Vue d’une partie du site
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Noms et localisation
Pi-Ramsès (ou Pi-Ramesse ou Per-Ramsès ou Aa-nakhtu
ou Per-Rames-su-méri-amon-pa-ka-aa-en-pa Ra-Hor-achti "La maison dans la ville de Ramsès" en Égyptien,
ou Qantir en arabe) fut une ville de Basse-Égypte entre le Nil et le désert arabique dans le
19e nome de Basse-Égypte,
le nome "inférieur de l’enfant royal"
(nn-pH). Le site exact fut très longtemps sujet à plusieurs interprétations.
Pour l’égyptologue
Pierre Montet Pi-Ramsès se trouvait sur le site de Tanis
où il mit à jour entre 1929 et 1939 un temple d’
Amon. Il mit aussi à jour des sanctuaires dédiés à
Horus,
Khonsou
et Mout, vingt trois obélisques et un grand nombre
d’habitations et des tombes encore intactes des
XXIe dynastie (1070/69-945) et
XXIIe dynastie (945-715).
Pour d’autres égyptologues il s’agissait du site même de Qantir, où furent retrouvés beaucoup d’objets
datant de la XIXe dynastie
(1295-1186) : Des poteries, des mosaïques et dalles, des faïences ainsi que des ostraca et des blocs de granit provenant
d’un sanctuaire. D’après les textes la ville et le port furent établis à la jonction de deux bras du
Nil : "Les eaux d’Avaris"
à l’Est et "Les eaux de Rê" à l’Ouest.
Ces idées furent abandonnées depuis la découverte, dans les années 1960, par l’égyptologue
Manfred Bietak d’un autre site. Aujourd’hui on pense que c’est ce dernier qui abrita la ville de
Ramsès II (1279-1213) qui se situe plus précisément
entre Tell el-Dabâ (ou Tell el Dab’a ou Tell el-Dabaä), Qantir et Khatana, sur la branche pélusiaque du Nil, à environ 1 km des bases de
l’ancienne Avaris, la capitale des
Hyksôs. Le port de la cité doté de vastes docks pouvait
accueillir de nombreux bateaux. Il était facilement accessible depuis la Méditerranée.
L’histoire…..
La cité fut fondée par
Ramsès II (1279-1213) de la
XIXe dynastie (1295-1186), aucune trace d’habitation ne remonte
avant cette dynastie. Cette région d’Avaris fut le berceau
des Ramessides, Séthi I (1294-1279) y avait fait construire
un palais et Ramsès II y avait grandi. Cependant la décision
du Pharaon de transférer son gouvernement et la résidence royale de
Thèbes au Delta fut sûrement plus influencée par des questions
géopolitiques que par amour de la région, ou raisons familiales. En effet, il choisit cet emplacement, dans le Delta oriental
du Nil, dans le but de pouvoir accéder plus rapidement en
Palestine en cas de rébellion
des territoires soumis. Les renseignements et les diplomates atteignaient le Pharaon beaucoup plus rapidement. La ville était
la première grande cité que l’on découvrait en arrivant en Égypte par l’Est et son aspect monumental devait impressionner,
tant elle comportait de monuments à la gloire du souverain.
Autre vue d’une partie du site |
La cité fut aussi la première défense de la vallée du Nil contre
une éventuelle invasion. Les armées Égyptiennes de mer et de terre étaient cantonnées à proximité de la ville, donc des
frontières asiatiques et pouvaient être rapidement mobilisées pour faire face aux incursions
des
Hittites ou
des Shasous,
Shsw, bédouins localisés d’abord en Transjordanie, qui furent ensuite cités
en Palestine du Sud). Son choix fut aussi dicté par le fait que sa nouvelle capitale devait être établie au confluent des
nouvelles routes commerciales. Entourée sur trois côtés par des bras secondaires de la branche pélusiaque du Nil, la capitale
Ramesside se trouvait au nœud des réseaux marchands et de circulation de l’Empire.
Ramsès II fit de Pi-Ramsès sa capitale
économique et politique, Thèbes ne se cantonnant plus qu’à un simple
rôle religieux. Construite sur les rives de la branche pélusiaque du Nil et avec une population de plus de 300 000 habitants,
Pi-Ramsès prospéra pendant plus d’un siècle après la mort de
Ramsès II et des poèmes furent écrits sur sa splendeur. En l’espace de quelques années, sous la direction de son architecte,
May, Ramsès II dota sa nouvelle cité d’éblouissants
palais, de temples, de villas, de bâtiments administratifs, de quartiers d’artisan et de casernes.
