Les  cités d’Attique :
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Mégare

 
Localisation et généralités

 
   Mégare (ou tà Mégara, En Grec : τ Μέγαρα) fut une cité de l’Attique, capitale de la Mégaride. Elle était située à l’extrémité Est de l’isthme de Corinthe, au milieu d’une étroite plaine fertile au pied des monts Géraniens, à mi-chemin entre Corinthe et Athènes, à 2 km. du golfe Saronique, en face de l’île de Salamine. Elle est connue à l’origine sous le nom de Nisée (ou Nisaea ou Nísaia, en Grec : Νίσαια), d’après le Roi éponyme légendaire Nisos (Fils de Pandion et de Pylia). La ville antique occupait une colline basse à deux sommets, chacun comportant une acropole (ou une citadelle). Celle de l’Est s’appelait Caria, celle de l’Ouest Alcathoé. Mégare fut le point de passage terrestre entre la Grèce centrale et le Péloponnèse. Grâce à cela la cité acquit rapidement de l’importance. Ses deux ports, l’un sur le golfe Saronique, dénommé Nisée (ou Nisaea), qui abritait l’îlot fortifié de Minoa et l’autre sur le golfe de Corinthe, Pagae (En Grec : Παγαί), en firent un centre commercial de première importance. De longs murs, qui furent construits en 459, reliaient la ville aux ports.
 
   Le territoire de Mégare s’étendait sur la plus grande partie de l’isthme, depuis la frontière de Corinthe jusqu’au pied du mont Cithéron (Roi de Platées qui donna son nom au mont) qui séparait de ce fait la Béotie de la Mégaride. Outre la capitale Mégare, la Mégaride comprenait les villes d’Aegosthène et Pagae sur le golfe Corinthien, Rhus et Tripodisca à l’intérieur du pays et le fort de Géraneia et Phibalis à la frontière avec l’Attique. Mégare fut tournée plus vers l’Égée que vers l’Occident. Ce fut en Sicile orientale qu’elle fonda sa plus ancienne colonie, Mégara Hyblaea (ou Megara Hyblaia). Mais ses comptoirs les plus importants se trouvaient en Propontide (ou mer de Marmara) et dans la région du Pont, où les Mégariens fondèrent Byzance, Chalcédoine et Héraclée du Pont. Elle connut une grande prospérité sous son Tyran Theagènes (ou Théagène) au VIIe siècle. Ses démêlés avec Athènes engendrèrent en partie la Guerre du Péloponnèse.
 
    Elle possédait une école de philosophes, l’école Mégarique, fondée par Euclide (Mathématicien Grec, 325-265) et Aristote (Philosophe Grec, 384-322). La ville basse était alimentée par un aqueduc, construit par Theagènes. On y trouvait le gymnase, les temples d’Artémis Soteira, avec les statues des Empereurs Romains, d’Aphrodite, de Dionysos, de Zeus Olympien, l’herôon d’Alcathoos, etc… Sur la citadelle de Caria ce trouvait le temple de Déméter (Le Mégaron). Au Nord le tombeau supposé d’Alcmène, le bouleutérion, le temple d’Athéna et plusieurs autres temples. De tous ces monuments il ne reste aujourd’hui malheureusement presque rien.

 

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L’histoire…..

 
   Selon la tradition les premiers résidants de la cité furent les Cariens, puis les Lélèges (Peuple maritime métissé). La légende parle de souverains éponymes : Car, Lelex, Pylas, contemporain du Roi d’Athènes Panilion, puis Sciron, Nisus, Mégareus, fils (ou gendre) de Poséidon. Nisus fut tué lors d’une bataille contre le Roi de Crète Minos et sa capitale fut détruite. Elle fut reconstruite par Alcathoos, un fils de Mégareus. C’est lui qui fit construire aussi la seconde citadelle. Le dernier Roi aurait été Hypérion, fils d’Agamemnon, après son règne la démocratie fut instaurée dans la ville.
 
   Ce que l’on sait de la suite de l’histoire de Mégare et de sa région nous vient d’Homère (Poète Grec de la fin du VIIIe siècle). La Mégaride était une partie de l’Attique et en fut détachée par l’invasion des Doriens, qui selon la tradition envahirent la région vers 900. Ces derniers furent arrêtés par le Roi d’Athènes, Codros (ou Kodros ou Codrus, 17e Roi légendaire) qui mourut au cours de la bataille. Par la suite s’établirent à Mégare des colons venus de Corinthe et de Messénie. La cité fut d’abord dépendante de Corinthe, puis, au VIIe siècle, se libéra de cette tutelle et annexa les cantons voisins des Cynosuriens, des Héréens, des Piréens et des Tripodiscéens.
 
