Localisation et généralités
Lagash
(en Akkadien : Lagaš, en
Sumérien : Sirpurla) fut une des principales villes du
Sumer, que l’on situe aujourd’hui sur le site de
Tell Al-Hiba (ou Tell El-Hiba). La ville se situait au Nord-ouest de la jonction des fleuves Tigre et Euphrate
et à l’Est d’Ourouk.
Elle est aujourd’hui située dans le lit à sec d’un ancien canal de 5 km à l’Est du Chatt-el-Haj et à
environ 20 km au Nord de Shatra dans un quartier de Nasiriyah (capitale du Gouvernorat de Dhi Qar). On a longtemps cru que Lagash se
trouvait sur le site de Tellô. Il est aujourd’hui certifié que ce dernier est celui de la cité de
Girsou (ou Girsu), ville sainte du royaume de Lagash.
Ce que nous connaissons de l’histoire de Lagash vient justement des découvertes exhumées à
Girsou, qui
nous a livré de nombreuses inscriptions royales,
tablettes d’argiles inscrites et une quantité importante d’objets d’art.
Lagash fut gouvernée par des Princes locaux les
"Patésis" (Grand Prêtre) ou par des "Ensi" (Prince), qui prirent le titre de Roi
"Lougal". Mais il faut souligner que leur dynastie n’est pas mentionnée dans la “Liste Royale
Sumérienne“, ce qui laisse à penser aux spécialistes que Lagash,
malgré son indépendance et son importance, n’occupa peut-être jamais une situation prédominante sur les cités
de la région. Au le IIIe millénaire, le territoire de la ville était traversé
par une branche de l’Euphrate qui allait se jeter dans le Golfe Persique, ce qui constituait la limite Sud du royaume.
Le long du cours du fleuve se trouvaient les trois cités principales du royaume,
Lagash est pratiquement au centre, au Nord il y avait Girsou
et enfin au Sud se trouvait la ville de Nigin (ou Zurghul).
Relief votif perforé d’Our-Nanshe, le
représentant avec sa famille participant à la restauration du temple de Ningirsu –
Musée du Louvre |
L’histoire…….
D’après les inscriptions
trouvées à Tellô (ou Girsou), il semble que Lagash était
une ville avec une grande influence sur les autres cités Mésopotamiennes
au cours de la période Sumérienne, autour du IVe millénaire. Cette
période fut caractérisée par des Rois indépendants qui suivirent
les deux premiers Rois attestés de Lagash, qui étaient des Rois de Kish :
Étana le Pasteur (ou le Berger,
v.2800 ou v.2750) et plus tard, En-Men-Barage-Si (ou
Enmen-Baragesi ou Emmembaragesi ou En-Barrage-Si, 2631 à 2601 ou v.2615 à v.2585).
Puis l’on trouve le premier Roi (ou Prince) indigène, En-Hagal (ou Enheĝal ou Enhengal ou Enkhegal,
v.2570 à 2530 ou v.2550) qui fut vice-Roi pour le Roi de Kish,
Mesalim (ou Me-Salim ou Meslim, v.2550-v.2530).
Son successeur, Lougal-Shagengur (ou Lugal-Saengur ou Lugal-Scha-Gen-Sur ou Lugal-Suggur, v.2530 à v.2490
ou
v.2520 ou v.2510), qui fut aussi Grand Prêtre (ou Patesi). Il est connu par une inscription du Roi
Mesalim, qui le cite comme Ensi de Lagash.
Suivit sur le trône Our-Nanshe (ou Ur-Nanshe ou
Urnansche ou Ur-Nina, v.2520 ou 2494 à 2465 ou v.2490 à v.2465 ou v.2480) qui est considéré
par beaucoup de spécialistes comme le fondateur de la dynastie de Lagash. Il fut le fils d’un dénommé Gounidou (ou Gunidu), donc
probablement pas de ligné royale. On a retrouvé plusieurs inscriptions qui mentionnent ce Roi, environ cinquante sur des tablettes d’argile,
des assiettes, des briques, des clous etc… Certaines le présentent comme un grand
bâtisseur, des temples : de Nanshe ; de Gadum-Dug (Déesse protectrice de Lagash) ; l’Ibgal (ou Ib.Gal ou (É.)IB.GAL), dédié à la
Déesse Inanna ; l’Aedin (ou A-Edin) ; le sanctuaire Apsû-Gal (le grand Abzu) ; le Ningar (ou Nin-Gar); le temple de
Girsou dédié à Ningirsu ; mais aussi des remparts à
Lagash, des excavations de canaux et de la construction de statues.