L’aménagement de la ville se composait d’un énorme temple central, d’une zone importante de maisons en
bordure du fleuve à l’Ouest et de rues et d’une collection désordonnée de maisons et d’ateliers à l’Est. Le palais de Ramsès
est censé se trouver sous le village moderne de Qantir. Le site comprenait aussi un sanctuaire dédié au Dieu
Seth, le Dieu dynastique.
Une équipe d’archéologues, de l’Institut archéologique Autrichien du Caire, dirigée par l’égyptologue
Manfred Bietak, depuis les années 70, mène des fouilles qui nous permettent de connaître peu
à peu le plan de la ville et son histoire. Les archéologues ont trouvé des preuves de nombreux canaux et de lacs et
ont décrit la ville comme la "Venise de l’Égypte".
Autre vue d’une partie du site
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Dans les gigantesques écuries ont été mises au jour
des petites citernes situées à côté de chacun des 460 points d’attache de chevaux. Selon les dernières estimations,
Pi-Ramsès s’étalait sur une vaste zone d’environ 18 km2, soit environ 6 km de longueur sur 3 km de largeur.
Ce qui en fait l’une des plus grandes villes de l’ancienne Égypte. Rien que le palais que
Ramsès II se
fit construire possédait une enceinte qui s’étendait sur plus de 500 m de côté.
Il était bordé au Sud de la ville par le temple de
Seth,
le temple de Rê à l’Ouest, le temple de
Ptah au Nord et le grand temple
d’Amon à l’Est. Les murs du palais étaient
ornés de peintures évoquant des scènes champêtres et les mosaïques représentaient des parterres de fleurs ou de lotus
et des étangs.
Des vastes terrasses s’ouvraient sur le grand lac sacré
et les jardins du palais. Au centre de la ville se trouvait le grand parvis ou
se déroulaient les fêtes et les jubilés. Il possédait six obélisques en granit.
Dans toute la cité on trouvait des colosses à l’effigie du Pharaon. Les portes
et les fenêtres de toutes les maisons blanchies à la chaux étaient encadrées de
dalles vernissées d’un bleu particulier qui donna son surnom à la cité de
"ville turquoise". La cité resta une grande capitale plus d’un siècle, jusqu’au règne du Pharaon
Ramsès III (1184-1153,
XXe dynastie), puis elle déclina rapidement,
comme le reste de l’Empire sous le règne des Ramsès suivants de la
XXe dynastie (1186-1069).
Pi-Ramsès subit les incursions Libyennes et Asiatiques et, de ce fait,
fut vite supplantée par Tanis, 100 km au Nord-ouest,
qui devint, vers l’an 1100, la résidence du gouvernement. Les Pharaons de la
XXIe dynastie (1070/1069-1045) firent transporter
tous les vieux temples de Ramsès II, les
obélisques dont certains pesaient 200 tonnes, les stèles, les statues et les sphinx de Pi-Ramsès vers leur
nouvelle capitale. On a retrouvé à Tanis de très nombreuses
traces de ces déménagements. Les bâtiments de moindre importance qui ne pouvaient être emmenés d’un seul bloc
furent démontés et leurs pierres furent recyclées pour la création de nouveaux temples et édifices à
Tanis.
Autre vue d’une partie du site |
C’est sûrement en raison du déplacement de la branche pélusiaque du Nil, vers
1060, que la cité fut peu à peu abandonnée à la fin de la
XXIe dynastie. Il faut aussi préciser qu’à cette époque, la ville de
Thèbes reprenait de l’importance jusqu’à devenir la capitale de
Haute-Égypte et la résidence des Grands
Prêtres d’Amon dont certains se proclamèrent Rois. Le pouvoir se trouvait désormais à
Thèbes et à
Tanis appelée aussi la Thèbes du Nord.
Tanis dont les grands obélisques, qui portent presque tous le nom de
Ramsès II, devaient être initialement dressés sur les
parvis du palais royal et des temples de Pi-Ramsès. Abandonnée, la ville deviendra une vaste carrière
comme beaucoup d’autres cités, pour disparaître définitivement à la fin de la
Basse Époque (656-332), mais surtout quand les
Romains occuperont le pays.
