Noms et localisation
Sparte
est généralement évoquée par les anciens Grecs sous le nom de Lacédémone (ou
Lakedaimon, en Grec : Λακεδαίμων, ou
Lakedaimonia Λακεδαιμονία,
ou Spártē Σπάρτη, en Dorien : Σπάρτα Spárta).
Ce sont aussi les noms communément utilisés dans les œuvres d’Homère et par les historiens
Athéniens tel que,
Hérodote (Historien Grec, 484-v.425) ou
Thucydide (Homme politique et historien
Athénien, v.460-v.395).
Hérodote
semble toute fois distinguer l’antique citadelle de Therapné de la partie basse de la ville de Sparte.
Ruines de Sparte
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La cité se situe dans le Péloponnèse,
sur les rives d’un fleuve principal, l’Eurotas, sur un plateau entre la chaîne de
montagne Taygète (ou Taÿgetos, en Grec : Ταΰγετος) et le
Parnon (Montagne qui sépare la Laconie de l’Arcadie). La région immédiate qui entoure la ville est communément
appelée Laconie et Sparte en fut la capitale. Elle comprend deux régions principales, séparées par les montagnes. Le terme de
Laconie est parfois utilisé pour désigner toutes les régions qui furent sous le contrôle direct Spartiate, y compris la
Messénie.
Lacédémone est aujourd’hui le nom d’une province Grecque dans la préfecture de Franconia.
Sparte s’est constituée probablement vers la fin du IXe siècle, début du VIIIe, par le synœcisme (regroupement)
de quatre villages d’origine Dorienne : Limnai, Kynosoura, Mesoa et Pitana, un cinquième, Amyclées, distant de quelques
kilomètres, viendra s’y ajouter à une époque toujours inconnue. Sparte fut l’une des cités-États Doriennes les plus puissantes
de la Grèce antique, avec Athènes et
Thèbes.
Selon Thucydide, l’État Spartiate
s’étendit au Ve siècle av.J.C, sur les deux cinquièmes du Péloponnèse, soit près de 8.500 km², le triple de sa rivale
Athènes.
La Laconie au sens strict du terme fut en fait le territoire délimité à l’Ouest par le Taygète, au Sud et à l’Est par la mer
Méditerranée. La frontière Nord fut la plus changeante.
Son développement
Au
VIIIe siècle, la poussée démographique entraîna Sparte à la recherche de nouvelles terres. La cité conquérit d’abord la
Messénie voisine qu’elle
soumit (Voir la Première Guerre de
Messénie, fin du VIIIe siècle) et contraint ses habitants à devenir ses
Hilotes. À cette époque Sparte
rayonna sur l’Hellade, entretenant le commerce avec la Grèce,
l’Égypte et
l’Asie Mineure. Dès lors, sa
principale rivale fut Argos. En 669, à la bataille
d’Hysiaï, le Tyran d’Argos,
Pheidon défit Sparte. Les
Messéniens profitèrent de
la faiblesse de cette dernière pour se révolter, ce qui brisa l’expansion de la cité. Cependant les
Messéniens furent de nouveau soumis
(Deuxième Guerre de Messénie,
685-668 ou 670-657 ou v.650-620).
En politique extérieure, Sparte édifia la puissante Ligue
du Péloponnèse.
Après sa victoire sur la
Messénie, Sparte agrandit encore son territoire et
devint maître de toute la partie qui s’étendait à l’Est du Parnon, bordée au Nord par la vallée de la Nedha, jusqu’à la
Méditerranée. La vallée de Messénie à proprement
parler était arrosée par la rivière Pamissos. On distingue la plaine du Stényclaros au Nord de la crête de Scala et la plaine
côtière appelée Macaria "la Bienheureuse", au Sud. En 545, à la bataille des Champions Sparte défit
Argos et domina alors le plateau de Thyréatide (ou Kynourie).
À cette époque les limites de la région couvraient les environs de Thyrée (ou Thyréa, près de l’actuelle Astros), le Sud du
mont Parthénion, le bassin versant de l’Eurotas, englobant la Skiritide, puis les territoires aux pieds du mont Chelmos
(Identifié comme la Belminatide). Elle s’assura l’hégémonie sur l’ensemble du Péloponnèse, qu’elle conserva jusqu’aux
Guerres Médiques (499-490 et 480-479).
Face à l’expansion de l’Empire
Athénien, l’affrontement entre
les deux puissances devint inévitable. Pour conserver son territoire elle dut lutter dans la
Troisième guerre de Messénie (464-454).
Puis Sparte triompha d’Athènes dans la
Guerre du Péloponnèse (431-404)
et décida d’imposer son propre impérialisme. En 394, les Grecs se soulevèrent contre elle avec la coalition
d’Athènes,
Thèbes,
Argos et
Corinthe. En 387, Sparte accepta
l’arbitrage par la Perse et la
"paix d’Antalcidas"
ou "paix du Roi" fut signée entre les belligérants. Sparte céda les cités Grecques
d’Asie Mineure qu’elle avait
conquise aux Perses. En 376,
Athènes coula sa flotte militaire, mettant de fait
un terme à son hégémonie navale. En 371, les Athéniens et
Lacédémoniens passèrent un accord se reconnaissant mutuellement leurs confédérations, afin de lutter contre la
Ligue Béotienne, aussi appelée
Confédération Béotienne.
Sacrifice à Aphrodite à Sparte – Musée du Louvre
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La même année les Spartiates, toujours avide d’expansion, marchèrent sur
Thèbes. Mais ce fut cette dernière, nouvelle puissance
montante, qui lui porta le coup final avec le désastre de la
bataille de Leuctres, le 6 Juillet 371.
L’hégémonique de Sparte fut rompue et il faut ajouter à son échec l’indépendance de la
Messénie en 369.
En 362, Sparte eut un sursaut et à la
bataille de Mantinée redressa la situation en brisant la
suprématie Thébaine, mais sa victoire
demeure sans lendemain.
Secouée par des graves crises internes, en 337, la ville se montra incapable de faire face
à l’expansion de la Macédoine et de son Roi
Philippe II (359-336).
Ses tentatives de révolte contre la Macédoine furent
systématiquement écrasées (265 et 222). Elle perdit tous ses territoires. Puis elle s’allia à Rome contre la
Ligue Étolienne et dut
lutter aussi contre la Ligue Achéenne.
En 146, Sparte, définitivement ruinée par les invasions, fut intégrée à l’Empire Romain et cessa
pour toujours d’être une puissance conquérante.
