Sa durée de règne et son origine
Khâsekhemoui – Ashmolean Museum Art – Oxford
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Khâsekhemoui (ou Khâsekhem ou Khâsekhmemouy) est
un Roi de la IIe dynastie. Il n’est pas mentionné par
Manéthon. Le
Papyrus de Turin lui compte vingt-sept
ans deux mois et un jour de règne, ce qui semble être confirmé par
certains documents et rencontre l’approbation de la presque majorité des
spécialistes. Le papyrus nous indique également que le Roi meurt à l’âge de 40ans. Toutefois, de
Nekhen (ou Hiérakonpolis), où les assises des
statues du Roi ont été trouvées, proviennent plusieurs fragments de bas-relief où l’on voit le Roi
participer à une
fête Sed
(ou Heb-Sed) ce qui est étrange car cette fête était en
l’honneur de trente ans de règne. Malgré d’autres informations, notamment sur la
Pierre de Palerme, il est toujours
aujourd’hui incertain d’affirmer une durée de règne pour ce Roi, tout au plus on peut penser
que 27/28 ans semble correcte.
Jacques Kinnaer avance un peu plus de 40 ans, il y a peut être confusion
avec l’âge du Roi à son décès ?.
Nous ne savons rien sur son origine, tout au plus quelques spéculations. Francesco Raffaele et
Hans Wolfgang Helck pensent
qu’il est un proche de Péribsen/Sekhemib, sans toutefois
affirmer qu’il est son fils. Il base leur théorie sur le choix du Roi pour de lieu de sa sépulture,
dans la nécropole d’Oumm el-Qaab à
Abydos, comme son prédécesseur et
apparemment comme lui aucune tombe à Saqqarah.
Par conséquent une origine commune pour ces deux dirigeants, de la ville de
Kom Ombo, est acceptée par la
grande majorité des spécialistes. Une thèse, dépassée aujourd’hui mais qu’il convient encore
de citer, était le fait que Khâsekhemoui et
Péribsen ne faisait qu’un.
Vase (ou pot) avec couvercle
en or trouvé dans la tombe de Khâsekhemoui – British Museum
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Ses différents noms
Il existe de nombreuses variations connues du nom de ce souverain.
Pour la grande majorité ils furent retrouvés inscrits dans un
Sérekh. Les deux principaux sont Khâsekhem et
Khâsekhemoui. Certains spécialistes pensent, mais ils sont peu nombreux
aujourd’hui, que Khâsekhem et Khâsekhemoui furent deux Roi différents.
La majorité des chercheurs est d’accord pour dire qu’il régnait d’abord dans
le Sud sous le nom de Khâsekhem. Il aurait changé de nom lors de la
réunification du pays et se serait mis sous la protection des deux Dieux
Horus
et Seth, comme le montre son
nom d’Horus. Ce dernier est inscrit dans un
Sérekh et présente la particularité de ne
pas juste avoir un faucon Horus, mais les deux
Dieux perchés ensemble sur la façade de palais.
Horus Khâsekhem n’est attesté en fait qu’en Haute-Égypte à
Nekhen (ou Hiérakonpolis).
Hans Wolfgang Helck pense
que le double nom d’Horus
Seth,
pourrait indiquer le fait que l’égalité entre les deux Dieux était simplement à titre d’illustration et
symbolisait le pouvoir du Roi sur les deux moitiés du pays. Un autre de ses noms, qui apparaît dans les
listes
royales de Turin et de Saqqarah,
fait l’objet d’intenses recherches: Bebty ou Beby ou Bebety. Il est écrit dans un
cartouche. Beaucoup
d’égyptologues pensent qu’il s’agit là d’une interprétation erronée et cherchent quel pourrait être son véritable
nom de naissance.
Il est plus susceptible de s’être effectivement appelé Djadjay, comme le propose la
liste d’Abydos, nom qui est lui aussi dans un
cartouche.
Selon l’égyptologue
Hans Wolfgang Helck il pourrait se nommer Khâsekhemoui Besch, comme l’indiqueraient plusieurs vases et quelques
autres artéfacts.
