Fonctions et origine
Sokaris (en
Grec, en Égyptien : Seker[y]) est un Dieu adoré à
Memphis on
pense dès la fin de la
Période Prédynastique (v.3500-v.3150),
il fut le protecteur de la nécropole de la cité. Certains spécialistes pensent que
Saqqarah lui doit peut-être son nom.
Il fut à l’origine adoré en tant que Dieu de la terre et de la fertilité, puis comme un Dieu funéraire,
de l’obscurité des Enfers, patron des forgerons. Son nom peut également être décomposé en “Celui qui est adoré“,
c’est pourquoi Sokaris est progressivement devenu aussi le Dieu des joailliers et des armuriers. Bien que nous ne soyons que très
peu renseignés sur ses origines, celles-ci paraissent très anciennes. Il fut une divinité quelque peu isolé des autres.
Sans doute parce que la croyance Égyptienne le circonscrit aux nécropoles.
C’est lui qui montre en effet les
voies caverneuses menant à l’éternité. Il est le “maître de l’entrée de l’Amdouat“. Le développement de son culte fut
freiné du fait de sa proximité avec Osiris. Le clergé de ce dernier
étant plus important. Le culte voué à Osiris aura finalement raison
de celui porté à Sokaris et son histoire sera perdue dans la nuit des temps, effacée par l’épopée d’Osirienne. L’absorption de
Sokaris par Osiris, mais aussi son assimilation au Dieu
Memphite
Ptah, donna naissance au Dieu Ptah-Sokar-Osiris dont il est souvent fait
mention au Nouvel Empire (1549-1080) et qui fut souvent
représenté.
Ses représentations et symboles
Sokaris est Dieu dont l’image s’est considérablement modifiée au fil de l’histoire.
Certains de ses traits démontrent les liens qu’il entretint avec d’autres divinités, en particulier
Osiris. Comme ce dernier, Sokaris fut figuré, debout ou assis, sous l’aspect
d’un homme au corps momifié. Il est alors coiffé de la
couronne Atef reposant sur deux cornes de bélier, du disque solaire et de
l’uraeus. Á une certaine époque, on le rapprocha de
la lune et son image, sur les parois de sarcophages, était alors rehaussée d’argent et non d’or comme les autres Dieux. Il est
aussi apparu avec une tête de faucon momifié, ou en homme à tête de faucon. Lorsqu’il s’incarnait ainsi on le retrouvait souvent
dressé à la proue d’une barque divine, nommée "Hémou", ornée d’une tête d’oryx, sorte d’antilope qui lui est
personnellement dédiée, dont la signification n’a pas été découverte, allusion à la cérémonie donnée en son honneur à
Memphis. Sokaris utilisait alors cette barque pour emmener les
morts vers les territoires de l’éternité. Il eut une image propre aux Dieux funéraires. Une image qui le rapproche également de
Ptah avec lequel il sera assimilé sous le nom de Ptah-Sokar.
Il tient la crosse Héka (ou Heka ou Heqa –
@kA) et le flabellum
Nekhekh
(nxx ou nx3x3), deux
attributs également communs à Osiris et au Roi ou Pharaon.
Enfin dans la période tardive il put avoir l’apparence d’un taureau ou d’une momie avec une tête humaine et parfois d’un faucon,
portant deux plumes.
Ses symboles étaient :
▪ Ses attributs divins : Il porte la barbe postiche et tient les deux
sceptres royaux que sont la crosse
Héka (ou Heka ou Heqa – @kA) et le
Nekhekh
(nxx ou nx3x3).
▪ Animaux, couleur et élément : Ses animaux furent le faucon et l’oryx, qui lui
fut souvent sacrifié. Ce dernier ne semble pas avoir été sacré, il ornait sa barque processionnelle. Son
élément était la terre
et ses couleurs, le rouge et le noir.
▪ Les fêtes en son honneur : La plus importante se déroulait tous les six ans,
le vingt-sixième jour du mois de koiak (ou Khoiak) dans la
saison Akhet. Une autre fête se déroulait le même mois avec renouvellement de son image funéraire. Le
Dieu bénéficiait aussi
des fêtes données en l’honneur de
Ptah et d’Osiris.
Thoutmosis III en offrande à Sokaris – Basse chapelle d’Anubis
– Temple de Louxor |
Ses lieux de cultes principaux
Les lieux de cultes de Sokaris étaient
dans toute l’Égypte, mais particulièrement à
Memphis. En tant que patron des nécropoles, il fut vénéré
dans tous les sites funéraires, qu’ils furent royaux ou populaires.