Sous son règne, la ville occupa semble t-il une situation
prépondérante sur les autres cités du
Sumer. Le commerce prit aussi de l’expansion en
particulier avec Dilmun (aujourd’hui le Bahreïn). Lagash, cependant, entra vite en conflit avec la ville
d’Oumma, sa grande rivale, avec qui elle se disputa la région
frontière de la Gu-Edinna et avec les derniers Rois de la première dynastie
d’Ur à qui elle prit beaucoup de leur territoire. Le
fils d’Our-Nanshe, Akurgal (ou Aja-kurgal ou Ajakurgal, v.2490 ou v.2465 à v.2455
ou v.2450) lui succéda,
puis les deux fils de celui-ci accédèrent au pouvoir.
Vase en argent sur cuivre
au nom de E-Anna-Tum – Musée du Louvre |
E-Anna-Tum
(ou Eannatum ou Eanatoum ou E-anna-tum, v.2470 ou v.2455 à v.2425 ou v.2445), dont le nom veut dire "Digne de
l’E-Anna" (La maison du Ciel), fut l’aîné. Il monta sur le trône de Lagash au moment ou les troupes
Élamites du Roi Hadanish de Hamazi (ou
Khamazi)
écrasèrent l’armée d’Ur, mettant fin à la domination de la cité. Il semble
qu’il dut dans un premier temps repousser ces envahisseurs. Il mena une politique expansionniste et affronta plusieurs coalitions
comprenant l’Élam,
Kish,
Ourouk et Ur. Il battit l’armée du Roi En-A-Kale (ou Enakalé,
v.2400-v.2370) d’Oumma, et s’empara de la ville.
Ils semblent que la dispute, qui provoqua le conflit entre les deux cités, portait sur l’approvisionnement en eau.
Oumma était située plus en amont sur le Tigre et était
en mesure de drainer à travers des canaux de grandes quantités d’eau sur ses propres terres ce qui entraînait une baisse
des revenus à Lagash.
E-Anna-Tum signa finalement un traité de paix avec En-A-Kale, à la suite duquel pour commémorer sa victoire
il fit creuser à la frontière des deux États un canal de démarcation sur le bord duquel il fit ériger la stèle de
Mesalim de Kish
(qui eut fonction d’arbitre entre les deux parties), dite "Stèle
des Vautours". C’est l’un des premiers documents historiques connus. La stèle,
d’1,80 m. de hauteur x 1,30 m. de largeur, comporte deux faces gravées, représentant
l’armée de Lagash écrasant celle d’Oumma et la divinité
tutélaire de Lagash, Ningirsu (ou Ningirsou, Divinité agraire de la ville de
Girsou) soutenant E-Anna-Tum.
Quatre fragments sont aujourd’hui au musée du Louvre.
Puis E-Anna-Tum combattit de nouveau les
Élamites qui s’étaient introduit dans la région
et les chassa du Sumer.
Il prit plusieurs villes, dont Ur et
Ourouk,
Larsa. Au Nord, il prit
Kish dont il se proclama Lougal (Roi) et Akshak (ou Aksak ou Akashak,
Mésopotamie du Nord). E-Anna-Tum étendit aussi son influence au-delà des limites du
Sumer. Il conquit des parties de
l’Élam, y compris des villes sur le golfe Persique.
Il aurait attaqué le Subartu (ou Shubur ou Soubartou ou Subartum, Haut-Djézireh), dans la partie supérieure du Tigre et à la
limite de la Syrie exigé hommage de la ville de Mari sur
l’Euphrate.
Son règne correspond à l’apogée de la première dynastie de Lagash et le pays du
Sumer connut alors une grande prospérité.
De nombreux temples et palais furent construits, notamment dans Lagash. La ville de Nina, sans doute un précurseur de
Ninive, fut reconstruite, avec de nombreux canaux et des réservoirs.