Identifications
Fragment en
granit rose, avec le Sérekh du Roi, du chambranle d’une porte trouvée à Hierakonpolis.
Musée du Caire
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Khâsekhemoui
est attesté par plusieurs monuments, artéfacts et objets dont plusieurs de ces derniers viennent de
Hierakonpolis. Parmi eux se trouve une
porte en granit rose d’Assouan,
1 m 55 de haut pour 1 m 20 de large, qui se trouvait dans le quartier du temple de la ville et qui retrace ses victoires.
Elle est aujourd’hui au musée du Caire. Selon
James Edouard Quibell, il y a aussi
trois vases de pierre et deux statues avec des inscriptions sur leurs bases qui
retracent d’autres victoires. Son nom figure également sur un fragment de jarre provenant de
Byblos, ainsi que sur
une stèle de granit trouvée près du cimetière
d’El Kab (Ancienne Nekheb, sur la rive orientale du Nil
en face de Hiérakonpolis).
D’autres inscriptions du nom du souverain ont été trouvées : Dans une fosse privée à
Saqqarah, ainsi que dans le
complexe pyramidale de Djoser. Sur une
stèle faite à partir d’un gros bloc d’ardoise de quartzite de couleur verte,
semblables aux stèles royales de l’époque archaïque à Abydos.
La stèle représente le Roi avec le
nom d’Horus Khâsekhemoui dans un
Sérekh.
Vraisemblablement, cette stèle a été érigée peu de temps avant ou juste après la
réunification. Elle fut trouvée près du temple de
Nekhen (ou Hiérakonpolis) et est
aujourd’hui au musée du Caire.
Fragment d’un vase avec une inscription de la victoire –
Ashmolean Museum Art – Oxford
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La conception artisanale de tous ces composants
est d’un niveau très élevé et présente tant d’analogie avec les sculptures des
premières années de la IIIe Dynastie (2647-2575),
qu’il n’y a aucun doute quant à leur classement chronologique. Sous les pavés du temple
d’Horus à
Nekhen,
James Edward Quibell a mis au jour,
en 1898, plusieurs articles dont les deux célèbres statues du Roi. Une est aujourd’hui à l’Ashmolean Museum Art à Oxford et
l’autre au musée Égyptien du Caire.
Ces statues ont une grande valeur artistique et sont très similaires en apparence. La statue du Caire, qui montre le Roi
assis sur un trône, est haute de 56,5 cm et large de 13,3 cm. Malheureusement il manque la
moitié du visage. Elle fut retrouvée enterrée dans le plancher d’une chambre à
l’Est du temple. Elle se trouvait avec une imposante statue de lion en terre
cuite, de la même période, et la célèbre statue en cuivre du Roi
Pépi I (2289-2255). La
statue d’Oxford est similaire d’aspect, seulement, dans son cas, c’est le corps qui est en mauvais
état et la tête bien conservée.
Son règne
De nombreux égyptologues sont certains que Khâsekhemoui succède à
Péribsen/Sekhemib sur le Sud du pays.
Cette hypothèse est soutenue par le fait d’une même dévotion des deux Rois pour le Dieu
Seth. Pour ceux partisans de deux
Rois différents entre Péribsen
et Sekhemib,
il succèderait à ce dernier. Il se serait lancé à la conquête du Nord où il serait sorti victorieux.
Toutefois cette théorie n’est pas confirmée par des inscriptions, celles-ci qui parlent plus de troubles et
d’agitations dans le pays que de guerres.
D’autres inscriptions sur des vases avancent les mêmes propos et indiquent
que Khâsekhemoui, Roi du Sud, se saisit du pouvoir dans le Nord du pays suite à une violente guerre civile en Basse-Égypte, dans le Delta du Nil. Les égyptologues
Nicolas Grimal et
Jochem Kahl, suggèrent que le Roi du Nord ne pouvait faire face à ces émeutes, mais il refusa le soutien que
lui proposait Khâsekhemoui, en vertu du fait qu’il avait été décidé après la mort de
Ninetjer (2787-2743) la
séparation du pays et qu’il ne souhait pas renoncer à son indépendance.
