Nom et localisation
Smyrne (En
Grec :
Σμύρνη Smýrni, en
Arménien :
Իզմիր Izmir,
en Latin : Smyrna, en Espagnol : Esmirna, en Turc : Izmir) est identifiée à la ville actuelle d’Izmir. Elle est située le long
de la périphérie des eaux du golfe du même nom, sur les côtes de la mer Egée. En anglais,
la ville s’appela Smyrne jusqu’au début du XXe siècle et Izmir depuis. Elle porte également les noms
"d’Izmir Occidentale" ou "la Perle de la mer Egée". Selon certaines sources,
son nom proviendrait de celui d’une Reine Amazone. Elle était située à un point central et stratégique
sur la côte Égéenne de l’Anatolie et son port offrait des conditions avantageuses de défense avec de très
bonnes liaisons intérieures. Grâce à cela, Smyrne passa sur le devant de la scène politique et
commerciale avant l’ère classique. Ses vestiges sont situés à l’intérieur de la zone urbaine de l’actuelle
Izmir. Le développement de la ville connu très peu d’interruption jusqu’à aujourd’hui, les
périodes d’abandon venant en alternance avec celles de reconstruction intense.
Vue de l’agora |
Dans la pratique, une
distinction est souvent faite entre le vieux Smyrne, la première colonie fondée vers le XIe siècle av.J.C,
d’abord Éolienne et, plus tard, au cours de la période archaïque, cité
Ionienne, et la nouvelle ville aménagée dans l’ancienne
au IVe siècle av.J.C et dont la création fut inspirée par le Roi de
Macédoine,
Alexandre le Grand (336-323).
La vieille Smyrne était située sur une petite péninsule reliée au continent par
un isthme étroit, au Nord-est de l’angle intérieur du golfe d’Izmir, au bord d’une plaine fertile,
au pied du Mont Yamanlar.
La nouvelle Smyrne se développa en même temps, sur les pentes du mont Pagos (Kadifekale aujourd’hui)
et parallèlement à la côte du détroit, immédiatement au-dessous d’une petite baie qui existait avant le XVIIIe siècle.
Des fouilles sont menées sur les sites de l’ancienne et de la nouvelle ville de manière continue, depuis 1997,
pour l’ancienne Smyrne et depuis 2002 pour la ville de la période classique, en collaboration entre
le Musée d’Archéologie d’Izmir et la municipalité d’Izmir.
Tout au long de l’antiquité Smyrne fut l’une des principales cités
d’Ionie, qui développa son influence sur les rives de la mer Egée et
les îles. La ville fut également parmi les cités où résidera Homer (Poète
Grec, VIIIe siècle av.J.C) et la
patrie du célèbre rhéteur Ælius Aristide, qui vécut au IIe siècle et laissa une œuvre littéraire importante.
L’histoire…….
Des traces archéologique montrent une occupation su site de Smyrne dès la fin du IVe millénaire, vers 3100 ou
peut-être même encore plus tôt, comme le suggèrent les récentes découvertes à Yeşilova Höyük. Il y eut, semble t-il,
une cité d’autochtones bien avant l’installation des Lélèges et des colons
Grecs, le long de la côte de l’Asie
Mineure, dès le début du premier millénaire av.J.C. Les spécialistes retiennent pour le moment une fondation par les Lélèges
autour de 3000 av.J.C sur le site de Tepekule près de l’actuelle Bayraklı. L’histoire de Smyrne commença véritablement
à la fin de l’Âge du Bronze avec des traces de la cité dans des documents de l’Empire
Hittites.
L’archéologie préhistorique du début de l’Âge du Bronze et du Moyen Bronze dresse le portrait d’une ville fortement influencée
par la société Hittite
entre 2000 et 1200. Après la période de l’effondrement de l’Anatolie et des
Hittites, due en grande partie à l’invasion des
Peuples de la mer,
on assista à un bouleversement total de l’Asie Mineure et du Proche-Orient.
Colonnes de l’Agora de Smyrne
|
Smyrne se retrouva alors sous le protectorat des Rois
Phrygiens, la nouvelle puissance forte de la région.