Ligue du Péloponnèse
Le terme
"Ligue du Péloponnèse" est une expression contemporaine inventée par les historiens, à
l’époque les membres étaient appelés "les Lacédémoniens (Sparte) et leurs alliés". Cette ligue fut
constituée dans un but défensif à la fin du VIe siècle et dura jusqu’aux invasions
Thébaines de 370-369,
mais elle permit surtout à Sparte de concentrer son effort militaire contre
Argos.
Les cités membres étaient indépendantes (autonomia) et contrairement à la
Ligue de Délos, elles ne payaient aucun tribut
(phoros). Il est difficile de mesurer l’exacte étendue de la Ligue, d’autant que tous les alliés
de Sparte n’en faisaient pas partie, mais presque tous les États du Péloponnèse,
sauf l’Argolide et l’Achaïe, y étaient adhérant.
La Ligue participa à la
Deuxième Guerre Médique et bien sur à la
Guerre du Péloponnèse.
Selon Thucydide (Homme politique
et historien Athénien, v.460-v.395), la Ligue disposait d’un
mode de fonctionnement que l’on pourrait qualifier de démocratique. L’assemblée fédérale se réunissait généralement à Sparte à
la seule initiative des Lacédémoniens et les propositions qui étaient soumises à discussion étaient généralement d’origine
Spartiate. La ville prit également le commandement de toutes les forces alliées, y compris sur mer, malgré les prétentions des
cités, comme Corinthe.
Chaque cité disposait d’une voix. Sparte n’avait qu’une voix comme les autres, mais la cité avait une
très grande influence et disposait d’une certaine hégémonie. Aucune action n’était possible si elle n’avait pas été votée par
Sparte. Corinthiens et
Mégariens se
plaignirent régulièrement de
la tutelle Spartiate au sein de la Ligue. À plusieurs reprises, Sparte ne respecta pas l’autonomie de ses alliés.
Dès 404, la cité leur imposa sa politique d’intervention en
Asie Mineure, en Grèce du
Nord et en Béotie. En 402, elle obligea Élis
(Capitale d’Élide),
à accorder l’indépendance à ses cités Périèques et à
Corinthe à rompre avec
Argos.
Les décisions (La guerre, la paix, les alliances) étaient prises à la majorité
des suffrages. Elles engageaient tous les alliés, sauf si certains invoquaient, pour garder leur liberté
d’action, des empêchements religieux ou des stipulations contraires à des traités antérieurs. En cas de guerre,
l’assemblée fixait les contingents à lever, ou les sommes à payer pour le rachat des prisonniers et édictait des
amendes pour les défaillants. Les membres de la Ligue ne pouvaient se faire la guerre entre eux tant que l’armée
commune était en expédition. En dehors de ces périodes, le rythme des conflits inter-cités était régulier. Au Ve siècle,
Corinthe et
Mégare étaient fréquemment en guerre
l’une contre l’autre. Toutes les cités restèrent fidèles à Sparte, sauf pendant la
Guerre du Péloponnèse ou certaines
refusèrent le traité de paix avec Athènes (Paix de
Nicias), mais après la
victoire de Mantinée, la Ligue se reconstitua.
Les structures sociales
La constitution
L’État
Dorique de Sparte fut la copie de l’État Dorique
Crétois. Entre le VIIIe et le
VIIe siècle av.J.C, les Spartiates connurent une période d’anarchie et de guerre civile, retracée plus tard à
la fois par Hérodote (Historien Grec, 484-v.425) et
Thucydide (Homme politique et historien
Athénien, v.460-v.395).
Suite à cela les Spartiates lancèrent une série de réformes politiques et sociales de leur société. Ces réformes
marquèrent le début de l’histoire de la Sparte classique. Par ces dernières, la ville se distingua des autres cités
par son modèle social, où l’on trouvait différentes strates. On comptait trois groupes sociaux principaux :
• La minorité du peuple était les citoyens, elle était constituée par les
Homoioi (ou les Égaux ou Hómoioi, en
Grec : Oμοιοι “les Semblables” ou “les Pairs“).
• L’activité économique fut assurée par les
Périèques (ou Períoikoi,
en Grec : Περίοικοι), population libre mais non-citoyenne.
• Puis on trouvait les Hilotes (ou Ilotes ou Heílôtes,
en Grec : Εïλωτες), dont le statut s’apparente aux serfs du Moyen Âge occidental.
L’éducation était obligatoire, collective
et organisée par la cité, elle visait à former des soldats disciplinés, efficaces et attachés au bien de la cité. Ces réformes
menées par Lycurgue au IXe ou VIIIe siècle (Personnage mythique pour certains spécialistes) furent un véritable tournant pour la ville.
Les institutions originelles établissaient la souveraineté à tous citoyens, elles étaient équilibrées par une double monarchie,
représentée par deux familles : La branche de Proclès dites des “Eurypontides ou Proclides” et celle
d’Eurysthène (jumeaux) dites “Agiades
ou Eurysthènides“.
Sparte avec les montagnes Taygète en arrière-plan
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Le régime politique
était donc composé de deux Rois. Ils éraient à égalité au niveau de l’autorité, de sorte que l’un ne pouvait pas agir contre le
veto de son collègue. Les origines des pouvoirs exercés par l’assemblée des citoyens sont pratiquement inconnues en raison du
manque de documentation historique et du secret d’État. Les devoirs des Rois étaient essentiellement religieux, judiciaires et
militaires. Ils étaient aussi les Grands Prêtres de l’État et étaient également tenu de maintenir la communication avec le
sanctuaire de Delphes, qui exerça toujours une grande
autorité dans la politique Spartiate.
À l’époque d’Hérodote
leurs fonctions judiciaires fut limitées aux affaires d’héritages, d’adoptions et des routes publiques.
Les affaires civiles et pénales étaient soumises à l’approbations d’un groupe de fonctionnaires, sorte
de conseil des Anciens, connu sous le nom d’Éphores
(ou Ephoroi ou éphoroi, en Grec : Eφοροι "Surveillants"), ainsi qu’à une assemblée, la
Gérousie (ou Gérousia ou Gerousía, de gérôn, en
Grec : γέρων "le vieillard").
Les Éphores étaient un directoire de cinq Magistrats
annuels, ils formaient le véritable gouvernement. La Gérousie se composait
de 28 personnes âgées de plus de 60 ans, élues à vie et, en général, une partie de la famille royale.