De ce fait Khâsekhemoui n’eut pas d’autre choix que de partir à la conquête des territoires de
son collègue de Basse-Égypte d’où il sortit vainqueur. Sur un autre vase de pierre, on trouve enregistrés l’année de
la lutte contre l’ennemi du Nord de la ville
de Nekheb. Il semble que ce fut
une bataille majeure et dramatique entre la Haute et Basse-Égypte.
Khâsekhemoui – Musée égyptien du Caire
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Autre pot avec couvercle en or
trouvé dans la tombe de Khâsekhemoui – British Museum
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Sur la base des deux statues assises de Khâsekhemoui, on nous dit que
47.209 habitants du Nord furent tués, ce qui est un nombre très important compte
tenu de la population relativement faible de l’Égypte au cours de la première période dynastique. Ce qui est sûr,
c’est qu’en triomphant, il met fin aux dissensions du pays et unifie définitivement l’État. Cette stabilité politique va
constituer la base sur laquelle va grandir
l’Ancien Empire (2647-2150).
La reprise des expéditions contre les Libyens et les Nubiens confirme le retour de l’unité nationale. Sur la
Pierre de Palerme est conservée,
au moins dans la colonne 4, l’histoire des sept dernières années de règne du Roi.
Il semble qu’en l’an 18 de son règne, la ville de Memphis refusa de
rendre hommage au Roi. Celui-ci mata la révolte et selon
Nicolas Grimal, pour sceller sa victoire, il épousa une Princesse du Nord issue de la ville,
Nimaâthâpy I (ou Nimaâtapis ou Nimaâthep).
De Nekhen, où les assises des statues du Roi
furent trouvées, proviennent plusieurs fragments de bas-relief où l’on voit le Roi participer à une
fête Sed, ce qui est
étrange car cette fête était en l’honneur de trente ans de règne.
Après la réunification du pays, Khâsekhemoui transfère sa
capitale à Nekhen.
À partir de ce moment il a, semble t-il, entreprit des projets de construction considérable, notamment à
El Kab,
Nekhen et
Abydos.
Les archéologues ont mis au jour à
Nekhen une impressionnante "enceinte"
en briques crues, d’une épaisseur de mur de 5 à 20 mètres et d’une hauteur conservée de douze mètres, appelée improprement
"le fort" et maintenant connue sous le nom Shunet Zebib ez. Sa construction par Khâsekhemoui est confirmée
par un des piliers de granit gravés dans les points d’entrée.
Cette structure, de 123 m x 64 m, est érigée (peut-être donc dans l’idée d’un fort ?) sur un plan
similaire à celle d’Abydos, mais il n’y a aucune
trace apparente de fonction militaire. Son utilisation réelle reste donc inconnue. Certains
spécialistes pensent qu’elle était peut-être liée aux rituels de la royauté et au culte.
Vaisselle
en bronze trouvée dans la tombe de Khâsekhemoui – British Museum
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Sa sépulture
Khâsekhemoui est enterré à
Oumm el-Qaab à
Abydos, Sa
tombe (V) est monumentale. Elle est la plus vaste du site et la plus compliquée. Elle fut la
dernière à y être construite. Elle est de forme rectangulaire et de très
grandes dimensions, elle fait 68,97 m x 12,20 m. Elle était entourée par une enceinte
de 123 m × 64 m, avec des murs de 5,35 m d’épaisseur. Près de l’angle Est se trouvait un petit
bâtiment de 18,30 m × 15,50 m de haut. Cette disposition est
peut-être ce qui donnera l’idée de son complexe funéraire à son fils
Djoser (2628-2609,
IIIe Dynastie).
La tombe est formée d’un long couloir flanqué de 58 chambres en briques d’accès restreint destinées à recevoir entre
autres les offrandes funéraires, et de la chambre funéraires. Celle-ci, est située
dans le centre de la tombe à près de 2 m de profondeur. Ses dimensions sont de 5,30 m x 3,30 m.
Elle est parée de blocs de calcaire et est considérée comme la plus ancienne structure de maçonnerie au monde.
La tombe est fouillée par Sir
William Matthew Flinders Petrie, en 1901, puis par Emile Amélineau.