Malheureusement lors d’une nouvelle confrontation contre les
Élamites, E-Anna-Tum perdit son titre de Roi de
Kish. Il mourut sans laisser de postérité, son frère
En-Anna-Tum I (ou E-ana-tum ou Ennatoum ou Inannatum, v.2440 ou v.2425 à v.2400) lui succéda. Celui-ci fut confronté
tout de suite au soulèvement du Roi d’Oumma, En-A-Kale
(Enakale, v.2400-v.2370), qui voulut reprendre les territoires perdus. Le conflit aboutit à la défaite de Lagash et
En-Anna-Tum I fut tué au cours d’une bataille.
Son fils, En-Teme-Na (ou Entemena ou En-Metena ou Enmetena,
v.2430 ou v.2400 à v.2375)
aussitôt monté sur le trône, voulut venger son père et reprit le combat. Il écrasa l’armée
d’Oumma qui avait tenté de transgresser la frontière
fixée précédemment et commémora son exploit dans une inscription gravée sur un cône d’argile, dit "Le cône
d’En-Teme-Na". Il vaincu aussi Bad-Tibira (ou Tubal, non encore localisée avec certitude, il pourrait s’agir de
Tell al-Madainet) et sans doute d’autres cités. Puis il remporta ensuite une victoire sur le
Roi d’Ourouk, Lougal-Kinise-Dudu (ou Lugal-kinishe-dudu, V.2400-v.2380)
avec lequel il signa un traité renforçant sa position politique dans le pays de
Sumer.
Il fut le dernier grand souverain de Lagash. Ses successeurs
ne furent pas capables de conserver leur position de force sur la région, s’en suivit une période d’instabilité
où les Prêtres prirent un grand pouvoir. Les souverains
d’Ourouk profitèrent de cette faiblesse et devinrent, au le milieu du
XXIVe siècle, la plus grande puissance de la région. Parmi les successeurs d’En-Teme-Na, dont on sait peu de chose si ce n’est
qu’ils perpétuèrent la tradition de construction de leurs ancêtres, arriva sur le trône En-Anna-Tum II (ou E-ana-tum ou
Ennatoum ou Inannatum, v.2390 ou 2374 à 2365), fils de En-Teme-Na. Certains spécialistes avancent qu’il serait mort avec sa
famille lors d’une attaque contre les Élamites.
Puis En-Entar-Zi (ou En-entar-zi ou Enentarzi ou En-entarzi ou Enitarzi ou Enentarzid,
v.2385 ou 2364
à 2359) arriva au pouvoir dans des conditions encore obscures. On ignore son lien de parenté avec les précédents souverains,
même si déjà il y en eut un car apparemment il occupait la fonction de Grand Prêtre sous leurs règnes. Son règne est connu
essentiellement par des tablettes économiques, qui ne disent rien des événements politiques à cette époque. Ce qui
est sûr c’est que son règne fut relativement court et son fils Lougal-Anda (ou Lougalanda ou Lugalanda ou Lugal-anda,
2384 à 2378 ou 2358 à 2352 ou v.2370) lui succéda. Il procéda à une réorganisation des domaines des temples, visibles dans
des tablettes économiques datées de son règne. Il fut marié à Baranamtarra, la fille d’un propriétaire terrien qui eut,
semble t-il, de bonnes relations d’affaires avec le souverain d’Adab.
Cependant, comme nous le précisent des documents de l’époque, Lougal-Anda fut décrit comme un Roi riche et corrompu.
Sous son règne le royaume fut en proie à l’anarchie, à la corruption et à l’injustice et l’on constate une période de grands
troubles sociaux dans la cité. Il aurait été renversé par son successeur.
Fragment d’une
inscription d’Our-Inimgina trouvée à Girsou – Musée du Louvre |
Our-Inimgina (ou Urukagina
ou Our-Uka-Gena ou Uruinimgina ou Our-Uinim-Gina ou Uru-inim-Gina, son nom à une lecture indéterminée,
v.2350 à v.2340 ou 2378 à 2371), un usurpateur profita du désordre et monta
sur le trône en renversant son prédécesseur. Certains spécialistes, dont Douglas R.Frayne, réfute cette théorie et prétendent
que si rien n’atteste qu’il fut le fils du précédent Roi, il ne fut pas forcément été un usurpateur. D’après eux, il semble
que le souverain précédent et son épouse furent encore en vie au début de son règne, ce qui pourrait indiquer une transmission
du pouvoir pacifique ? Le débat reste ouvert.
