Présentation
La bataille Delta du Nil fut une
importante bataille navale entre
l’Égypte et les
Peuples de la mer,
qui se déroula vers 1175 (ou 1178 pour certains spécialistes) lorsque le Pharaon
Ramsès III (1184-1153)
repoussa une invasion majeure par la mer. Le conflit eut lieu quelque part sur les rives Est du Delta du Nil et en partie sur les frontières de l’Empire
Égyptien en Syrie, bien que la localisation précise soit inconnue.
Ce deuxième conflit majeur du Pharaon est enregistré sur les murs de son temple
funéraire
à
Médinet Habou.
Inscription décrivant la victoire de Ramsès III sur
les Peuples de la mer dans son temple funéraire à Médinet-Habou
Photo avant retouches :
wikipedia.de
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Le contexte
Au cours du XIIe siècle, les
Peuples de la
mer,
également connus sous plusieurs autres noms, tels que les Lukka (ou Luka ou
Loukou ou Lyciens), les
Peleset (ou Pelischti ou Péléset, en Égyptien :
Prst, en
Hébreu :
פְּלִשְׁתִּים Pelištīm), les
Shardanes (ou Sardanes ou Sherden ou Chardanes , en Égyptien :
^rdn.w), les Thekker (ou Tjeker ou Tjekar ou Tjekker ou Tyekker
en Égyptien :
Tkr ou T-k3-r)
etc …, envahirent le Moyen-Orient et l’Est de la Méditerranée.
Ils détruisirent et pillèrent Hattousa, la capitale de l’Empire
Hittite, et attaquèrent également
la Syrie et la Palestine, où de nombreuses villes furent brûlées et ruinées.
Karkemish fut une des rares
villes qui survécurent aux attaques de ces Peuples.
Chypre fut également submergée et sa capitale saccagée.
Leur mouvement atteignit sans problème les plaines de l’Amourrou, au
Nord des régions
Phéniciennes. Voyageant par bateaux ou par terre, hommes, femmes et enfants des tribus se déplaçaient avec tous leurs biens,
transportés dans de lourds chariots. Après un long périple en provenance du Nord, ils s’approchèrent dangereusement de la ligne de défense organisée
par le Pharaon, à la hauteur de ses frontières
Phéniciennes
Des inscriptions à
Médinet Habou dépeignent des femmes et des enfants chargés dans des
chars à bœufs, les agresseurs sont soupçonnés être des migrants à la recherche d’un endroit pour s’installer.
Leurs attaques sont signalées, par exemple, dans les lettres d’Hammourabi III (1191-1182), le dernier Roi
d’Ougarit.
Il écrivit une lettre (RS 18,17) en réponse à un plaidoyer en faveur d’une aide du Roi de
Chypre (ou Alasia ou Alašija) qui a été préservée. C’est de cette
époque que datent la plupart des sources épigraphiques retrouvées sur le site de Ras-Shamra. Hammourabi III dans son
courrier met en lumière la situation désespérée d’Ougarit
face aux attaques des Peuples de la mer :
"Mon
père, voici les ennemis qui nous ont été expédiés, mes villes (?) ont été brûlées et ils ont fait des mauvaises choses dans mon pays. Est-ce que mon père
sait que toutes mes troupes et mes chars (?) sont dans le pays de Hatti
et tous mes navires sont dans le pays de Lukka … Ainsi, mon pays est abandonné à lui-même. Mon père vous le savez, les sept navires de l’ennemi qui
sont venu ici nous ont infligés beaucoup de dommages…".
Selon les textes
Égyptiens, la destruction du
Hatti serait due aux
Peuples de la mer, qui ravagèrent toute la région,
mais il est peu probable que ceux-ci se soient avancés aussi loin à l’intérieur des terres. Il est plus vraisemblablement que
ce sont d’autres tribus ennemies qui ont profité de l’affaiblissement de l’Empire pour abattre définitivement les
Hittites et leurs vassaux.
Les invasions des Peuples de la mer sont souvent citées
parmi les causes ou les symptômes de l’effondrement de l’âge du bronze.
Ramsès III avaient déjà eu à combattre les
Peuples de la mer dans le Sud de
l’Amourrou,
à la bataille de Djahy.
Il décrivit un grand mouvement des peuples à l’Est de la Méditerranée, qui causa une destruction massive des anciens grandes puissances du Levant, de
Chypre et
de l’Anatolie,
ce que les inscriptions de son temple funéraire à
Médinet Habou établissent clairement :
“Les pays étrangers (les peuples de la mer) ont créé une conspiration… Aucune terre ne pouvait résister devant eux : le Hatti, Qode,
Karkemish, Arzawa et Alashiya ont été détruites à un moment donné. Ils ont anéanti le peuple d’Amourrou, sa terre a été dévastée comme
si elle n’avait jamais vu le jour. Ils arrivaient vers l’Égypte, alors qu’un camp se préparait contre eux ; leur confédération réunissait
les Peleset, les Thekker, les Shekelesh, les Denyen et les Weshesh. Ils avaient le cœur confiant, leur plan réussirait”
(Inscriptions de Médinet Habou de l’an 8 de Ramsès III, lignes 16-17)
Fresque représentant la bataille – Temple funéraire
de Ramsès III – Médinet Habou
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Le déroulement
Après avoir vaincu les
Peuples de la mer sur un terrain en Syrie
à la bataille de Djahy,
Ramsès III se précipita vers
l’Égypte où les préparatifs pour contrer un nouvel assaut
des envahisseurs était en cours d’achèvement.