Aujourd’hui en raison de la mise en culture intense du Delta, le site est difficile à cerner. Au milieu
des champs sont éparpillés des socles de colonnes et des vestiges de statues en granit. Le soubassement d’un colosse dont
il ne reste que les pieds et qui devait dépasser dix mètres de haut confirme les descriptions grandioses de la cité qui
marqua les imaginations de l’époque. Les fouilles régulières dirigées par
Manfred Bietak, en collaboration avec l’institut d’égyptologie de
l’université de Vienne, nous éclairent un peu plus chaque année sur ce que fut
cette cité et son influence sur la politique du pays. Selon l’Ancien Testament
Pi-Ramsès serait le point de départ depuis lequel le peuple
d’Israël partit en Exode.
Bibliographie
Pour d’autres détails sur la cité et ses monuments voir les ouvrages de :
Shehata Adam :
– Recent discoveries in the eastern Delta (Dec. 1950 – May 1955), pp
: 301-324,
ASAE 55, Le Caire, 1957.
Manfred Bietak :
– Vorläufiger Bericht über die erste und zweite Kampagne der österreichischen
Ausgrabungen auf Tell el-Dab im Ostdelta Ägyptens (1966/1967), pp.79-114,
MDAIK 23, 1968.
– Vorläufiger Bericht über die dritte Kampagne der österreichischen Ausgrabungen auf
Tell el-Dab‘a, pp.15-41,
MDAIK 26, 1970.
– Tell el-Dab´a II. Der Fundort im Rahmen einer archäologisch-geographischen untersuchung über das ägyptische Ostdelta,
Wien, 1975.
– Avaris and Piramesse : Archaeological exploration in the Eastern Nile Delta, Mortimer Wheeler archaeological
lecture, Oxford University Press, Oxford, 1981.
– Ein Friedhofsbezirk der mittleren Bronzezeitkultur mit Totentempel und Siedlungsschichten. Tell
El-Dab’a. Bd V/1. Verlag der österreichischen Akademie der Wissenschaften, Wien, 1991.
Ricardo A.Caminos :
– Late-Egyptian Miscellanies, Brown egyptological studies 1, Oxford, 1954.
Labib Habachi :
– Khatâ’na – Qantir : Importance, pp : 443-562,
ASAE 52, Le Caire, 1954.
– Features of the deification of Ramesses II, Abhandlungen
DAIK 5,
Ägyptische reihe, J.J.Augustin, Glückstadt, 1969.
Labib Habachi, Peter Jánosi, Eva-Maria Engel,
Christa Mlinar et Ernst Czerny :
– Tell Al-dab’a I : Tell Al-dab’a and Qantir the site and its connection with Avaris and Piramesse,
Verlag der Österreichischen Akademie der Wissenschaften, Wien, 2001.
Mahmud Hamza :
– Excavations of the department of antiquities at Qantîr (Faqûs district) : (season, May 21st-July 7th, 1928),
pp : 31-68, ASAE 30, Le Caire, Janvier 1930.
Edgar Bruno Pusch :
– Die grabungen des Pelizaeus-Museums Hildesheim in Qantir-Piramesse : Forschungen in der Ramses-Stadt,
Österreichischen Archäologischen Instituts Kairo, Philipp Von Zabern, Mainz, 1978.
– Hochtemperatur-technologie in der Ramses-Stadt 1/2 Grabungen des Pelizaeus-Museums
Hildesheim in Qantir-Piramesse. 6, Katalog, Gerstenberg, Hildesheim, Janvier 2007.
Edgar Bruno Pusch et Thilo Rehren :
– New kingdom glass-melting crucibles from Qantir-Piramesses, pp : 127-141,
JEA 83, 1997.
Dominique Roussel :
– Les inscriptions monumentales des temples de Pi-Ramses d’après les vestiges de Tanis : Architectures, images et
textes, IOAN : Paris 3, Paris, 1991 et 1992.
Andreas Tillmann :
– Ein steingerätinventar des neuen reiches aus Qantir/Piramesse (Ägypten Vorbericht),
Archäologisches Korrespondenzblatt 16, Verlag der römisch-germanischen Zentralmuseums, Mainz, 1986.
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