Our-Inimgina prétendit, dans des inscriptions sur des tablettes retrouvées à
Girsou, une série de six documents qui sont parfois cité
comme le premier exemple d’un code judiciaire, avoir rétablit le bon ordre dans son pays, en éliminant l’iniquité qui y régnait.
Une des tablettes la plus importante qui fut trouvée, est un édit de réformes. Dans ce texte, le souverain dit avoir
été choisi par le Dieu Ningirsu pour mettre fin à l’oppression des pauvres et décrit une série de réformes contre l’ancienne
bureaucratie et l’immense pouvoir qu’avait pris la caste sacerdotale. Ce texte est très important car il met en
lumière les problèmes sociaux de l’époque.
Our-Inimgina fut un grand Roi, comme nous l’apprend le texte, qui "guérit"
l’économie et établit un premier code juridique qui donna naissance à une sorte de programme social, qui entre autres, assurait
la protection et l’assistance aux veuves et aux orphelins.
Dans le texte il étala tous les abus qui existaient qu’il aurait réglés aussitôt
monté sur le trône. Il aurait révoqué des percepteurs d’impôts trop nombreux et
trop "gourmands" qui prélevaient une taxe sur n’importe quelle activité, même
les enterrements. Il aurait aussi amélioré la situation des pauvres qui étaient
opprimés par les riches et il aurait débarrassé la cité des criminels, des
voleurs et des usuriers.
Le règne d’Our-Inimgina, le dernier de la Ière dynastie
de Lagash, est celui pour lequel nous disposons de la plus grande quantité d’archives cunéiformes provenant du site de
Girsou (ou Girsu ou Tellô), capitale religieuse du royaume.
Sous son règne le conflit avec Oumma reprit et fut
marqué par une terrible défaite de ses armées devant celles
d’Oumma
et son nouveau Roi
Lougal-Zaggesi (ou Lugal-Zaggisi ou Lugal-Zagesi, v.2340-2316) qui détruisit tous les grands sanctuaires de Lagash
et qui établit sa domination sur le pays du Sumer. Un texte datant de
la victoire de Lougal-Zaggesi,
sur tablette d’argile, décrit la fin de Lagash :
“L’homme d’Oumma
a bouté le feu au talus-frontière, a bouté le feu à l’Anta-Sura et en a pillé l’argent et le lapis-lazuli. Il a tué dans le
palais du Tiras, il a tué dans l’Apsû Banda, il a tué dans la chapelle d’Enlil et dans la chapelle d’Utu".
Le texte poursuit par la liste de tous les pillages, incendies et
meurtres dont Lougal-Zaggesi fut responsable.
Dame à l’écharpe, peut-être une Prêtresse de l’époque
du règne de Goudéa – Musée du Louvre |
On ne connait
qu’une épouse à Our-Inimgina, Sasag (ou Shagshag).
Il fut semble t-il un grand bâtisseur, on n’a notamment retrouvé des traces de
commémoration pour la reconstruction de plusieurs temples, en particulier celui de Ningirsu (ou Ningirsou).
Les derniers règnes des Rois de la Ière dynastie de Lagash furent abondamment
documentés du point de vue des archives administratives retrouvées à Girsou.
Ces archives sont essentiellement celles des temples de Ningirsu et de sa parèdre Ba’u.
Lagash ne resta pas longtemps sous la domination du Roi Oumma,
Lougal-Zaggesi.
Son règne fut de courte durée et son Empire disparut rapidement avec lui, sous les coups de
Sargon le Grand
d’Akkad (2334-2279).
Lougal-Zaggesi fut capturé
et contraint d’assister au triomphe de son vainqueur à la porte du temple d’Enlil.
Ce qui mit fin provisoirement à la prépondérance des cités du
Sumer sur la Mésopotamie. Il semble que, pendant la période de domination
d’Akkad,
Lagash continua de survivre avec des Princes (Il en existe une liste) et que la ville fut la capitale d’une province dont les
limites devaient correspondre à l’ancien royaume. Deux de ces Princes ont laissé des traces, Lougal-Usum-Gal (ou
Lugalushumgal, v.2230 à v.2200).