À cette période les premiers colons Grecs à
occuper la vallée de Smyrne furent des Éoliens de
Lesbos et de Kymé (ou Cyme). La cité fit alors partie d’une confédération de cités-États Éoliennes qui marquait la frontière
avec les colonies Ioniennes. Puis, des
étrangers et des réfugiés de la ville Ionienne de
Colophon s’installèrent dans la cité et devinrent petit
à petit la population majoritaire. Enfin, à une époque que l’on situe traditionnellement en 688, par un
soulèvement, Smyrne passa entre leurs mains et devint la treizième cité-état de la confédération
Ionienne regroupant déjà :
Chios(ou Chio ou Kios),
Clazomènes,
Colophon,
Éphèse,
Érythrée,
Lébédos,
Milet,
Myonte,
Phocée,
Priène,
Samos et
Téos.
Halicarnasse les rejoignit après avoir été chassée pour impiété
de la sienne.
Cette première Smyrne vécut son apogée durant la période
Ionienne grâce à sa position stratégique à l’embouchure de la rivière Hermion à la tête d’un profond bras de mer
(Smyrnaeus Sinus) qui permettait aux navires marchands
Grecs d’atteindre l’intérieur des terres
et le cœur de la Lydie.
Bien située sur cette route commerciale entre l’Anatolie et la mer Egée, Smyrne développa au cours du VIIe siècle : Richesses,
splendeurs et pouvoir. La plus célèbre construction de cette époque fut sans aucun doute le temple d’Athéna.
Cependant elle attirera très vite la convoitise de son puissant voisin la
Lydie. D’après
Strabon (Géographe
Grec, v.63 av.J.C-v.23 ap.J.C),
un de ses Rois, Gygès
(687-652 ou 685-644), qui fut le premier des Mermnades, débuta sa première campagne en s’emparant de la côte
Carienne, puis du Nord et du Sud de la Troade et de la Mysie.
Il fut, semble t-il, aidé au début par les
Milésiens qui établirent la colonie d’Abydos sur l’Hellespont. Grâce à la supériorité de sa cavalerie,
Gygès assiégea ensuite son ancien allié
Milet, mais sans succès, puis Smyrne, mais il fut défait sur les bords de
l’Hermion. Par contre, selon Hérode (Historien
Grec, 484-v.425), il prit Magnésie et
Colophon.
La guerre avec l’Ionie dura jusqu’en 604. Les Rois
Lydiens suivant vont avec plus ou moins de succès prendre
petit à petit possession de l’Ionie.
En 600, un de ceux-ci Alyatte II (618-562 ou
610-561), réussit à prendre Smyrne et ravagea la cité. Bien que la ville ne cesse pas d’exister, la vie sur le style
Grec et
l’unité politique furent détruits et la cité fut réorganisée sur le système du village. Smyrne est mentionnée dans un fragment
de Pindare (Poète lyrique Grec,518-438)
mais sa grandeur était passée. Cette domination Lydienne
dura jusqu’à la défaite de son dernier Roi, Crésus
(ou Kroisos, 562-546 ou 561-547) devant le Roi
Perse
Cyrus II (559-529).
Les riches cités d’Ionie passèrent sous la domination des
Achéménides et en 546 Smyrne fut ravagée
pour la seconde fois.
Arches du premier niveau de l’agora
|
La cité n’occupa alors plus de rôle important
durant la période classique (Ve et
IVe siècles). Elle suivit sans trop y participer l’histoire de l’Ionie
et passa après la défaite des Perses
lors des Guerres Médiques (499-479) sous
la domination d’Athènes qui avait joué un rôle
prépondérant dans la victoire. En 412, sur l’instigation
d’Alcibiade (450-404),
Smyrne se révolta avec le reste de l’Ionie,
contre Athènes. L’aventure fut de courte durée,
l’Ionie fut ramenée à l’obéissance vers 411/410 par la cité Attique. En
405, le Sparte,
Lysandre battit la flotte
Athénienne à
la
bataille d’Aigos Potamos.
Après sa victoire, toutes les cités restées fidèles à
Athènes avant la bataille lui firent défection et
se soumirent à Lysandre. En 404 l’hégémonie
Athénienne n’exista plus et la
Ligue de Délos
fut dissoute.
Les cités d’Ionie passèrent alors de nouveau sous
la tutelle des Perses.