Pour le Pharaon, l’heure était critique, d’autant plus qu’il fallait arrêter le mouvement des étrangers à la fois sur terre et sur mer.
Il mobilisa toutes les forces disponibles. Selon les inscriptions de
Médinet Habou, Ramsès III
regardait la mer et voyait une force de milliers d’ennemis, et peut-être
envisagea-t-il la fin de l’Empire Égyptien.
Si nous ne connaissons pratiquement rien de la victoire terrestre du Pharaon, nous en savons davantage sur la tactique
utilisée pour sa “bataille navale”.
En fait, il pouvait compter sur une donnée technique précise : Les navires des
Peuples de la mer n’utilisaient que la voile pour se déplacer.
Leur invasion par le Delta, empruntant l’un des bras du Nil, s’avérait donc une opération à haut risque puisque leurs navires étaient peu manœuvrables,
surtout que ceux des Égyptiens
étaient en mesure de se déplacer à volonté, grâce à leur équipe de rameurs.
Le Pharaon aligna sur les rives du Delta du Nil des rangées d’archers qui étaient prêts à libérer des volées de flèches sur les navires ennemis
s’ils tentaient de toucher terre. Sachant qu’il serait battu dans une bataille en pleine mer,
Ramsès III surprit les
Peuples de la mer sur leurs navires dans la bouche du Nil,
où il avait assemblé une flotte en embuscade. Certains spécialistes pensent que le gros de la bataille
eut lieu quelque part au Nord de la capitale
Pi-Ramsès, sur le bras pélusiaque du Nil.
Si l’on suit les détails gravés sur les murs du temple de
Médinet Habou, il est clair que les combats furent très acharnés.
Cette flotte Égyptienne, à partir du pont de leurs
navires, harcela les bateaux ennemis qui, comme dit plus haut, avaient du mal à manœuvrer.
Les navires furent repoussés vers les rives où les attendaient des archers qui firent pleuvoir sur eux des volées de flèches.
Puis les soldats Égyptiens, à la fois sur terre et sur les navires,
utilisant leur épée, leurs javelots et leurs arcs, décimèrent l’envahisseur.
Beaucoup de bateaux des Peuples de la mer
furent coulés et leurs équipages noyés. Enfin, d’autres furent capturés et certains traînés vers le rivage où ils furent massacrés.
Dans les inscriptions, Ramsès III proclama sa victoire.
La bataille du Delta sauva l’Égypte de la destruction qui frappa
le Hatti et d’autres grandes puissances du Proche-Orient.
Il n’y a aucune documentation qui fait mention d’une poursuite du conflit par les
Peuples de la mer une fois vaincus.
Bien que défait dans le Delta, certains de ces Peuples (En particulier les Peleset) sont soupçonnés
s’être installés en
Palestine quelque temps après la mort de
Ramsès III.
Bibliographie
Pour d’autres détails sur les
batailles voir les ouvrage de :
Friedrich Abitz :
– Ramses III. in den Gräbern seiner Söhne, Orbis Biblicus et Orientalis 72, Universitätsverlag, Freiburg, 1986.
James Henry Breasted :
– Ancient records of Egypt : Historical documents from the earliest times to the Persian conquest, Vol.1,
The first to the seventeenth dynasties, C. Scribner’s Sons 1905 – The University of Chicago press, Chicago, 1906, 1907 et (posthume) 1962 – Simon
Publications, Décembre 1937 – University of Illinois Press, Mai 2001.
Eric H.Cline et
David O’Connor :
– Ramesses III : The life and times of Egypt’s last hero, University of Michigan Press, Ann Arbor, 2012.
Barbara Cifola :
– Ramses III and the Sea Peoples : A structural analysis of the Medinet Habu inscriptions, pp : 275-306, Orientalia, 1988.
Robert Drews :
– The end of the Bronze Age: Changes in warfare and the catastrophe ca. 1200 BC, Princeton University Press, 1995.
Kenneth Anderson Kitchen :
– Ramesside Inscriptions, Historical and Biographical V, Blackwell, Oxford, 1983.
Jesse Russell et Ronald Cohn :
– Battle of Djahy Paperback, Book on Demand, London, Janvier 2012.
Nancy K.Sandars :
– The Sea Peoples warriors of the ancient Mediterranean, London, 1978 et Thames & Hudson, Revised edition, Novembre 1985 – En Espagnol,
Los pueblos del mar, Oberón, Madrid, 2005.
Werner Widmer :
– Zur Darstellung der Seevölker am großen tempel von Medinet Habu, pp : 67–77,
ZÄS 102, Berlin, 1975.
Michael Wood :
– In search of the Trojan war, Facts on File, New York, 1985.
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