Les hautes affaires de l’État et les décisions politiques étaient examinées par ce conseil qui pouvait alors proposer des
mesures alternatives à l’Assemblée (ou Apella), l’organe collectif des citoyens Spartiates, qui choisissait l’une
des options proposée par vote. L’Assemblée rassemblait l’ensemble des citoyens
Homoioi et était donc chargée de voter les lois, mais son
rôle précis est encore aujourd’hui mal connu. Elle était réunie à dates fixes. Les projets mis en forme par la
Gérousie lui étaient soumis.
Elle les approuvait ou non, sans discuter les amendements proposés par les
Éphores. Elle votait les décisions par acclamations,
mais son vote ne liait pas la Gérousie qui pouvait considérer que
le peuple s’était trompé.
L’Assemblée élisait également les
Éphores et les
Gérontes. On ignore si tous les Spartiates
pouvaient y prendre la parole, par exemple pour proposer une loi ou un amendement, ou si l’assemblée se contentait d’élire
les Éphores. Pour
Aristote (Philosophe Grec, 384-322),
l’Assemblée avait un pouvoir si faible qu’il ne la mentionne même pas comme élément démocratique du régime Spartiate. Il faut
noter aussi que les prérogatives royales furent réduites au fil du temps. À la période des
Guerres Médiques (499-490 et 480-479),
le Roi perdit le droit de déclarer la guerre et était accompagné sur le terrain par deux
Éphores. Il fut dès lors supplanté par ceux-ci dans le contrôle de
la politique étrangère. Au fil du temps, les Rois devinrent de simples figures de têtes, sauf en leur qualité de Général.
Le véritable pouvoir fut transféré aux Éphores et à la
Gérousie. Cette organisation fut pendant des siècles la force de la
cité. Cependant au IIIe siècle, les difficultés dues à son système sociopolitique et au déclin de sa population
d’Homoioi entraînèrent de nouvelles réformes. Ces essais de réformes
intérieures menées par les Rois
Agis IV (245-241) et
Cléomène III (235-219) échouèrent.
La citoyenneté
Tous les
habitants de Sparte n’étaient pas considérés comme des citoyens. Seuls ceux qui avaient entrepris le processus d’éducation
Spartiate connu sous le nom d’agôgê (ou agōgē, en Grec :
‘Aγωγή) étaient éligibles. De plus les seules personnes admissibles à recevoir
l’agôgê devaient être Spartiates, né de l’union légitime de deux
Spartiates, ou des personnes qui pouvaient prouver que leurs ancêtres étaient à l’origine des habitants de la ville.
kylix Laconien – 590-550 av.J.C – Staatliche Antikensammlungen
– Munich
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Il y avait cependant deux exceptions :
• Les Trophimoi (En Grec : τρόφιμοι “Pupilles” ou
“Les nourris“, de trophós en Grec : τροφός “Nourriture“), étaient des
enfants de non-Spartiates, Périèques ou étrangers, qui étaient autorisé à
subir l’agôgê.
Les Trophimoi étaient adoptés à titre temporaire par un Oikos Spartiate (Sorte de parrain). Les Trophimoi fils de
Périèques, à l’instar des Néodamodes
et des Nothoi (Fils bâtards de citoyens et d’esclaves), constituaient une classe intermédiaire de Sparte. Ils pouvaient
accéder au statut de citoyen.
Selon Plutarque (Philosophe, biographe et moraliste
Grec, 46-v.125), le Roi Agis IV (245-241)
entendait ainsi compléter le corps civique, devenu insuffisant pour les besoins militaires de Sparte :
“Par tous les Périèques et les étrangers qui auraient été
élevés en hommes libres et qui par ailleurs seraient bien faits de leur personne et dans la fleur de l’âge”
(Vie d’Agis, VIII, 3).
Les Trophimoi étrangers repartaient généralement après leur éducation dans leur pays d’origine
où ils augmentaient ainsi l’influence de Sparte. Sur l’invitation du Roi
Agésilas II (398-360),
Xénophon (Philosophe,
historien et maître de guerre Grec, v.430-v.355) fit élever ses fils à Sparte. Cependant, certains Trophimoi choisirent
de rester dans la cité, voire de combattre dans l’armée civique. Ce fut par exemple le cas en 381, dans le siège que tint
Agésilas II contre Phlionte (Cité Grecque du Péloponnèse,
située au Sud de Sicyone et au
Sud-ouest de Corinthe).
• L’autre exception étaient les fils d’Hilotes
qui pouvaient être inscrit comme des Syntrophoi (Élevé avec) si des Spartiates les adoptaient officiellement et leurs
payaient leurs études. Si un Syntrophos était exceptionnellement bon dans sa formation, il pouvait être parrainé pour devenir
un Spartiate. Ils devenaient de ce fait fils de bonne famille et pouvaient être élevés dans certains cas avec
les enfants royaux. Syntrophos était un titre qu’ils gardaient toute leur vie.
Lorsque les citoyens Spartiates mourraient, seule une pierre tombale était accordée aux soldats
qui étaient morts au combat au cours d’une campagne victorieuse, ou pour les femmes qui étaient mortes en service, soit lors
d’un office divin ou en couches.
Autre vue du site – L’acropole
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Les Homoioi
Les
citoyens de Sparte (ou égaux ou semblables) étaient appelés les “homoioi” (ou Hómoioi, en Grec :
Oμοιοι “les Semblables” ou “les Pairs” la traduction classique reprise lors de
la Révolution Française, est en fait inexacte). Il n’est pas certain que tous les Spartiates
furent des homoioi. On estime leur nombre à 1.200 au moment de la défaite de Sparte, en 371, le 6 Juillet, face à l’armée
de Thèbes à
la
bataille de Leuctres.
Certains citoyens,
considérés comme des lâches au combat, furent soumis à toutes sortes de brimades et de vexations. Tous les citoyens pouvaient
participer à l’autorité populaire. Ils ne représentaient donc qu’une petite minorité de la population Lacédémonienne.
Les critères de la citoyenneté Spartiate étaient particulièrement sélectifs.
Pour faire partie de cette élite, il
fallait : Être né de l’union légitime de deux Spartiates. Les bâtards étaient distingués des citoyens à part entière ; Posséder
un domaine (ou kléros) permettant de payer son écot, ils avaient l’obligation de participer au banquet des citoyens (ou
le syssition) quotidiennement, en y apportant leur cote part de nourriture (ou en la payant).
