Statue retrouvée dans le temple d’Ishtar, dite "Dame-au-polos" – Musée du Louvre
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Localisation et langue
Les Amorrites (ou Amoréen ou Amorrhéen ou Amorite ou Amorrei ou Amorreos ou Amorritas,
en Sumérien : MAR.TU ou KUR MAR.TU AI, en
Akkadien : Tidnum ou Amurrūm
ou Amurrû, en Égyptien : Amar,
en
Hébreu : ‘Ĕmōrī אמורי) étaient un peuple nomade
antique, cité par plusieurs sources, y compris qui la Bible. Le nom se réfère à ce peuple sémitique qui se fixa et occupa le pays à
l’Ouest de l’Euphrate dès la seconde moitié du IIIe millénaire. Ils furent selon toutes vraisemblance
originaires de la région du Jebel Bisri, en Syrie méridionale.
Leur langue, reste mal connue, car aucun texte écrit en Amorrite
n’a été à ce jour retrouvé. Les correspondances se faisant à cette époque exclusivement en écriture
Akkadienne. Il est probable qu’elle fut
un dialecte qui appartenait au groupe Nord-ouest des langues Sémitiques. L’amorrite est
seulement authentifié par l’onomastique (Science de l’étymologie des noms propres) et certains termes repris en
Akkadien.
L’histoire
On ne sait pas pourquoi les Amorrites entamèrent une migration, peut-être pour des
raisons de changement climatique. Ces nomades venus de l’Ouest, s’introduisirent petit à petit en Mésopotamie et se fixèrent.
Ils s’organisèrent en bandes de pillards et prirent possession de vastes territoires. Des "Rois" de MAR.TU (ou Mar’tu)
sont cités dans des textes d’Ebla (XXIVe siècle)
et dans ceux de la période d’Akkad (XXIIIe siècle).
Une des premières mentions trouver des Amorites remonte à vers l’an 2240. Elle se
trouve dans le récit d’une bataille sous le Roi
Akkadien,
Naram-Sin (2255-2218), qui
les combattit dans le Nord de la Syrie et les intégra à son royaume.
De toute évidence, cette intégration ne fut pas un succès parce que le successeur de
Naram-Sin,
Sar-Kali-Sarri
(ou Shar-Kali-Sharri ou Sarkalisarri, 2218-2195) eut plusieurs conflits militaires avec eux.
À cette époque, les Amorites étaient encore fortement nomades et ne vivaient pas dans une région donnée.
Leur pénétration s’accrut lors des guerres avec les
Goutis et s’accéléra à la disparition de l’Empire
d’Akkad face
aux Sumériens
d’Ur. Ces derniers les
décrivent comme des guerriers barbares.
Statuette en bronze d’homme agenouillé, trouvée à
Larsa, dite “l’Adorant du Dieu Amourrou” – Musée du Louvre |
Lors de la période de la IIIe dynastie
d’Ur,
à partir du règne du Roi, Our-Nammou
(ou Ur-Nammu ou Namma Ur, 2112-2095), les Amorites se répartirent en deux groupes différents :
▪ Le premier, dont certains éléments s’étaient déjà sédentarisés en pays de
Canaan (aujourd’hui le
Liban et la vallée de l’Oronte), se répandirent à travers le Nord de la Syrie et le Sud du
Canaan.
▪ Le second, fut d’une plus grande importance historique, en particulier pour la Mésopotamie.
C’étaient des nomades qui parcouraient le désert entre
Palmyre et Mari et qui faisaient paître leur bétail dans la
steppe Mésopotamienne le long de l’Euphrate. Ceux-ci étaient très proches des
Sumériens
et étaient déjà connus donc depuis l’époque dynastique archaïque de cette
région, parce qu’après leur migration ils avaient su se mêler aux civilisations
locales. Cet afflux important de civilisation fit peur aux
Sumériens.
Pour l’arrêter,
le Roi d’Ur,
Shulgi (ou Sulgi, 2094-2047),
en l’an 37 de son règne, fit construire des remparts dans tout le pays et
il fit édifier entre le Tigre et l’Euphrate un mur pour contrer la menace que constituaient ces Amorrites. À la chute du Roi d’Ur,
Ibbi-Sin (2028-2004) et de l’Empire du
Sumer, devant les
Élamites, les Amorrites profitèrent de ce
vide politique et s’imposèrent. Ils prirent le contrôle de plusieurs cités.
Au début des inscriptions Babyloniennes toutes les terres à
l’Ouest de l’Euphrate, y compris la Syrie et le pays de
Canaan,
étaient connues comme le “pays des Amorites“.