Elle contenait un sceptre en sardoine bagué d’or, des vases de pierre et des
vases en céramique remplis de grains et de fruits. Il y avait aussi de petits
objets laqués, des perles de cornaline, des outils en silex et en cuivre, de la vannerie et une grande
quantité de sceaux.
La tombe de Khâsekhemoui avait également un nombre relativement important
de mobilier funéraire qui avait échappé aux pilleurs de tombe, y compris des
vases (ou pots) en brèche (ou breccia, roche composée d’au moins 50% d’éléments
anguleux prit dans un ciment naturel) et en grès, dont les bords furent enduits
avec de l’or. L’archéologie a démontré que l’utilisation de l’or en tant que
décoration pour des objets d’une tombe se fit pour la première fois sous
Khâsekhemoui. Il faut aussi souligner de la vaisselle en bronze et cuivre,
particulièrement remarquables qui est restée, malgré le temps, pour la plupart
des éléments, étonnamment bien conservée. Tous ces objets sont la preuve du démarrage
précoce de l’époque du bronze Égyptien.
Sa famille
Khâsekhemoui n’a qu’une épouse attestée :
• Nimaâthâpy I (ou Nimaâthepou ou
Nymaathap ou Nimaâtapis ou Nimaethap ou Ni-Maat-Hapi ou Nimaat-Hap – N.j mAat Hp –
"Elle appartient à Maât et à Hâpy"). Selon Roth Silke elle fut une Princesse du Nord. Selon
Nicolas Grimal
elle épouse le Roi en l’an 18 de son règne lorsque celui-ci mate une révolte
dans la cité. Ses titres étaient :
Mère des enfants du Roi (mwt-mswt-nswt) ;
Mère du Roi de Haute et Basse-Égypte (mwt-nswt-biti) ;
Mère du Roi (mwt-nswt) ;
Servante d’Horus (kht-@r).
Nimaâthâpy I fut citée dans beaucoup de documents de
l’époque et elle fit l’objet d’un culte posthume au début de la
IVe dynastie,
sans doute du fait de l’importance qu’elle eût dans l’histoire puisqu’elle fut
le personnage essentiel du passage entre la
IIe et la
IIIe Dynastie. Son nom fait référence
à l’Apis de
Memphis.
Elle donne trois ou quatre enfants à Khâsekhemoui :
Un ou deux fils :
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Sanakht/Nebka qui sera Roi (2647-2628,
IIIe Dynastie), les sources sont incertaines.
La majorité des égyptologues, comme
Jean-Philippe Lauer,
pensait que Sanakht était le fils aîné du Roi Khâsekhemoui
et de la Reine
Nimaâthâpy I,
donc le frère aîné de Djoser.
Toutefois, aujourd’hui, cette idée est fortement remise en cause en fonction
de l’étude d’empreintes de sceaux trouvés, à la fin des années 90, dans la tombe de Khâsekhemoui.
Ceux-ci nous apprennent que c’est Netjerikhet
(Nom d’Horus
de Djoser) qui
enterra la Reine
Nimaâthâpy I,
ce qui fait penser aux spécialistes, comme Alexander Hermann et
Hans Wolfgang Helck
que Sanakht/Nebka
sont en fait deux Rois différents et Nebka serait le beau-frère de
Djoser, époux de sa sœur Inetkaes.
▪
Djoser qui sera Roi (2628-2609,
IIIe Dynastie) qui épouse sa sœur
Hetephernebty I (ou Hotephirnebty).
Il est probable que Khâsekhemoui avait encore plus de fils, mais les égyptologues sont en
désaccord sur leur identité.
Deux filles, selon
Hans Wolfgang Helck.
▪
Hetephernebty I (ou Hotephirnebty)
qui épousera son frère
Djoser (2628-2609,
IIIe Dynastie).
▪ Inetkaes (ou Ini-net-ka-es – Jnj n.t k3=s –
"Le ka apporte") qui épousera le Roi
Sanakht/Nebka (2647-2628,
IIIe Dynastie), qui est peut-être son frère
(Sources très incertaines).
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