Enfin, pour avoir le statut
d’homoioi, les individus devaient avoir subi et réussi l’agôgê (L’éducation
Spartiate du citoyen). Les Homoioi étaient des guerriers et ne pouvaient être ni commerçants, ni ouvriers. La perte d’influence
de Sparte au IIIe siècle av.J.C. serait liée à cette restriction du nombre des homoioi, phénomène désigné par les historiens
sous le nom d’oliganthropie (Étymologiquement La disette d’humains.
Ce terme désigne la décroissance démographique extrême d’une population humaine, menaçant cette dernière d’extinction).
Les Périèques
Les
Périèques (ou Períoikoi, en Grec : Περίοικοι) étaient les habitants libres mais
non citoyens de la Laconie et de la Messénie. Leur
origine est incertaine. La théorie la plus souvent admise est qu’ils furent les descendants des Laconiens. Cette thèse ancienne
fait des Périèques les anciens Achéens envahis par
les Doriens. C’est là que les Achéens de la plaine
seraient devenus les Hilotes et ceux des montagnes seraient devenus les
Périèques. Leur nom signifie Ceux qui habitent autour. Ils étaient des hommes libres et ils bénéficiaient de droits
civils et ils participaient à l’administration de leur ville. Ils firent partie de l’État Lacédémonien, mais n’étaient pas
des citoyens Spartiates, ils n’avaient aucun droit politique dans la cité et étaient soumis à sa suzeraineté. Les Périèques
devaient le service militaire en tant qu’Hoplites dans l’armée de terre,
ou en tant qu’Épibates dans l’infanterie de marine. Ils payaient l’impôt à Sparte.
Autre vue du site – Le théâtre
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Leur territoire, la Perioikis (En Grec :
Περίοικις), faisait partie à part entière du territoire Spartiate. On ne sait pas
comment étaient organisées les cités Périèques. Il semble qu’elles devaient avoir adopté un système oligarchique. Leurs villes
furent décrites comme des cités (ou poleis) par
Hérodote (Historien Grec, v.484-v.425 – Livre VII, 234),
Thucydide (Homme politique et historien
Athénien, v.460-v.395 –
Histoire de la guerre du Péloponnèse, Livre V, 54, 1) et
Xénophon (Philosophe, historien et maître de guerre Grec, v.430-v.355, Helléniques, Livre VI, 5, 21).
Les Périèques avaient le droit de posséder des terres et faisaient partie de l’armée
civique au même titre que les Homoioi. Ils ne pouvaient être Magistrats,
ni même participer à l’assemblée. Leurs activités principales étaient : Le commerce, l’industrie et la culture des terres de la
perioikis. Ils travaillaient aussi pour l’armée, dans la confection des uniformes et des armes. Dans toutes les circonstances
ils restèrent fidèles à Sparte, les premières défections n’eurent lieues qu’a l’invasion
Thébaine de 370-369.
Les Hilotes
Les
Hilotes (ou Ilotes ou Heílôtes, en Grec : Εïλωτες) étaient les serfs. Le nom vient, selon une
partie de la tradition, de la bourgade d’Hélos (En Grec : Eλος), située au Sud de Sparte.
Pausanias (Géographe Grec,
v.115-v.180, livre III – Description de la Grèce) déclare : “Ils furent les premiers appelés Hilotes”. Le nom serait
donc une simple ethnie. L’explication est peu plausible sur le plan historique et semble impossible sur le plan phonétique.
Certains auteurs ne considèrent pas le mot comme un simple ethnique, mais comme un nom à connotation servile. Il est certain
qu’une partie de l’hilotisme fut issu des conquêtes militaires. Ce fut le cas des
Messéniens, réduits à ce rang au VIIIe
siècle av.J.C.
Pour ce qui est des premiers Hilotes avant eux, la situation n’est toujours pas de nos jours élucidée. Selon
la tradition, ils seraient les descendants des habitants initiaux,
Achéens, que les Doriens auraient soumis ?. Mais
tous les Achéens ne furent pas réduits à
l’hilotisme. D’autres auteurs antiques proposent des théories alternatives. Selon Antiochos de Syracuse, les Hilotes furent à
l’origine les Lacédémoniens qui ne participèrent pas aux
Guerres de Messénie.
Autre vue du site
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Pour Éphore de Cymé (ou Éphore de Cumes,
historien Grec, IVe siècle av.J.C) c’étaient des Périèques de
Hélos, révoltés qui furent réduits à l’esclavage. L’historiographie moderne privilégie la thèse d’Antiochos de Syracuse.
Le statut juridique des Hilotes est lui aussi assez complexe. Ils n’étaient pas libres et ne possédaient aucun droit politique.
Ils appartenaient à l’État et étaient attachés à un lot de terre ce qui les rapprochaient du serf médiéval. Ils avaient un maître,
mais ce dernier ne pouvait ni les affranchir, ni les vendre, ni les maltraiter ou les tuer.
Avec ce statut d’esclave
leur seule fonction était de cultiver les kleros de terre des Homoioi,
à qui ils devaient fournir une partie des récoltes (céréales, vin et huile). On les rencontrait aussi dans l’armée, comme
auxiliaires dans l’infanterie légère ou dans la flotte, dans le rang des rameurs. Avec la diminution du nombre de citoyens, les
hilotes suite à leur service comme
hoplites dans
l’armée Lacédémonienne furent affranchis par l’État, on les appela alors Néodamodes. Les Éphores pouvaient les
faire mettre à mort, selon Thucydide, en 425,
2.000 hilotes auraient été massacrés en secret. Ce qui est sûr c’est qu’ils étaient
particulièrement mal traités par les Spartiates. L’hilotisme se rencontre également dans d’autres sociétés Grecques, comme
la Thessalie,
la Crète, ou encore la Sicile.
Les Éphores
Les
Éphores (ou éphoroi, en Grec : Eφοροι), dont le nom veut dire “les surveillants“, étaient un
directoire de cinq Magistrats annuels, dont ils formaient le véritable gouvernement. On ne connait pas exactement
la date de leur création, ils existent déjà au VIe siècle av.J.C. Les différentes sources ne s’accordent pas sur ce point. Pour
Hérodote (Historien Grec, v.484-v.425) et
Xénophon (Philosophe, historien et maître
de guerre Grec, v.430-v.355) ce fut une création de Lycurgue. Pour
Aristote (Philosophe Grec, 384-322), au contraire,
l’institution fut créée par le Roi
Théopompe (v.720-v.675) des
Eurypontides. L’éphorat fut supprimé en 227 par
Cléomène III, puis rétabli par le Roi de
Macédoine
Antigonos III Dôson (229-221) avant d’être
définitivement aboli par l’Empereur Romain Hadrien (117-138). Il y avait cinq Éphores, qui étaient élus pour un an parmi les
citoyens et ne pouvaient être réélus, ils exécutaient les décisions de l’assemblée et les décisions étaient prises à la majorité.