De ces villes naquirent des royaumes où des
dynasties Amorrites qui perdurèrent et comptèrent sur la carte politique de l’époque, et ce pendant plus de quatre siècles.
Parmi ces "cités royaumes" et pour les principales on trouve :
▪
Eshnunna, qui devint indépendante en 2027/2026, sous son Roi
Ilushu-Ilia.
▪
Larsa, où le Roi Naplânum (v.2025-2005), fonda aussi sa propre dynastie.
▪ La ville d’Isin
ou Isbi-Erra (ou
Ishbi-Erra, 2017-1985), officier dans l’armée du Roi d’Ur,
Ibbi-Sin,
reçut en 2017 le commandement de la place
d’Isin et de la région. Il profita de la
faiblesse du Roi de son souverain en lutte contre les
Élamites pour se proclamer Roi et fonder la Ière
dynastie d’Isin.
▪
Babylone et sa région
sur laquelle la première dynastie Amorrite va régner de 1895 à vers 1595 et qui
fut fondée par Sumu-Abum (ou
Samou Aboum, 1895-1881).
▪
Mari, sur le cours supérieur de
l’Euphrate (en Syrie) où le Roi Yaggid-Lim (1830-1820 ou 1825-1815) fonda la dynastie
Amorrite qui dura jusqu’à ce que Babylone écrase la cité.
Le Roi Zimri-Lim (1775-1761/60) fut
le dernier Roi de cette dynastie de Mari.
▪ Assur,
plus au Nord, qui vit l’arrivée au pouvoir du premier Empereur
d’Assyrie,
Shamshi-Adad I (1814-1775).
▪
Ekallāté (ou Ekallatum) forteresse de haute Mésopotamie dont
Shamshi-Adad I fut le Roi en 1814
avant de devenir le premier Empereur d’Assyrie (1796).
▪
Alep et le
Yamkhad (Voir à
Syrie Palestine).
On trouvait aussi une implantation Amorrite dans d’autres cité de moindre importance comme : Marad, Malgûm,
Mashkan-Shapir ou même
Ourouk.
Hammourabi – Musée du Louvre
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Cette période, qui s’étendit de vers 2030 à 1595, est appelée parfois par les
historiens "Période amorrite". Elle fut très marquée par les rivalités entre ces différents royaumes Amorrites.
On connaît assez bien son histoire par les archives retrouvées sur le site de
Mari.
Elle se déroula ainsi : Après la domination
d’Isin, puis de
Larsa sur le Sud de la Mésopotamie et celle du royaume du
Yamkhad avec
Alep, vint
celle éphémère du Roi Shamshi-Adad
I d’Ekallāté
(ou Ekallatum).
Après avoir dominé successivement leurs adversaires, ce fut finalement le
Yamkhad à l’Ouest, avec le règne de Yarim-Lim I (ou Iarim-Lim, 1780-1765) et
Babylone à l’Est, avec le règne
d’Hammourabi
(1792-1750) qui se partagèrent le Proche-Orient dans la seconde moitié du XVIIIe
siècle. Pour l’un et l’autre de ces royaumes, les descendants de ces deux grands
Rois ne surent pas assurer leur hégémonie et ils s’affaiblirent petit à petit
jusqu’à s’écrouler, autour de 1600, sous les raids de la nouvelle puissance
montante que fut le Roi
Hittite,
Moursil I (ou Mursili,
v.1620-v.1590). Celui-ci fonda la IIe dynastie de
Babylone en 1595.
Après cela, les royaumes Amorrites furent supplantés par l’établissement de nouvelles ethnies. Il y eut les
Hittites donc, puis les
Kassites, avec la période de
Burnaburiash I (ou Burna-Buriash ou Bournabouriash,
1521-1502). Celui-ci fut Roi
de Mari, du
Hana et de
Babylone et ses successeurs de la dynastie
Kassite agrandirent son Empire.
Enfin et surtout, il y eut les
Hourrites du
Mitanni sous le règne de
Shaushtatar I
(ou Shaushatar ou Sausatatar ou Šauštatar, v.1440-v.1410).
Tête de statuette du Dieu Shamash (10,80 cm) – Musée du Louvre |
Le panthéon Amorrite
Les principales Divinités Amorrites
étaient : Sîn le Dieu de la lune, Adad, Dieu de l’Orage ou d’une manière
générale des éléments climatiques. Dagan, Dieu des semences et de l’agriculture.
