Érythrée (ou Érythrées ou Eritre ou
Eritrèa, en Latin : Erythrae, en
Grec :
Erythrai ou ‘Eρυθραία
Erythrai, en
arabes إريتريا Iritriyya)
est située à 22 km au Nord-est du port de Cyssus
(Dont le nom moderne est Çeşme), sur une petite péninsule qui s’étend dans la baie d’Érythrée, en face
Chios. Les ruines de ce
comptoir maritime sont proches de la moderne Ritri. La cité était réputée pour son excellent vin, ses chèvres
et son bois. Érythrée fut le berceau de deux prophétesses "les Sibylles", dont l’une, Sibylla, est mentionnée par
Strabon (Géographe
Grec, v.63 av.J.C-v.23 ap.J.C)
comme vivant au début de la période de la ville et l’autre, Athénaïs, vivait à l’époque du Roi de
Macédoine
Alexandre
le Grand (336-323). Les Sibylles Érythréennes présidaient l’oracle Apollinien.
Le site archéologique est situé dans la zone de l’actuel village Turc d’Ildırı. Il a été exploré en
profondeur dans les années 1960 par le professeur Ekrem Akurgal, menant à des découvertes précieuses, mais a été laissé sans
surveillance depuis peu. Aujourd’hui, les ruines sur le site nous livrent, assez bien préservés : Les murs et les tours de la
cité, cinq sont encore visibles. L’Acropole, un amphithéâtre sur son versant Nord et vers l’Est se trouvent de
nombreux vestiges de bâtiments d’époque Byzantine.
Baie d’Érythrée aujourd’hui
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L’histoire……
D’après
la tradition, rapportée par Hérodote
(Historien Grec,
v.484-v.425) la fondation d’Érythrée serait due à Cnopos (ou Knopos), un des nombreux fils du
17e et dernier Roi d’Athènes,
Codros (ou Kodros), qui aurait amené les colons Ioniens
au XIe siècle. Selon Pausanias (Géographe
Grec, v.115-v.180)
la ville fut fondée par des colons Crétois sous
la direction d’Érythros, fils de Rhadamanthys, alors qu’elle était habitée par des
Lyciens, des
Cariens
et des Pamphyliens. Sa population fut ensuite renforcée par
les colons Ioniens sous la direction de Cnopos (ou Knopos). Puis Érythrée
fit partie d’une confédération
Ionienne regroupant douze cités :
Chios (ou Chio ou Kios),
Clazomènes,
Colophon,
Éphèse,
Lébédos,
Milet,
Myonte,
Phocée,
Priène,
Samos et
Téos.
Smyrne (ou Izmir) fut ensuite rattachée à la confédération et
Halicarnasse
les rejoignit après avoir été chassée pour impiété de la sienne.
L’historien local, Hippias, qui vivait sans doute à la période Hellénistique, indique que Cnopos fut détrôné par les
Tyrans Ortyges, Iros et Echaros, les amis des Tyrans Amphiclès et Polythènes de
Chios, ils furent expulsés par le frère de Cnopos.
Vers 700, comme petit à petit toutes les cités d’Ionie,
Chios passa sous protectorat des Lydiens.
Cette domination dura près d’un siècle et demi puisque après la défaite du dernier Roi
Lydien,
Crésus (ou Kroisos, 562-546 ou
561-547) devant le Roi Perse,
Cyrus II (559-529),
les riches cités d’Ionie passèrent sous la domination des
Achéménides.
Érythrée se joignit ensuite aux autres cités
Grecques
lors de la grande révolte de 499 à l’origine des
Guerres Médiques (499-479).
Érythrée ne fut jamais proprement parlé une grande ville, cependant elle envoya tout de même huit navires à la
bataille de Ladé,
près de Milet, à l’été 494 av.J.C, lorsque les cités
Ioniennes se retrouvèrent opposées à la flotte
Perse de
Darius I (522-486).
Monnaie représentant Auguste frappée à Érythrée |
Ce ne fut qu’après les victoires des cités de la
Grèce continentale : En 490 à
Marathon, qui mit fin à la
Première Guerre Médique,
puis celles des
batailles de Salamine,
le 29/9/480, et de Platées,
le 27/8/479 et du
cap Mycale en
Août (ou Septembre) 479, qui mirent fin à la
Deuxième Guerre Médique
(480-479), que les Ioniens retrouvèrent leur liberté. L’expansion de
l’Empire Perse vers l’Ouest était
définitivement arrêtée. Érythrée fut débarrassée de la tutelle des
Perses. Cette liberté fut de courte durée
car ce fut au tour d’Athènes, qui avait joué un rôle
prépondérant dans la victoire, de tirer profit de la région avec en 478 la fondation de la
Ligue de Délos,
qui entreprit de constituer un Empire maritime assurant l’hégémonie de la cité sur la mer Égée et sa domination sur
le monde Grec. Érythrée comme beaucoup de
villes Ioniennes entra dans la
Ligue qu’elle essaya de quitter en 453.
L’Ionie et ses cités subirent ensuite les
Guerres du Péloponnèse (431-404)
où Érythrée fut alliée à Athènes.