Puis Puzur-Mama (ou Puzzur-Mama ou Puzer-Mama, v.2200) qui adopta le titre de
Lougal. Puzer-Mama ne montre aucun lien de parenté avec les futurs Rois de la dynastie. Il prit le contrôle de Lagash
pendant le règne du Roi d’Akkad,
Sar-Kali-Sarri (ou Sarkalisarri, 2218-2195), lorsque
celui-ci était entrain de régler des problèmes avec les Goutis.
Comme le précise Douglas R.Frayne, On a retrouvé une inscription royale de Puzur-Mama, dans
laquelle il reçoit les divers dons des Dieux : Le pouvoir par Ningirsu (ou Ningirsou),
l’intelligence par Enki et la position par Inanna.
Il faudra attendre encore plus de
cinquante ans pour voir la cité retrouver une certaine prépondérance à partir de son Prince
Goudéa. L’Empire
d’Akkad s’effondra en 2142, suite à une fragmentation interne et sans
doute aussi aux invasions, notamment celles des
Goutis, ce qui permit aux différentes cités-États
de reprendre une à une leur indépendance. La civilisation Sumérienne
connut alors une nouvelle renaissance, notamment grâce
aux villes de Larsa,
Isin et surtout Lagash qui dominera la région.
Dans ce contexte, la cité vit apparaitre une nouvelle dynastie qui n’en fut cependant pas d’une au sens propre du terme,
puisque les souverains qui se succédèrent ne furent pas toujours des membres de la même famille.
Elle comprit au moins une douzaine de Rois reprenant le titre d'”Ensi“. Sa durée est toutefois indéterminée, peut-être
un demi-siècle. La plupart des souverains de cette période ne sont attestés que par quelques inscriptions et restent donc
des personnages encore largement inconnus.
Le premier dont nous avons un peu plus de connaissances
fut Our-Bau (ou
Ur-Baba ou Our-Baba ou Our-Bawa ou Ur-Ba’u ou Ur-Bau ou Urbaba “Guerrier de la Déesse Bau“,
2157 à 2144 ou v.2155
à 2142 ou 2164 à 2144 ou 2093 à 2080), déjà parce que l’on sait que sa fille, En-Anne-Pada
(ou Enanepada ou Enanepeda ou En-anne-padda) fut Grande Prêtresse dans le temple du Dieu Lune Nanna à
Ur, ce qui implique que
Lagash devait dominer la région, qu’une deuxième de ses filles, Nin-Hedu (ou Nin-hedu) épousa Nammahani, le dernier Roi
de cette dynastie, mais surtout parce qu’une troisième, Nin-Alla (ou Nin-alla ou Ninalla) fut l’épouse de
Goudéa son successeur.
Statue de Goudéa dédiée au Dieu Ningishzida trouvée à Girsou – Musée du Louvre
|
Goudéa
(ou Gudea, 2144 à 2124 ou 2142 à 2122 ou 2141 à 2122 ou 2122 à 2102 ou 2080 à 2060) succéda à son beau-père Our-Bau en tant
qu’"Ensi" Prince/Gouverneur de Lagash, puis se proclama Roi ("lugal"). Celui-ci avait commencé à rendre
à sa Principauté sa puissance d’antan en dépit de la domination des Goutis.
Son origine est inconnue, dans inscriptions, il se décrit comme “Celui qui n’a pas de mère et qui n’a pas de père“.
Bien qu’il ait laissé un grand nombre d’inscriptions décrivant notamment la construction du temple de Ningirsu (ou Ningirsou),
le règne de Goudéa est surtout connu pour le faste particulier et le très fort développement que le Roi donna à
la ville.
Il aurait régné sur 216.000 sujets. Son indépendance et sa puissance sont soulignées par l’expédition militaire qu’il
entreprit contre Anshan et les
Élamites ou il triompha et offrit le butin au Dieu
Ningirsu. Le Roi engagea également de grandes réformes sociales, il annula les dettes et permit aux femmes de posséder des
terres familiales. Il fut divinisé après sa mort (Peut-être dès son vivant). En
religion, il rétablit les anciennes fondations pieuses et augmenta la plupart des offrandes rituelles.