Sokaris était aussi présent dans les grands temples d’Amon, celui de Karnak en particulier. La place où il fut le plus à
l’honneur fut dans les temples funéraires de la rive occidentale du Nil comme ceux de :
Deir el-Bahari,
Deir el-Médineh,
Médinet Habou, etc… Son culte fut également attesté
dans d’autres grands sanctuaires où il partageait les honneurs avec les plus grands Dieux comme à :
Dendérah,
Edfou,
Philae, etc…
Le culte de Sokaris
Discret dans la mythologie, Sokaris est d’avantage perceptible dans le culte qui lui
fut rendu. En dépit de la concurrence d’Osiris,
il conserva une grande place dans les fêtes qui animaient le pays. Quoique plus discret, son rôle au sein des nécropoles lui valut
aussi une reconnaissance inconditionnelle de la part du peuple. Il fut un Dieu adoré à
Memphis depuis la
fin de la
Période Prédynastique
(v.3500-v.3150), il fut le protecteur de la nécropole de la cité. Son culte le présente comme veillant à
l’entrée du monde souterrain, appelé Rosétaou, ce qui signifie “la porte des grottes“.
Au début, il partagea avec Ptah le titre de patron des ouvriers
et des artisans. Un texte précise même que la protection de Ptah s’étendait
aux travailleurs du bois et de la pierre, celle de Sokaris aux fondeurs de métaux. Puis, Sokaris fut appelé aux côtés de
Ptah à présider la grande cérémonie d’ouverture de la bouche du défunt,
dont le but était de préserver les principales fonctions dans la perspective de la survie. Cette promotion lui valut le titre
de “Dieu des morts“, qu’il partagea avec Osiris et
Ptah, triade regroupant les fonctions primordiales des divinités : Création,
métamorphose et résurrection.
Les
Textes des Pyramides accordent à Sokar un rôle essentiel dans les transformations du défunt
placé au seuil du royaume des ténèbres. Dans le Livre de l’Amdouat, la caverne de Sokaris s’ouvre à la cinquième heure. On
fabriquait des figurines de Sokaris en terre glaise pour célébrer la fin de l’inondation et il fut associé aux rites de la
résurrection d’Osiris. Au
Nouvel Empire (1549-1080), l’influence de Sokaris
faiblit devant l’éclat croissant d’Osiris et de
Ptah, mais il garda ses fonctions de gardien des premiers moments de la
survie. Malgré la relative discrétion de Sokaris dans la mythologie Égyptienne,
il sut se faire une place parmi les plus grands. Les Litanies d’offrandes à Sokaris en tous ses noms inscrites aux murs
des temples d’Abydos et de
Médinet-Habou, ont conservé pas moins d’une quarantaine
de noms de sanctuaires dédiés à ce Dieu. Memphis y figure
bien sûr en bonne place, où on y honorait la divinité elle même, mais également sa barque Henou.
La fête “de la sortie de Sokaris“, principale fête organisée en son honneur, se déroulait tous les six ans,
le vingt-sixième jour du mois de koiak (ou Khoiak) dans la
saison Akhet, au moment où l’inondation se retire des terres. Avec pour cadre la cité de
Memphis, cette fête était célébrée au bénéfice des défunts.
La statue de Sokaris, placée dans sa barque Henou était promenée sur un traîneau, le
Mefekh, autour des remparts de la ville. Dans la procession figurait un âne, substitut magique du Dieu
Seth. À ce titre, le pauvre animal était roué de coups avant d’être mis à mort
par le Roi ou le Pharaon lui-même. La victoire du bien organisé sur le mal chaotique prenait ici un aspect douloureusement théâtral.
Le 22 du mois, on procédait au "rite d’ouvrir la terre" préparateur des semailles nourricières.
Quant au 25,
avait lieu une grande fête de liesse populaire, la “fête Netjeryt” pour laquelle il était d’usage de porter autour du cou
des colliers d’oignons. Par la suite, une dévotion était rendue non pas seulement à Sokaris, mais à sa barque et à son traîneau
eux-mêmes divinisés. Certains actes rituels nécessitaient l’absolue présence de Sokaris. C’était le cas pour la consécration des
temples. On plaçait souvent une statue de Sokaris dans les tombes, sur laquelle figurait le
Livre des morts.
Les Grecs de la
Basse Époque (656-332) mentionnaient
Sokaris comme étant une forme d’Osiris.