Amurru Martu qui bénéficiait d’un culte important à cette période. Il
personnifiait les populations Amorrites. On trouvait aussi d’autres divinités
communes à toutes les cités qui étaient celle du panthéon Mésopotamien, comme
Enlil le Dieu du vent, Ishtar la Déesse de l’amour physique et de la guerre,
Shamash le Dieu du soleil.
Les Amorrites dans la Bible
Amorrite est un terme utilisé dans la Bible pour désigner certains montagnards
des hauts plateaux qui habitaient le pays de
Canaan. Ils sont décrits
dans la Genèse (10:16) en tant que descendants de Canaan, fils de Cham. Ils sont dépeints comme un peuple puissant, de grande
stature, “comme la hauteur des cèdres” (Amos 2.9) qui occupait les terres à l’Est et à l’Ouest du Jourdain.
La taille et la résistance mentionnées ont amené certains érudits Chrétiens, y compris Orville James Nave, à désigner les Amorites
comme des “géants". Les termes Amorrite et Cananéen semblent y être utilisés plus ou moins
de manière interchangeable. Amorrite étant un composant spécifique parmi les
Cananéens qui
habitaient le pays.
La destruction de l’armée des
Amorrites – Gustave Doré (1832-1883) |
Les Amorites
bibliques semblent avoir d’abord occupé la région qui s’étendait des hauteurs à l’Ouest de la mer Morte (Genèse 14:07) à
Hébron (13:08; Livre du Deutéronome 3:8; 4:46-48) et qui englobait également la vallée du Jourdain, à l’Est de la rivière,
région dite : Le pays “des deux Rois Amorites Sihon et Og” (Livre du Deutéronome 31:4; Livre de Josué 02:10; 09:10).
Sihon et Og (en Hébreu : עוֹגֿ), étaient semble t-il des Rois indépendants. Ces Amorites
semblent avoir été liés à la région de
Jérusalem et les Jébuséens
en furent peut-être un sous-groupe. Les versants Sud des montagnes de
Judée sont appelés
les “montagnes des Amorites” (Livre du Deutéronome 01:07, 19, 20). Cinq Rois des Amorites furent battus dans une bataille
très sanglante par Joshua (Livre de Josué 10:10), puis à Merom (ou Meiron ou Mayrûn, 5 kilomètres à l’Ouest de Safad
– Livre de Josué 11:08).
Il est mentionné qu’à l’époque de Samuel, il y eut la paix entre eux et
Israël
(1 Livre de Samuel. 7:14). Les Amorites sont mentionnés dans la Bible dans l’Ancien Testament 88 fois,
dont 20 fois dans la liste des différents peuples de la
Palestine (par exemple
Livre de Josué 11,3). Le nom s’applique aussi à d’autres nations comme les habitants pré-Israélite de
Canaan. Ils
y sont situés
dans le Nord de Canaan
(Livre du Deutéronome 3.8 f), dans le Sud de la
Palestine (Genèse 14.7) ou
dans les montagnes de
Juda (Livre de Josué 10,5 FF),
ce qui fait supposer que le terme “Amorite” fut probablement le synonyme de différentes tribus pré-Israélites.
Bibliographie
Pour d’autres détails sur les Amorrites voir les ouvrages de :
Giorgio Buccellati :
– The Amorites of the Ur III period, Istituto Orientale Di Napoli, Naples, 1966.
Dominique Charpin, Marten Stol et Dietz Otto Edzard :
– Mesopotamien : Die altbabylonische Zeit,
Academic Press, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, Fribourg, 2004.
Dominique Charpin et Nele Ziegler :
– Mari et le Proche-Orient à l’époque amorrite : Essai d’histoire politique, SEPOA, Paris, 2003.
Edward Chiera et Samuel Noah Kramer :
– Sumerian Epics and Myths, University of Pennsylvania, Babylonian Section,
University of Chicago Press, Chicago, 1934.
Dietz Otto Edzard :
– Geschichte Mesopotamiens, C.H.Beck Verlag, München, 2004.
Harald Haarmann :
– Lexikon der untergegangenen Völker, C.H.Beck Verlag, München, 2005.
Alfred Haldar :
– Who were the Amorites ?, E.J.Brill, Leiden, 1971.
Herbert Bardwell Huffmon :
– Amorite personal names in the Mari texts : A structural and lexical study, John Hopkins press, Baltimore, 1965.
Shlomo Izre’el et Itamar Singer :
– Amurru Akkadian : A linguistic study, Scholars Press, Atlanta, Georgia, 1991.
Gebhard J.Selz :
– Sumerer und Akkader, C.H.Beck Verlag, München, 2005.
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