Ce fut aussi un grand bâtisseur, il reconstruisit ou édifia une trentaine de temples et de
chapelles comme à Ur,
Nippur,
Ourouk,
Adab et Bad-Tibira (ou Tubal, non encore localisée avec certitude,
il pourrait s’agir de Tell al-Madainet). Sa plus grande réalisation fut la construction du temple de Ningirsu, à
Girsou (ou Girsu, ou Tellô aujourd’hui). Une légende raconte,
selon des inscriptions figurant sur des cylindres ou des statues de Goudéa, que ce fut à la suite de l’intervention du Dieu
Ningirsu, au cours d’un rêve, que Goudéa décida d’entreprendre cette magnifique construction, dont il ne subsiste aujourd’hui que
des ruines.
Énormément de matériaux furent nécessaires à son édification, qui ne se trouvait pas sur le territoire de la
Principauté et que Goudéa fit venir : Des montagnes d’Amanus (ou Liban), le bois de cèdre et de buis ;
De Dilmun (aujourd’hui le Bahreïn), du bois de construction, du cuivre et de l’or ;
De l’Élam
les pierres de taille ; De Magan (Oman aujourd’hui) la diorite et des pierres précieuses du désert de
Canaan
et d’Égypte.
Ce qui laisse supposer que les routes commerciales étaient redevenues sûres et qu’il disposait de grandes richesses.
On lui connait deux épouses : Geme-Shulpae (ou Geme-šulpae) et Nin-Alla (ou Nin-alla ou Ninalla), une
des filles d’Our-Bau. C’est une inscription sur un petit autel votif, en schiste qui nous a fait connaître le nom de celle-ci.
Le musée du Louvre possède une collection de statues en diorite de Goudéa, qui révèlent combien la sculpture avait atteint la
perfection. La qualité du travail signifie que l’atelier d’où sont sorties ces œuvres, avait une longue tradition de la
sculpture sur de la pierre dure. Elles représentent le souverain dans des offices religieux. Après la période de faste
que donna Goudéa à la cité, arriva une nouvelle fois la décadence et se suivirent sur le trône quatre Rois en moins de 8 ans.
D’abords son fils, Our-Nin-Girsou (ou Ur-Ningirsu ou Urningirsu ou Ur-Nin-Girsou,
2124 à 2119 ou 2122 à 2118 ou 2060 à
2055) qui lui succéda. Comme le précise Piotr Steinkeller, il passa dans des conditions non déterminées sous la coupe des Rois
d’Ur. On ne sait pas si ce fut à la suite d’un conflit
militaire, lié à des tensions frontalières, ou si ce fut une annexion pacifique ?. Puis le fils de celui-ci
Pirig-Me (ou Pirigme ou Ugme, 2119 à 2117 ou 2118 à 2117 ou 2118 à 2115
ou 2055 à 2053) monta sur le trône
pour un règne très court dont on ne sait rien.
Our-Nin-Girsou – Musée du Louvre |
Vint ensuite Our-Gar (ou Ur-Gar, 2118 à 2113 ou
2117 à 2113 ou 2115 à 2114 ou 2053 à 2049), puis enfin Nammahani (ou Nammahazi, 2114 à 2111
ou 2113 à 2110
ou 2049 à 2046)
dont on ne connaît pas l’origine, mais pour se légitimer il épousa Nin-Hedu (ou Nin-hedu) une des filles du Roi Our-Bau.
Il fut le dernier Roi. Il assista impuissant au renouveau de la cité d’Ur.
Dans celle-ci, Our-Nammou (ou Ur-Nammu ou
Namma Ur, 2112-2095) dont le nom veut dire "Guerrier de la Déesse Nammou (ou Nammu)", devint
Gouverneur sous le règne du Roi d’Ourouk,
Our-Hegal (ou Utu-Hegal,
2123-2113). On ne sait pas de quelle manière, mais il lui succéda sur le trône
d’Ourouk.
Our-Nammou ne s’installa pas à
Ourouk, il établit sa nouvelle capitale à
Ur et centralisa l’administration.
Il fonda la IIIe dynastie d’Ur et prit le titre par la force de
"Roi du Sumer et d’Akkad" et gouverna ainsi sur les villes d’Ur,
d’Éridou,
Larsa, Lagash où il soumit Nammahani, Nippur et
Ourouk.