En 395 le Roi de Sparte,
Agésilas II (398-360) lança une campagne
en Asie Mineure contre le
Satrape Perse de
Lydie et de
Carie,
Tissapherne (v.413-395). La campagne
d’Agésilas II se solda par la
libération des cités d’Ionie
de la tutelle Achéménide.
Il fallut toutefois que Smyrne attende plus de cinquante ans pour être, elle, libérée des
Perses par le Roi de
Macédoine,
Alexandre le Grand
(336-323).
Selon la légende ce fut
Alexandre qui décida de restaurer la cité à moitié détruite et de lui redonner la puissance d’antan.
Selon
Strabon ce sont plus probablement plutôt ses
successeurs,
Antigonos I Monophtalmos (Roi 306-301), puis le Roi de
Thrace,
Lysimaque (322-281) qui
agrandirent et fortifièrent la cité au IVe siècle. Les ruines de l’ancienne acropole de la ville, la "couronne
de Smyrne", se trouvent sur une hauteur qui surplombe l’extrémité Nord du golfe. Ce fut en 301, après la
bataille
d’Ipsos, en Phrygie, contre
Antigonos I Monophtalmos que Smyrne
tomba sous la domination du Roi
Lysimaque. Puis lorsque ce dernier fut battu et tué par le Roi
Séleucide,
Séleucos I Nikâtor (305-280)
elle passa sous contrôle des
Séleucides, pour une courte période. Ceux-ci n’avaient pas entièrement la main mise sur l’intégralité de l’Asie Mineure
et la ville se retrouva au centre des conflits d’influences et d’intérêts entre les
Séleucides à l’Est, les Rois de
Pergame au Nord et les
Ptolémée
d’Égypte au Sud.
L’agora
|
Ce fut le
royaume de Pergame qui en eut la possession de la fin du IIIe au début du IIe siècle av.J.C. À la fin de la période
hellénistique, en 197 av.J.C, les
Séleucides tentèrent de reprendre le contrôle de l’Ionie
où se situait Smyrne. La ville soudainement coupée de ses liens avec le Roi de
Pergame,
Eumène II (ou
Eumènès, 197-159), fit appel à Rome.
Parce que Rome et Smyrne n’avait jusque-là aucun lien, Smyrne créa un culte à Rome où la cité fut
divinisée, afin qu’existe entre les deux villes une relation durable. Ce culte fut ensuite très répandu à travers
l’ensemble de l’Empire Romain. En 189/188, les
Séleucides furent
chassés définitivement d’Ionie et de l’Asie Mineure. Smyrne reçut
des territoires pour avoir combattu aux côtés des Romains.
Le Roi de Pergame,
Eumène II
(ou Eumènès) ayant été allié aux Romains
dans la lutte pour contrer l’expansion
Séleucide vers la mer Égée, obtint après la victoire, par la
paix d’Apamée en 188, le contrôle d’une partie
de l’Asie Mineure. Bien que Smyrne se trouva dans la région nouvellement attribuée et resta sous la domination des
Attalides jusque sous le règne
d’Attalos III Philométor (ou Attale, 138-133),
son engagement lui permit de bénéficier d’une indépendance protégée de Rome. La ville reçut plusieurs hommes politiques Romains
en exil. Lorsqu’Attalos III mourut sans enfant
mâle, il légua son royaume à la République Romaine et l’Anatolie, dont Smyrne, passa dans le monde Romain. Ils organisèrent la
province Romaine d’Asie, avec Pergame comme capitale.
Smyrne en fut l’un des principaux ports maritimes et devint une des principales villes de la province nouvellement
constituée.
Un des portiques de l’agora
|
Elle rivalisa même avec Éphèse et
Pergame pour le titre de "Première ville
de l’Asie". De 88 à 85, Smyrne, comme l’ensemble des cités d’Asie Mineure, soutint le Roi du
Pont,
Mithridate VI (120-63) dans sa guerre
contre Rome. Sous celui-ci les cités Grecques
jouirent d’une certaine autonomie et de plusieurs droits substantiels. Cependant lorsque le Roi fut défait lors de la
Première
Guerre de Mithridate, en 86, par le Consul Romain Sylla (ou Lucius Cornélius Sulla, 138-78),
Smyrne fut prise et Sylla obligea chacun des habitants de la cité à défiler nu en plein hiver et elle repassa sous la domination
Romaine. Sylla contraint
Mithridate VI à signer la paix de Dardanos (En Troade) et les villes d’Asie qui avaient accueilli
Mithridate VI, furent, condamnées
à une indemnisation. Smyrne entra alors dans la province Romaine d’Asie. Lorsque Constantinople devint
le siège du gouvernement, le commerce avec l’Anatolie de l’Ouest perdit en
importance et Smyrne régressa.