Ils avaient juré fidélité au Roi mais étaient chargés de surveiller ses agissements en temps de guerre et vérifier que ce dernier
appliquait bien la constitution. Ils contrôlaient également, les Hilotes,
les Périèques et les Magistrats. Ils représentaient la souveraineté
nationale et avaient en charge : La politique étrangère, dirigeaient la police et surveillaient les citoyens dont ils exigeaient
une parfaite obéissance. Ils pouvaient révoquer des personnes s’ils les estimaient incompétentes, quel que soit le poste occupé.
Ils avaient même le pouvoir de faire emprisonner un Roi. Ils jugeaient aussi les affaires
de droit civil et pouvaient distribuer des amendes.
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La Gérousie
La
Gérousie (ou Gérousia ou Gerousía, de gérôn, en Grec : γέρων “le vieillard“) fut l’équivalent
Spartiate du Sénat, ce fut une assemblée aristocratique, par opposition à celle du peuple. C’était un conseil de 28 hommes âgés
de plus de 60 ans, les Gérontes (En Grec : γέροντες), élus à vie, par acclamation,
présidé par les deux Rois. Les Gérontes étaient recrutés dans les plus grandes familles. La procédure de recrutement est décrite
par Plutarque
(Philosophe, biographe et moraliste Grec, 46-v.125) dans sa “Vie de Lycurgue“. Cette limite d’âge correspondait à la fin de
l’astreinte du service militaire.
Le statut de Géronte était censé être réservé aux hommes les plus dignes. Une fois élu, le nouveau Géronte, la
tête couronnée, visitait les sanctuaires Spartiates, accompagné d’un cortège de jeunes gens qui célébraient ses mérites. La
Gérousie exerçait de grands pouvoirs politiques et judiciaires et constituait le tribunal suprême. Elle jugeait les crimes
graves (Meurtres, procès politiques). En association avec les Éphores, elle
pouvait juger aussi les Rois et départager des rivaux au cours d’une succession royale.
C’est elle qui dirigeait la politique étrangère et formulait les propositions soumises
à l’assemblée dont elle pouvait casser le vote en usant de son droit de veto. Dans la réalité, l’importance de la
Gérousie fut assez exagérée dans les textes des auteurs anciens.
Démosthène (Homme d’État
Athénien, 384-322), Eschine (Homme politique
Athénien, v.390-314),
Pindare (Poète lyrique Grec, 518-438), Platon
(Philosophe Grec, 427-346) etc… insistent sur le pouvoir et l’autorité des Gérontes, mais leur rôle politique était assez
limité. Les textes anciens évoquent rarement la Gérousie et on trouve peu de traces de son intervention dans le domaine
législatif. La politique étrangère étant généralement décidée par les Rois ou les
Éphores, la Gérousie semble donc avoir eut, un pouvoir assez faible.
L’éducation Spartiate
Sparte était avant tout un état
militariste et l’accent était mis sur l’aptitude militaire presque à la naissance. Selon
Plutarque (Philosophe, biographe et moraliste Grec,
46-v.125), peu de temps après celle-ci, la mère de l’enfant le baignait dans le vin pour voir si le nourrisson était fort. S’il
survivait, il était porté devant la Gérousie par son père. Celle-ci décidait
ensuite s’il devait être élevé ou non. S’il était jugé “chétif et difforme”, le nouveau-né était considéré comme une bouche
inutile et une charge pour la cité et était jeté dans un gouffre, sur le mont Taygète, appelé par euphémisme : apothètes
(ou apothetæ ou apothetēs, en Grec : ἀποθέτης”
dépôts“). C’était une forme primitive d’eugénisme (Amélioration des caractères héréditaires de l’espèce humaine par une
intervention délibérée).
Il existe des preuves de ces pratiques sur des enfants non désirés dans d’autres régions de Grèce,
notamment à Athènes. Mais pour Sparte cette
affirmation, étant rapportée par le seul
Plutarque, elle est aujourd’hui remise en doute par quelques archéologues, qui n’ont trouvé aucun ossement d’enfant à
l’endroit indiqué. L’éducation par la suite était obligatoire, collective et organisée par la cité, elle visait à former des
soldats disciplinés, efficaces et attachés aux biens de la cité. De ce fait, l’armée Spartiate était renommée comme la plus
puissante du monde Grec. Lorsque les Spartiates mourraient, seule une pierre tombale était accordée aux soldats qui étaient
morts au combat au cours d’une campagne victorieuse.
Statuette d’un athlète Spartiate – Musée du Louvre
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Les garçons, l’agôgê
L’éducation Spartiate ou agôgê (ou agōgē, en Grec :
ἀγωγή) était accessible aux hommes citoyens de Sparte. Elle présentait les
particularités d’être obligatoire, collective et organisée par la cité. Les garçons jugés robustes, après avoir été élevés par
des nourrices commençaient leur formation militaire à l’âge de sept ans, âge où ils étaient enlevés à leur famille et entraient
dans le système agôgê. L’agôgê était conçue pour encourager la discipline et la résistance physique et souligner l’importance de
l’État Spartiate. Cette forme d’éducation est établie par Lycurgue et ne prendra fin qu’à l’époque Romaine. Cependant elle reste
encore mal connue. La plupart des sources en notre possession sont tardives. Nous savons que l’agôgê a connu au moins une
interruption, imposée par la
Ligue Achéenne au IIe siècle av.J.C.
Il est donc difficile de savoir dans quelle mesure les descriptions Hellénistiques et Romaines
peuvent également s’appliquer à la période archaïque et classique. En plus de l’apprentissage physique et de l’art de la
guerre, où ils apprenaient à manier les armes, à marcher en formation, et surtout à obéir aveuglément aux supérieurs, les
études des garçons portaient sur la lecture, l’écriture, la musique, la danse et le chant. Essentiellement, les élégies
de Tyrtée, qui servaient de chants de marche.