Cette dynastie de grands guerriers apporta à la région un siècle de prospérité. Ce fut un Roi très
pieux, il restaura de nombreux temples dans le pays et permit leur bon fonctionnement en choisissant lui-même les Grand Prêtres
et les Prêtresses dans les principaux sanctuaires. Sa propre fille devint Prêtresse de Nanna (Dieu-lune) à
Ourouk.
Après Nammahani, sous cette domination d’Ur,
Lagash fut dirigée par des Gouverneurs : Our-Ninsuna à partir de 2111, Our-Ninkimara, Lu-Kirilaza et
Ir-Nanna qui mourut en 2023. On sait par la documentation de cette période que la région que dominait la
province de Lagash, sans connaître de grandeur politique, fut l’une des plus prospères de l’Empire
d’Ur. Après l’effondrement de celui-ci un siècle plus tard, une nouvelle
dynastie tenta de faire revivre Lagash, mais elle se laissa vite dépasser par les royaumes voisins. Dès lors, Lagash n’occupa
plus une place importante dans l’histoire de la Mésopotamie. Son déclin s’intensifia durant la période paléo-Babylonienne
(v.2005 à 1595). Les villes de l’État furent désertées au XVIIe siècle et elle s’éteint au
début du premier millénaire. Il semble que
Girsou ait connu une petite renaissance à l’époque
des Parthes
(141 av.J.C-224 ap.J.C).
Archéologie
Le
site de Tell Al-Hiba couvre une surface de près de 600 hectares. Il fut découvert et fouillé pendant
six semaines en 1887 par l’archéologue Allemand Robert Koldewey, qui dans un
premier temps mis au jour des résidences et des tombes, ce qui lui fit prendre l’endroit pour une nécropole. Quelques sondages
furent effectués autour du site dans les années 1950 à 1960, par Thorkild Jacobsen et Fuad Safar (en 1953),
avant la mise en place d’un programme de fouilles plus important. Celui-ci fut effectué à partir de 1968 et
jusqu’au début des années 1980.
Cinq saisons de fouilles entre 1968 et 1976 furent réalisées par une équipe du Metropolitan
Museum of Art et l’Institute of Fine Arts de l’Université de New York. L’équipe était dirigée par Vaughn E.Crawford et
comprenait Donald P.Hansen et Robert D.Biggs. La dernière saison de fouille eu lieu en 1990, menée par Donald P.Hansen.
Les découvertes y furent moins fructueuses que celles sur le site de Tellô (ou
Girsou), ce qui pour certains spécialistes
renforça l’idée d’une prédominance de cette dernière durant les époques qui nous sont documentées, même si cet avis est loin
de faire l’unanimité aujourd’hui.
Les archéologues dégagèrent toutefois des bâtiments d’un grand intérêt, notamment au Sud-ouest du site
le temple Ibgal (ou Ib.Gal ou (É.)IB.GAL), dédié à la Déesse Inanna, enfermé dans une enceinte ovale de 93 mètres de largeur
maximale. Le sanctuaire du temple était édifié sur une terrasse en briques et il était appuyé contre le côté Ouest de l’enceinte
ovale. Le dernier niveau qui a pu être identifié correspond à des travaux entrepris par le Roi En-Anna-Tum I (Ennatoum,
v.2425-v.2400), mais l’édifice est bien sur beaucoup plus ancien, puisqu’on sait que ce fut
Our-Nanshe (ou Ur-Nanshe,
v.2490-2465) qui le construisit (voire le reconstruisit). Le plan originel du temple est mal connu, car les constructions
des niveaux supérieurs furent incorporées dans les fondations des plus anciennes, dont la plupart ont disparu.
L’autre grand temple de la ville est l’Ébagaradu (ou É.Ba.Garadu ou (É.)BA.GÁRA), à l’Ouest du tell principal.
Il était dédié au Dieu Ningirsu (ou Ningirsou), divinité agraire locale dont le temple principal se trouvait dans la ville de
Girsou (ou Girsu). Son nom signifie "Seigneur (Nin)
de Girsou"). Il fit l’objet de constants travaux par les différents Rois de la période archaïque, depuis
Our-Nanshe
qui serait peut-être celui qui l’édifia, puis par la suite par Goudéa (ou
Gudea, 2142-2122) et par le Roi d’Ur,
Shulgi (ou Sulgi ou Shoulgi, 2094-2047).