Cependant, en 412, sur l’instigation
d’Alcibiade (450-404), elle se
révolta avec le reste de l’Ionie,
contre Athènes. L’aventure fut de courte durée,
l’Ionie fut ramenée à l’obéissance vers 411/410 par la cité Attique. En
405, le Sparte
Lysandre battit la flotte
Athénienne à
la
bataille d’Aigos Potamos.
Après sa victoire, toutes les cités restées fidèles à
Athènes lui firent défection et se soumirent à
Lysandre. En 404 l’hégémonie Athénienne
n’exista plus et la Ligue de Délos fut
dissoute. Les cités d’Ionie passèrent alors de nouveau sous la tutelle des
Perses. En 395, le Roi de
Sparte,
Agésilas II (398-360) lança une campagne
en Asie Mineure contre le
Satrape Perse de
Lydie et de
Carie,
Tissapherne (v.413-395). La campagne
d’Agésilas II se solda par la libération
des cités d’Ionie de la tutelle
Achéménide. Elles
subirent ensuite la domination de Sparte,
mais pour peu de temps. En 394 av.J.C, se déroula la bataille de
Cnide
qui opposa les flottes
Perse et
Spartiate au large de la cité
de
Cnide
(ou Knidos).
Vue du site de fouille
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Pharnabaze, le
Satrape
Perse de
Phrygie, disposait d’une escadre de trirèmes
Phéniciennes et d’une
escadre de trirèmes Athéniennes sous les ordres
de l’amiral Athénien Conon. En face, l’amiral de
Sparte Pisandre disposait d’une flotte
Spartiate renforcée par des contingents
alliés levés dans les îles Égéennes. Conon fut vainqueur et fut accueillit à Érythrée avec tous les honneurs. Les Érythréens
lui firent une dédicace qui existe toujours. Le climat politique était très tendu et en 387/386,
Sparte menacée de tous côtés,
conclut la paix d’Antalcidas
ou paix du Roi avec les Perses
et tous les Grecs.
Elle acceptait la domination des
Achéménides
et leur cédait des cités Grecques d’Asie Mineure.
Après un sursaut de Sparte,
en Juillet 371, à la
bataille de Leuctres la suprématie
Spartiate sur le monde Égéen fut définitivement terminée. L’hégémonie du vainqueur,
Thèbes qui s’ensuivit n’eut que peu d’impact
sur le monde Anatolien.
Les Perses,
profitant du cahot du monde Grec,
reprirent possession de l’Ionie. Leurs nouvelles dominations, physique
et politique, sur les cités furent similaires à celles qui précédaient les
Guerres Médiques,
en particulier sur les très lourds impôts. À Halicarnasse,
Mausole (ou Maussollos,
377-353) succéda à son père comme
Satrape de
Carie. Il fut allié avec le Roi de
Sparte,
Agésilas II et jouissant d’une certaine
autonomie il étendit son pouvoir sur les cités Ioniennes. Érythrée
entretint de bonnes relations avec Mausole,
dans une inscription retrouvée sur le site il est même qualifié de "bienfaiteur d’Érythrée".
La cité passa aussi un traité basé sur l’aide réciproque en cas
de guerre avec Hermias le Tyran d’Assos, ville de Troade. En 334, Érythrée fut libérée du joug
Perse par le Roi
de Macédoine
Alexandre le Grand (336-323) lors de sa
conquête de l’Asie Mineure. Après la mort de ce dernier et les conflits pour sa succession entre les
différents Diadoques, la région passa sous différentes tutelles. Elle fut un temps sous la domination du
Roi de
Macédoine
Antigonos I Monophtalmos
(306-301), puis fut le centre des conflits d’influences et d’intérêts entre les
Séleucides à
l’Est, les Rois de Pergame
au Nord et les Ptolémée
d’Égypte au Sud.
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Le Roi de
Pergame,
Eumène II (ou
Eumènès, 197-159) s’étant allié aux Romains
pour contrer l’expansion Séleucide
vers la mer Égée, obtint, par la paix d’Apamée
en 188, le contrôle d’une partie de l’Asie Mineure. Érythrée se trouva dans la région nouvellement attribuée
et resta sous la domination des Attalides jusque sous le
règne d’Attalos III Philométor (ou Attale,
138-133). Lorsqu’Attalos III mourut sans
enfant mâle, il légua son royaume à la République Romaine et l’Anatolie, dont Érythrée, passa dans le
monde Romain. La cité s’épanouit en tant que ville libre dans la province Romaine d’Asie.
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Bibliographie
Pour d’autres détails sur la cité voir les ouvrages de :
Ekrem Akurgal :
– Erythrai : An ancient Ionian city, Princeton University Press, Princeton, 1976 –
Tifset A.Ş., Izmir, 1979.
George Ewart Bean :
– Kleinasien. Band 1. Die ägäische Türkei von Pergamon bis Didyma, Auflage. Kohlhammer, Stuttgart, 1987.
Helmut Engelmann et Reinhold Merkelbach :
– Die Inschriften von Erythrai und Klazomenai, R. Habelt, Bonn, 1972-1973.
Eckart Olshausen :
– Erythrai 2, Der Kleine Pauly (KlP) 5, Stuttgart. 1975.
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