Lanceur de javelot – 525-500 – Temple d’Apollon
Hypertéléatas – Musée du Louvre
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Pendant l’adolescence, on mettait plutôt l’accent sur la pudeur,
la décence. Vers l’âge adulte, on insistait sur l’émulation et la compétition, principalement pour devenir l’un des
Hippeis “cavalier” de la garde royale. Ils vivaient à la dure, le crâne rasé et ils ne percevaient qu’un manteau
(ou himation) par an et marchaient pieds nus. Bien que les garçons habitaient dans des sortes de “cantines” ils étaient
sous-alimentés afin de les encourager à maîtriser leurs envies de vol de nourriture. Ils dormaient sur une paillasse de
roseaux de l’Eurotas qu’ils avaient travaillé à la main. Des punitions spéciales étaient imposées, si les jeunes gens
n’arrivaient pas à répondre à des questions sur leur éducation.
Divers concours, combats rituels, flagellations au sanctuaire d’Artémis Orthia etc… visaient
à mettre en avant les plus vigoureux et les plus endurants à la douleur. Cette éducation entendait former des soldats
obéissants, efficaces et attachés à la cité, avant leur gloire ou leur bien-être personnel. À l’âge de douze ans, les
garçons Spartiates, toujours dans le cadre de l’agôgê, étaient obligés de prendre un “ancien” comme mentor, généralement
un homme célibataire. Il était prévu pour fonctionner comme une sorte de père de substitution et être un modèle à son
partenaire, mais il a été également mis en avant que certains avaient des relations sexuelles entre eux (La nature exacte
de la pédérastie Spartiate n’est pas entièrement claire).
À l’âge de dix-huit ans, les jeunes garçons Spartiates devenaient membres de l’armée de réserve.
En quittant l’agôgê après leur 20 ans, ils demeuraient embrigadés et intégraient les groupes de
Sphareĩs (“joueurs de ballon“). Cet entraînement fit des Spartiates les soldats les plus redoutés de toute la Grèce
classique. Après quoi certains étaient envoyés dans la nature avec seulement un couteau et étaient forcés de survivre grâce à
leurs seules compétences et leur ruse. Cette autre formation était appelée la Krypteia. Les hommes Spartiates étaient tenus de
se marier à l’âge de 30 ans, après avoir achevé la Krypteia.
Plutarque rapporte les coutumes associées
à la nuit de noces.
Les filles
Nous
avons moins d’informations concernant l’éducation des jeunes filles Spartiates, mais elles
semblent avoir fait l’objet d’un assez vaste cycle d’éducation formelle, largement semblable à celui des garçons, mais avec
bien sur moins d’accent sur la formation militaire. À cet égard, la Sparte classique est unique dans la Grèce antique. Dans
aucune autre cité-État les femmes recevaient une éducation formelle. Cette éducation
fut instituée à l’époque archaïque et elle se poursuivit à l’époque classique. Elle fut interrompue à l’époque Hellénistique et
reprit probablement à l’époque Romaine. L’objectif était de faire des femmes Spartiates des mères capables de produire des
enfants (surtout des mâles), sains et vigoureux, futurs soldats ou futures mères. L’éducation était dispensée à toutes les filles.
Vestiges d’un mur de la cité
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Contrairement aux garçons, elles restaient dans le foyer familial et
disposaient donc d’une forme de loisirs et de vie privée. Les jeunes filles consacraient leur apprentissage, probablement auprès
de leur mère et d’autres femmes de leur famille, à la danse et à la musique. Des figurines votives montrent des femmes jouant
d’un instrument à vent, à cordes ou des percussions, et la poésie et le chant étaient appris en même temps. À l’époque archaïque,
Sparte fit également venir des poètes, comme Alcman (Poète lyrique Grec), chargés d’apprendre aux jeunes filles à prendre part
aux chœurs.
À l’époque classique, on connaît quelques exemples de femmes sachant lire et écrire.
Hérodote nous indique que ce fut le cas de la fille
du Roi Cléomène I (520-490), Gorgô qui était la femme de son
frère Léonidas I (490-480). Il raconte que lorsque le Roi
Démarate (v.515-491) était en exil auprès du Roi
Perse
Xerxès I (486-465), il voulut
prévenir les Grecs de la menace qui pesait sur eux, il envoya un message secret à Sparte, sous la forme d’une tablette de
cire. Gorgô eut l’idée de faire gratter la cire, révélant ainsi le véritable message gravé sur le bois. D’après d’autres
écrits il semble que les femmes Spartiates en général savaient effectivement lire.
Plutarque (Philosophe, biographe et moraliste Grec,
46-v.125) cite également des lettres envoyées par des mères Spartiates à leurs enfants soldats. Même si le contenu édifiant de
ces missives peut sembler douteux, il paraît raisonnable que mères et fils correspondaient par lettres pendant les conflits.
On connaît deux poétesses Spartiates, toutes les deux de l’époque archaïque : Mégalostrata, citée par Alcman et Clitagora,
mentionnée par Aristophane (Poète comique Grec, v.450-v.385) et Cratinos (Poète Grec, v.520-423). À l’époque classique, Chilonis,
fille de Chilon, l’un des
Sept Sages, fit partie des disciples de Pythagore (Mathématicien et Philosophe Grec, v.580-v.497)
et Jamblique (Philosophe néo-platonicien, 242-325) mentionne 17 ou 18 pythagoriciennes Spartiates.
Par le fait de leurs
connaissances les femmes jouissaient d’un statut, d’un certain pouvoir et du respect, ce qui était inconnu dans le reste du
monde classique. Elles contrôlaient leurs propres propriétés, ainsi que les propriétés des hommes de la famille lorsqu’ils
étaient éloignés par l’armée. Il est estimé que les femmes étaient les seules propriétaires d’au moins 35% de toutes les
terres et des biens de Sparte. Les lois concernant le divorce étaient les mêmes pour les hommes et les femmes. Contrairement
aux femmes à Athènes, si une femme n’avait pas de frère
elle devenait l’héritière de son père.
Dessin de Peter Connoly –
Greece and Rome at war – London, 1981, p. 22
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L’armée
La force militaire de Sparte
a fait de la ville l’une des principales cités-États de la Grèce.