Des travaux, datés de la période paléo-Babylonienne, d’une vaste plate-forme en briques indiquent qu’une ziggourat fut peut-être
construite sur le site sur ces niveaux. Un autre édifice inclut dans une enceinte fut dégagé dans le même secteur, mais qui n’a
pu être identifié comme un temple, ni même comme un sanctuaire. Les spécialistes pensent qu’il s’agissait sans doute d’une
dépendance du temple de Ningirsu, servant notamment pour la confection des repas du Dieu, car un espace de brassage de la bière
y fut mis au jour.
Bibliographie
Pour
d’autres détails sur la ville voir les ouvrages de :
Josef Bauer, Robert K.Englund et Pascal Attinger :
– Mesopotamien : Späturuk-Zeit und frühdynastische Zeit, Universitätsverlag, Freiburg, 1998 –
Vandenhoeck & Ruprecht, Göttingen, 1998.
Scott G.Beld :
– The Queen of Lagash : Ritual economy in a sumerian state, Ann Arbor, Michigan, 2002.
Robert D.Biggs :
– Inscriptions from Al-Hiba-Lagash : The first and second seasons, Undena Publications,
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Jean Bottéro et Marie-Joseph Stève :
– Il était une fois la Mésopotamie, Gallimard, Collection Découvertes, Paris, 1993.
Jean Bottéro et Barthel Hrouda :
– L’Orient ancien : Histoire et civilisations, Bordas, Paris, 1991 – En Allemand :
Der Alte Orient : Geschichte und Kultur des alten Vorderasien, Orbis-Verl, München, 1991-1998.
Henri Du Verdier De Genouillac :
– Fouilles de Telloh, Musée du Louvre, Ministère de l’éducation nationale, Paul Geuthner, Paris, 1934-36.
Vaughn Emerson Crawford :
– Lagash, British School of Archaeology in Iraq, Londres, 1974.
Dietz Otto Edzard :
– Gudea and his dynasty, University of Toronto Press Incorporated, Toronto, Buffalo, London, 1997.
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– Die inschriften Gudeas von Lagaš. 1, einleitung, Pontificium Institutum Biblicum, Roma, 1966.
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– The royal inscriptions of Mesopotamia : Early periods, vol. 3/1, Presargonic Period (2700–2350 BC),
University of Toronto Press, Toronto, Janvier 2008.
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– Mesopotamian chronicles, Society of Biblical Literature, Atlanta, 2004.
Jean Pierre Grégoire :
– La province méridionale de l’état de Lagash, Impr. Bourg-Bourger, Luxembourg, 1962.
Flemming Johansen :
– Statues of Gudea ancient and modern, Copenhagen Studies in Assyriology, Mesopotamia 6, 1978.
Fritz Rudolph Kraus :
– Sumerer und Akkader : Ein problem der altmesopotamischen geschichte, North-Holland
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Marc Van de Mieroop :
– A history of the ancient near east : ca. 3000-323…, Blackwell, Oxford, 2004 – Blackwell, Malden, 2007.
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– Glyptique Mésopotamienne : Fouilles de Lagash (Tello) et de Larsa (Senkereh) 1931-1933,
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– Corpus des inscriptions “Royales” présargoniques de Lagash, Librairie E.Droz, Genève, Paris, 1956.
Edmond Sollberger et Jean-Robert Kupper :
– Inscriptions royales sumériennes et akkadiennes, Le Cerf, Paris, 1971.
Piotr Steinkeller :
– The date of Gudea and his dynasty, Journal of Cuneiform Studies 40, New Haven, 1988.
Charles Virolleaud :
– Tablettes économiques de Lagash (époque de la IIIe dynastie d’Ur), copiées en 1900 au Musée impérial ottoman,
Société asiatique, Paris, Janvier 1968.
Irène Winter :
– Eannatum and the “King of Kiš? : Another look at the stele of the vultures and “cartouches”
in early Sumerian art, W. de Gruyter, Berlin, New York, 1986.
Charles Leonard Woolley : (Sir)
– The Sumerians, Clarendon Press, 1927-1929 – Norton, New York, 1965 – A.M.S. Press, New York, 1970 –
Barnes & Noble, New York, 1995.
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