Galeries voûtées de l’agora
|
Smyrne fit partie des sept Églises d’Asie citées dans l’Apocalypse. Une
importante basilique y fut construite, qui mesurait 165 m. sur 28 m. C’était une structure à trois étages avec un grand hall
central. Du fait de l’importance de la déclinaison du terrain, le niveau inférieur des bâtiments au Nord et à l’Ouest était en
partie souterrain et possédait de longues galeries voûtées encore en bon état aujourd’hui ont été
utilisées en tant que marché couvert.
Artistiquement, Smyrne est connue pour ses “grotesques” qui sont des figurines en terre cuite dont la
particularité est d’exagérer un défaut physique lié souvent à la maladie. Il semble que ces représentations n’eurent pas
seulement un but artistique ou de divertissement. Smyrne possédait une célèbre école de médecine où séjourna le célèbre médecin
Galien. Il est probable que certaines de ces sculptures servaient à illustrer des maladies. Une collection de ces objets se
trouve aujourd’hui au musée du Louvre. Plusieurs constructions de la ville Romaine ont survécu jusqu’à nos
jours. On peu admirer l’agora relativement bien conservée, qui est en cours de fouille, ainsi que l’emplacement du théâtre,
aujourd’hui recouvert par des habitations.
Bibliographie
Pour
d’autres détails sur la cité et ses monuments voir les ouvrages de :
Ekrem Akurgal :
– Eski Izmir I : Yerleşme katları ve Athena Tapınağı, Türk Tarih Kurumu, Ankara, 1983.
Edmond Boissonas et Édouard Chapuisat :
– Smyrne, Éditions d’art Boissonnas, 1919.
Antoine Galland et Frédéric Bauden :
– Le voyage à Smyrne : Un manuscrit d’Antoine Galland (1678) : Contenant Smyrne ancienne & moderne & des
extraits du voyage fait en Levant, Chandeigne, Paris, 2000.
Antoine Galland, Joseph Georgerine et Jacques-Paul Babin :
– Smyrne ancienne et moderne, H.Champion, Paris, 2001 – Slatkine, Genèves, 2001.
Isabelle Hasselin-Rous, Marianne Hamiaux et Didier Laroche :
– Smyrne / Izmir, Centre culturel Français, Izmir, 2006.
Isabelle Hasselin-Rous, Ludovic Laugier et Jean-Luc Martinez :
– D’Izmir à Smyrne : Découverte d’une cité antique, Somogy, Musée du Louvre éditions, Paris, 2009.
Paul Jeancard :
– L’Anatolie; Smyrne, Sparte, Bourdour, Hiérapolis, le Dodécanèse, Librairie Française, Paris, 1919.
Dietrich O.A.Klose :
– Die münzprägung von Smyrna in der römischen Kaiserzeit, Antike Münzen und Geschnittene Steine 10,
W. de Gruyter, Berlin, 1987.
Léon Kontente :
– Smyrne et l’occident : De l’antiquité au XXIe siècle, Yvelinédition, Montigny-le-Bretonneux, 2007.
Rudolf Naumann et Selahattin Katar :
– Die agora von Smyrna, pp : 69–114, Istanbuler Forschungen 17, Tübingen, 1950.
Georg Petzl :
– Die inschriften von Smyrna, Österreichische Akademie der Wissenschaften, Rheinisch-Westfälische
Akademie der Wissenschaften, Habelt, Bonn, 1982-1987.
Yasemin Tuna-Nörling :
– Die attisch-schwarzfigurige keramik und der attische keramikexport nach kleinasien.
Die ausgrabungen von alt-Smyrna und Pitane, Collection : Istanbuler Forschungen 41,
Ernst Wasmuth Verlag, Tübingen, 1995.
Charles Vellay :
– Smyrne, ville Grecque, Librairie Chapelot, Paris, 1919.
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