L’armée était au centre de l’État, dont l’obligation première des citoyens était d’être de bons soldats. Tous les citoyens
en âge de porter les armes devenaient des
hoplites
(L’infanterie lourde des cités) à temps plein. Seule capable de mener à
bien des manœuvres complexes sur le terrain, elle apparaît aux Grecs comme un modèle d’efficacité et de discipline. Grâce
à leur formation dès la petite enfance, les Spartiates faisaient de leur armée l’une des plus disciplinées et la mieux
entraînée. Ils étaient craints des forces militaires de tout le monde antique. À l’apogée de la cité, du VIe au IVe siècle
av.J.C, il était communément admis qu’un Spartiate avait la valeur de plusieurs hommes d’un autre État.
Plutarque (Philosophe,
biographe et moraliste Grec, 46-v.125) écrit que la seule réputation
des hoplites Spartiates : “Frappait d’effroi leurs adversaires qui,
même avec des forces égales, ne se croyaient pas capables de lutter sur un pied d’égalité contre l’armée Spartiates“.
Les citoyens Spartiates, les Homoioi, furent le noyau de l’armée,
bien qu’au cours du Ve siècle, les Hilotes, qui normalement appartenait à
la classe de serfs utilisés à cultiver les kleros Spartiates, furent enrôlés comme soldats dans des escarmouches. Ils
participèrent même à l’Assemblée (ou Apella), ce qui est étrange car ils étaient censés être des soldats et rien d’autre,
interdit d’apprendre ou d’exercer tout commerce.
L’origine
Notre
source principale pour l’organisation de l’Armée et les tactiques qu’elle utilisait est
Xénophon (Philosophe, historien et
maître de guerre Grec, v.430-v.355), qui admirait les Spartiates et dont la “Constitution
de Sparte” offre un aperçu détaillé de l’État et la société Spartiate au début du IVe siècle av.J.C. D’autres auteurs,
notamment Thucydide (Homme politique et
historien Athénien, v.460-v.395), vont nous fournir également des informations, mais elles ne sont pas toujours aussi fiables
que celles de Xénophon. De ces écrits, il en ressort
qu’en fait on sait peu de choses de l’ancienne organisation.
Il y a encore aujourd’hui beaucoup de spéculations.
Les premières formes d’organisation sociale et militaire (au VIIe siècle) semble avoir été les trois tribus : Hylleis,
Dymanes et Pamphyloi qui apparaissent lors de la
Deuxième Guerre de Messénie (685-668
ou 670-657 ou v.650-620). Une autre subdivision fut la fraternité (ou phratra). Finalement, ce
système fut remplacé par cinq divisions territoriales, l’obai “villages“, qui fournissait un contingent de 1.000 hommes
chacune. Cette organisation fut encore utilisée au cours des
Guerres Médiques (499-490 et 480-479).
Composition et tactiques
Sur
le champ de bataille, les
hoplites étaient donc groupés par sections,
les énomoties, qui comptaient normalement un représentant de chaque classe mobilisée. Elles se déployaient par ordre
d’âge croissant, les jeunes se trouvant au premier rang. Les changements dans l’organisation qui eurent lieu entre les
Guerres Médiques contre les
Perses et la
Guerre du Péloponnèse (431-404)
ne sont pas documentées, mais, selon
Thucydide, qui décrivit de manière détaillée
la composition de l’armée, à la
bataille de Mantinée
en 418 av.J.C :
“Il y avait au combat …. 7 lochoi (ou loches ou lochos [bataillons]) subdivisés en 4 pentēkostys (ou
pentécostyes [compagnie]) composées chacune de 4 groupes, les enōmotiai (ou énomoties) de 32 hommes, soit un total de
3.584 hommes. Pour chaque groupe, quatre hommes combattaient au premier rang. En ce qui concerne la profondeur, ils n’étaient
pas tous rangés de la même manière, cela dépendait de chaque chef de bataillon, mais, en règle générale, ils se mirent sur
huit rangs”.
À la fin de la
Guerres du Péloponnèse, la structure évolua,
à la fois pour remédier à la pénurie de main-d’œuvre et pour créer un système plus souple qui permettait d’envoyer des
petits détachements sur la campagne ou en garnisons en dehors de leur patrie. Pour
Xénophon qui, tout comme
Thucydide, était un officier combattant,
à cette époque, il n’y avait que 2 enōmotiai (ou énomoties) mais de 36 hommes, pour 1 pentécostyes (ou pentēkostys)
et 2 pentékostyes pour 1 lochoi (ou loches ou lochos), et 4 lochoi pour un mora (ou more) “régiment” soit 576 hommes
qui était commandé par un Polémarque et 6 moras formaient une armée en campagne, à laquelle s’ajoutaient les Skiritai
(Habitant de la Skiritide) et les contingents d’États alliés.
Au combat les Rois étaient accompagnées par un groupe de 300 hommes de la garde royale, qui
étaient appelés hippeis “cavaliers“. En dépit de leur titre, les Rois
étaient comme tous les
hoplites dans l’infanterie
Spartiates. En effet, les Spartiates ne vont pas utiliser de cavalerie jusqu’à la fin de la
Guerres du Péloponnèse où de
petites unités de 60 cavaliers vont être attachées à chaque mora.
L’hippeis appartenait à la première mora et l’élite de
l’armée Spartiate, déployée sur le côté droit de la ligne de bataille. Les hippeis étaient sélectionnés chaque année par
un fonctionnaire spécialement accrédité, l’hippagretai, parmi les hommes qui avaient plusieurs fils, de sorte que sa lignée
se poursuivait.
Ce fut des hippeis qui accompagnèrent le Roi
Leonidas (490-480) dans son célèbre dernier combat
de la Bataille des Thermopyles.
Comme les autres États Grecs, l’infanterie de l’armée Spartiate, avait une tactique dans la
lutte basée sur la formation en phalange. Les Spartiates eux-mêmes n’ont pas introduit de changements importants ou
d’innovations en matière de tactique guerrière, mais leur constante ténacité et la discipline leurs ont permis de faire de
superbes phalanges beaucoup plus cohérentes et efficaces. Les Spartiates employaient la phalange dans le style classique,
en une seule ligne, de manière uniforme avec une profondeur de 8 à 12 hommes.
Vêtements et armement
Les
Spartiates utilisaient le même type d’équipement pour leurs
hoplites que
leurs autres voisins Grec : Bouclier rond, casque souvent représenté portant une crête transversale de crin, cuirasse, lance,
xiphos (Courte épée de 30 cm. environ servant d’arme secondaire) et cnémides (Éléments de protection des tibias). Les seules
caractéristiques distinctives Spartiates étaient leurs tuniques (ou chiton) et un manteau court de couleur pourpre (ou himation).
