sa tombe devait être achevée au début du règne de Sésostris III avant la pose des premières
assises de briques de la
pyramide du souverain. Il n’y a pas d’enfant connu de cette union,
mais ce Roi ayant eu six enfants attestés dont cinq dont on ignore les mères, cette Reine
pourrait très bien être la mère de certains. Selon
Aidan Marc Dodson et Hilton Dyan, ses titres étaient :
Grande (Dame) au sceptre Hetes (wrt-Hts) et
Épouse du Roi (hmt-nswt).
• Néferouhenout
(ou Néfret-Hénout ou Neferhenut ou Nofrethenut – Nfrt hnwt).
Elle n’est, à aujourd’hui, seulement connue que par son sarcophage, sur le quel se trouvait ses titres et à
partir de fragments de sa chapelle trouvés à côté de
sa pyramide (environ 16,80 m × 16,80 m), qui faisait partie du
complexe pyramidale de Sésostris III à
Dahshour. La position de sa tombe, à côté de la
pyramide du Roi, confirme qu’il est très probable qu’elle fut sa femme.
Aujourd’hui la
pyramide est dans un très grand état de délabrement.
Néferouhenout
portait les titres : Épouse du Roi unie à la couronne blanche
(HmT-nswt Xnmt-nfr-HDjt) et
Celle qui voit Horus et Seth (mAAt-@r-¤tx).
Buste d’une statue en diorite de Sésostris III trouvé à Médamoud – Musée du Louvre
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• Méretseger (ou Méréret ou Mereretséger –
Mr.t sgr – "Celle qui aime le silence"). Son nom est
aussi celui d’une Déesse (Mereretséger ou Mertseger ou Meretseger ou Mertseger ou Mert-Seger). Elle n’apparaît comme une des
épouses de Sésostris III seulement que dans des sources datant du
Nouvel Empire.
Elle fut représentée sur une stèle de cette époque, aujourd’hui au British Museum et
sur une inscription à Semna, datant du règne de
Thoutmôsis III (1479-1425). Selon certains
spécialistes elle serait la première Reine à porter le titre de
Grande Épouse Royale,
qui deviendra le titre de toutes les premières épouses des Rois et Pharaons. Elle serait
également la première Reine dont le nom fut écrit dans un
cartouche.
Toutefois, il n’y a pas de sources contemporaines relatives à Méréret. Jacques Jean Marie de Morgan a mis au jour
dans sa tombe de nombreux riches objets : Pendentifs, bracelets, colliers, diadème, ornement de cheville etc…
Sésostris III eut six enfants et pour cinq d’entre eux on ignore qui sont les mères, il est fort probable que Méréret
fut la mère d’un ou de plusieurs de ces enfants. Elle portait les titres :
Épouse du Roi (hmt-nswt) ;
Grande Épouse Royale (Hmt-nswt wrt).
•
Sithathor-Iounet
(ou Sithathor Younet – S3t Hwt Hr Jwnt –
"Fille d’Hathor de Dendérah"), qui serait sa sœur ou sa demi-sœur. Elle n’est
donnée que par quelques spécialistes. Pour d’autres il n’est même pas certain qu’elle fut une fille de
Sésostris II.
Deux titres lui seraient attribués :
Fille du Roi (s3T-nswt-nt) et
Épouse du Roi (hmt-nswt).
Sésostris III a cinq
autres enfants attestés qui furent enterrés dans son
complexe funéraire,
mais on ignore qui sont leurs mères :
▪ Meryt (ou Mereret). Elle
nous est connue par une inscription sur son sarcophage et quatre scarabées où il
est indiqué comme titre "Épouse du Roi", ce qui fait dire à certains
spécialistes qu’elle ne fut peut-être pas une fille de Sésostris III, mais une épouse (de lui où d’un autre Roi).
▪ Sithathor (ou Sithathor ou Sathathor). Dans son tombeau Jacques Jean Marie de Morgan,
a trouvé deux coffres, qui contenaient des bijoux très riches et de grande qualité. Ils ont
apparemment été négligés par les pilleurs de tombes. Elle nous est connue aussi par un scarabée trouvée à
Dahshour.
▪ Ment (ou Menet). Elle nous est connue par une inscription sur son sarcophage.
Elle portait le titre "Fille du Roi unie avec la beauté de la couronne blanche".
▪ Senet-Senebetes (ou Senet-Senebti ou Senetsenbetes). Elle nous est connue par
une inscription sur son sarcophage.
▪ Khnemet dont ne sait rien. Elle n’est pas reconnue par tous les spécialistes.
Bibliographie
Pour d’autres détails sur le Roi voir les ouvrages de :
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capital of Egypt, Ägypten und levante 5, Wien, 1995.
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James Peter Allen :
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Dahshur : Architectural studies, Museum of Art, Août 2000
et 2002 – Yale University Press, Septembre 2003.
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– New Evidence for the Length of the Reign of Senwosret III ? pp : 27–32,
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record of the rulers and dynasties of ancient Egypt, Thames and Hudson, New York, 1994, 1996, Novembre 2006
et janvier 2007 – American University in Cairo Press, Le Caire, 2006 – En Français, Avec
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Chronique des pharaons : L’histoire règne par règne des souverains et des dynasties de l’Égypte ancienne,
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– Le "Dieu" Nubien Sésostris III, pp : 207-213,
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