Légendes et mythes
Les légendes sur Sokaris le
rapprochent du maître du royaume des morts, en tant que Dieu des nécropoles, mais, à la différence de ce dernier, il ne
fut associé à aucun des grands cycles mythiques. Sokaris vécut semble-t-il un peu en retrait des grands faits de la mythologie.
Pourtant, en tant que Dieu des artisans, titre qu’il partagea avec
Ptah, patron des forgerons et Dieu funéraire, il fut une divinité qui, à
défaut d’avoir été incontournable, compta beaucoup dans le pays. Son assimilation à
Ptah, en tant que Ptah-Sokar démontre son importance, mais explique aussi,
sans doute, que Sokaris passa au second plan. On ne lui connaît pas de famille. Dans un premiers temps tout du moins, puisque que
conformément à l’habitude, les Égyptiens et le clergé l’en dotèrent progressivement. À commencer par sa mère identifiée comme étant
la Déesse Nout. Puis une parèdre du nom de Sokaret lui fut attribuée. Mais
celle-ci demeure discrète. Plus tard, au Nouvel Empire
(1549-1080), Nephtys se tiendra à ses côtés comme compagne. Mais aucune
histoire relative à leur relation ne nous est contée par les textes ou les peintures. Sokaris fut néanmoins fort proche de
quelques-unes des plus grandes Déesses du panthéon. Parmi elles on trouve :
Bastet,
Hathor et
Sekhmet, réputées pour leur tempérament de feu.
Sokaris dans le temple d’Abydos |
Le principe de l’assimilation d’un Dieu par un autre est une constante de la religion
Égyptienne. Lorsqu’il y a assimilation, il y a juxtaposition des noms des Dieux concernés. Aucun ne disparaît au profit de l’autre.
Sokaris fit comme d’autres divinités l’objet de plusieurs assimilations dont la plus fameuse est celle l’associant au Dieu
Ptah sous le nom de Ptah-Sokar.
Ptah, Dieu de
Memphis, fut dans la ville une grande figure du Panthéon au point
qu’on le croyait créateur du monde à l’instar de Rê. Puis, cette divinité fut
assimilée à Osiris. Aussi parle-t-on très souvent dans les textes de
Ptah-Sokar-Osiris. Tous trois, il est vrai, régnèrent sur les profondeurs du monde. Les noms attachés à Sokaris en témoignent.
“Je suis le maître des cavernes“, disait Sokaris. Des cavernes infernales situées aux confins du désert. Là, il travaillait
le métal, comme le fit plus tard Héphaïstos pour les
Grecs, ou Vulcain pour les Romains. “Je suis le maître de l’entrée de l’Amdouat“, car les cavernes de Sokaris étaient
un accès au monde d’en dessous, le royaume des morts. Sokaris n’y régnait pas comme le fit
Osiris, mais il en connaissait l’accès et le protégeait.
De ce fait il fut très présent à Memphis dont
il gardait la nécropole. Protecteur, il le fut aussi du Roi ou du Pharaon défunt. Ainsi, lorsque celui-ci décédait, Sokaris
opérait les rituels de purification et, avec Ptah, d’ouverture de la bouche,
rites indispensables pour la survie dans l’au-delà. Cette cérémonie, destinée à transmettre au défunt les facultés d’accéder à la
vie éternelle, était pratiquée sur la momie au moment des
funérailles. La vie dans l’au-delà étant en tout point semblable à la vie terrestre, il fallait que le mort, puisse de nouveau
accéder à la nourriture. C’était une priorité pour les Égyptiens puisque l’ouverture de la bouche redonnait aux organes l’énergie
nécessaire à leur fonctionnement. Dans le cas du souverain, c’était Sokaris, accompagné de
Ptah, qui au travers des gestes du Prêtre effectuaient cette opération.
Enfin, Sokaris se dressa sur la barque Henou qui emmenait le Roi ou le Pharaon vers sa nouvelle destinée. Gardien,
protecteur et accompagnateur, tels sont les mots qui résument au mieux les missions de ce Dieu particulièrement discret.
Bibliographie
Pour d’autres détails sur le Dieu voir les ouvrages de :
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– The mysteries of ancient Egypt : An illustrated reference to the myths,
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Pascal Vernus et Erich Lessing :
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– The complete gods and goddesses of ancient egypt, Thames and Hudson, New York, Mars 2003 et Septembre 2005 –
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Die welt der götter im alten Ägypten : Glaube, macht, mythologie, Theiss, cop. Stuttgart, Septembre 2003 – En Français,
Dictionnaire illustré des Dieux et Déesses de l’Égypte ancienne, Gollion, Infolio, Novembre 2006.
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