Les cheveux longs, que les Spartiates conservaient étaient commun à la plupart des Grecs. Pour les Spartiates cela
représentait le symbole d’un homme libre. Une autre caractéristique très connue des
hoplites Spartiates était le symbole,
adopté en 420 av.J.C, la lettre lambda (Λ), peinte sur le bouclier, pour Laconie ou Lacédémone. Il semble que chaque cité
avait adopté son propre signe.
Reconstitution d’une phalange Spartiate
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Il est souvent contesté, par quelques spécialistes, une armure de torse
qu’auraient portée les Spartiates au cours des
Guerres Médiques contre les
Perses. Cependant cela semble très probable,
qu’ils utilisaient des cuirasses de bronze sculptées du type linothorax. Au cours de la fin du Ve siècle av.J.C, quand la guerre
est devenue plus souple et à grande échelle et que les affrontements de phalanges sont devenus rares, les Grecs ont abandonné
la plupart des formes d’armure.
Le Lacédémonien a adopté une nouvelle tunique, l’exōmis, qui était aménagée de telle façon
que les bras à la hauteur de l’épaule soient plus libres d’action dans le combat. Les Spartiates ont conservé la phalange
hoplite traditionnelle jusqu’aux réformes de Cléomène III
(235-219) lorsqu’il a rééquipé l’armée avec la sarisse
Macédonienne et reformé la phalange dans le même style.
La marine
Les
Les Spartiates furent une armée de terre par excellence. Au cours des
Guerres Médiques contre
les Perses, ils ont toutefois constitué
une petite marine de 20 trirèmes, mais ils se reposaient pour la guerre navale en grande partie sur leurs alliés, principalement
les Corinthiens. Ce fait signifie que,
lorsqu’éclata la Guerre du Péloponnèse
(431-404), les Spartiates eurent de suite la suprématie sur terre, alors que les
Athéniens avaient la maitrise des mers.
Les Spartiates ravagèrent l’Attique, mais les Athéniens
réussirent à se maintenir grâce aux ravitaillements par la mer et purent pratiquer leurs propres raids autour du Péloponnèse
avec leur marine.
Trirème – Mosaïque au Musée du Bardo – Tunis
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Ces faits poussèrent Sparte à la création, avec
l’or Perse, d’une marine de guerre afin de
contenir Athènes. Le Spartiate
Lysandre en fut nommé Navarque (Commandant).
Il écrasa la flotte Athénienne à
la
bataille d’Aigos
Potamos en Septembre 405. La même année le Roi
Agis II (426-398)
mit le siège devant Athènes. La prédominance
de cette cité en mer Égée fut rompue. La suprématie Spartiate sur mer fut cependant de courte durée et ne survécu à la
Guerre de Corinthe.
En 394 une bataille à Cnide, sur les côtes de
Carie au bord du golf
Céramique, opposa les flottes
Perse et Spartiate.
Ces derniers furent battus et perdirent 50 navires marquant la fin de leur brève suprématie navale.
Le coup de grâce fut donné 20 ans plus tard, lors de la bataille de Naxos en 376. Une petite flotte fut mise sur
pieds périodiquement par la suite, mais son efficacité resta limitée, la dernière renaissance de la puissance navale
Spartiate se fit sous le Tyran Nabis (207-192) qui, avec l’aide de
ses alliés Crétois créa une flotte pour contrôler les côtes de Laconie.
Buste d’un hoplite casqué –
Musée archéologique de Sparte.
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Les
hoplites
L’hoplite
(ou hoplítês, en Grec : Oπλίτης, de hóplon “arme“) fut un soldat lourdement armé, par
opposition au gymnète qui fut un fantassin léger. Les
hoplites constituèrent l’infanterie lourde des cités Grecques antiques.
Ils combattaient en phalange, formation qui se répandit dans toute la Grèce, probablement de 700 à 650. Cette datation
traditionnelle se fonde sur un passage de “la Politique”
d’Aristote (Philosophe
Grec, 384-322) évoquant le remplacement des combattants à cheval par la phalange hoplitique. Ce qui est certain c’est
que des évolutions ont eu lieu à cette époque dans l’armement. La cuirasse fut modifiée, le bouclier se vit adjoindre
une seconde courroie, permettant une meilleure prise.
On assista aussi à l’incorporation de non nobles dans les
hoplites et l’entraînement régulier
requis pour pouvoir effectuer des manœuvres en formation donna à la classe moyenne un sens de cohésion qui eut d’importantes
conséquences politiques : Les Hippeis (ou cavaliers) de la garde royale perdirent leur prestige et les
hoplites réclamèrent
un rôle plus grand dans le gouvernement. Puisque cette classe sociale participa à la défense de la cité, elle eut
logiquement la parole lorsqu’il s’agit de partir en guerre. Les
hoplites accédèrent également à d’autres domaines de la vie
politique dans les cités démocratiques.
L’équipement des
hoplites, qui avoisine les 35 kg, comprenait : Un bouclier rond, un casque souvent
représenté portant une crête transversale de crin, une cuirasse qui se répandit jusqu’en Étrurie et à Rome vers la fin du VIIe
siècle, une lance, une xiphos (Courte épée de 30 cm environ servant d’arme secondaire) et des cnémides (Éléments de protection des
tibias). Presque tous les hommes célèbres de la Grèce antique, dont les philosophes et les dramaturges, ont combattu comme
hoplites. Les plus connus étaient les
hoplites Spartiates, qui étaient formés au combat et à l’art de la guerre dès l’enfance.
Cette formation ajoutée à une très grande discipline ont donné aux
hoplites Spartiates une incontestable suprématie pendant
des siècles.
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Pour plus de détails voir :
L’hoplite
et la constitution militaire dans la Grèce classique |
Bibliographie
Pour d’autres détails sur la
ville voir les ouvrages de :
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– Probouleusis, Sparta’s contribution to the technique of government, Clarendon Press, Oxford, 1954.
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– L’odyssée de l’éducation spartiate, Historical publ. St D. Basilopoulos, Athènes, 1999.
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– Glōssikē agōgē,Vivliopōleio Kērēthres, Trikala, 1991.
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– Das erziehungssystem im alten Sparta : Die Agoge,Grin Verlag GmbH, München, 2008.
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– Ancient Sparta : A re-examination of the evidence, University Press, Manchester, 1999.
Voir la bibliographie sur l’histoire de Sparte à :
Sparte, les Agiades –
Sparte, les Eurypontides |