   Elle connut alors une grande prospérité sous son Tyran Theagènes (ou Théagène, v.630 à v.600). À cette époque ce fut une des plus importantes cités Grecques, grâce a son commerce et à ses colonies. Mégare en installa en Sicile, en Thrace et dans la région du Pont. Elle fonda : Astacos et Byzance (Sur le Bosphore), Chalcédoine (En Bithynie, face à Byzance), Cyzique (En Mysie, sur la Propontide, actuelle mer de Marmara), Héraclée du Pont (En Bithynie, sur le Pont-Euxin, actuelle mer Noire), Sélinonte et Mégara Hyblaea (ou Megara Hyblaia, sur la côte Est de la Sicile, près de l’actuelle Augusta, au Nord de Syracuse), etc…
 
   Theagènes arriva au pouvoir avec l’aide des pauvres. Il établit une Tyrannie et gouverna contre les riches propriétaires fonciers. Cette Tyrannie fut suivie de luttes politiques. À la même époque débutèrent les querelles acharnées entre Mégare et Athènes. En 570, la première cause de brouille fut l’île de Salamine qui était la possession de Mégare, mais qui fut conquise par l’Athénien Solon (640-558).

 

   Les Mégariens prirent part à la Deuxième Guerre Médique (482-479) en apportant 20 navires et 3.000 Hoplites. En 460, ils firent la guerre aux Corinthiens pour une querelle de frontière et se mirent, pour un temps, sous le protectorat d’Athènes. Ce fut à cette époque, en 459, que les Athéniens bâtirent les longs murs qui réunissaient Mégare à son port de Nisée (ou Nisaea), un peu comme ceux qu’ils construisirent entre leur cité et le port du Pirée,.et il installèrent une garnison au port de Pagae, sur le golfe Corinthien. Après la défaite des Athéniens, battus par les Béotiens à Coronée (447), en 445, le parti Péloponnésien reprit le dessus. Il massacra la garnison Athénienne et obtint dans la Trêve de trente ans l’évacuation des ports de Nisée (ou Nisaea) et de Pagae. La rupture avec Athènes fut dès lors définitive.
 
   La Ligue du Péloponnèse, dont Sparte était maître, allia entre autres les cités d’Argos, de Corinthe, de Thèbes et de Mégare (Un peu avant 500). Cette ligue avait pour but de contrer la suprématie d’Athènes. Cette dernière qui était entrée en guerre contre la cité de Potidée, obligea la ville à raser ses murailles. Potidée se révolta et reçut le soutien officieux de Corinthe. Dans le même temps, Athènes interdit l’accès de l’Attique et de ses ports aux marchands de Mégare. Elle reprochait à la cité de soutenir son adversaire Corinthe et d’accueillir les esclaves fugitifs. Mégare, comme Corinthe, firent alors appel à Sparte, qui sous la menace de voir deux de ses principales alliées quitter la Ligue du Péloponnèse, mobilisa la Ligue

   Ce sont ces fait qui firent éclater en 431 la Guerre du Péloponnèse éclata, elle ne se termina qu’en 404. Dès 431, pour sa position stratégique, point de passage terrestre entre la Grèce centrale et le Péloponnèse, Mégare fut attaquée. Lors de la première invasion avec 10.000 soldats Athéniens et de nombreux alliés, Athènes créa un fort sur l’île de Salamine, près du port de Nisée (ou Nisaea), et commença un blocus maritime. On soupçonne qu’Athènes empêcha l’approvisionnement alimentaire pour prendre le contrôle de Mégare et prévenir d’autres invasions de l’Attique par les Péloponnésiens. La population de Mégare souffrit beaucoup de cette guerre. Son territoire fut chaque année dévasté par les Athéniens. Les Mégariens avaient encore le contrôle du port de Pagae, sur le golfe de Corinthe, mais la ville restait isolée pour des approvisionnements alimentaires occidentaux, ce qui rendait impossible la fourniture nécessaire de nourriture pour les habitants et la situation devint vite désastreuse pour eux.
 
   En 429, la situation étant désespérée, pressée par l’oligarchie Mégarienne, la flotte de la Ligue du Péloponnèse dirigée par le Général Spartiate Brasidas (En Grec : Βρασίδας, †422), attaqua le fort Athénien sur l’île de SalamineAthènes dépêcha alors une flotte partant du port du Pirée afin de contrer l’attaque. La flotte de la Ligue perdant son effet de surprise abandonna son action d’invasion, la vétusté des navires Mégariens la rendant trop vulnérable. En 427 l’Athénien Nicias (ou Nikias, en Grec : Νικίας, homme politique et Général Athénien, v.470-413) réoccupa le port de Nisée (ou Nisaea).

 
   En 427/26, le parti pro-Spartiate de Mégare dut faire face au parti démocratique (Allié d’Athènes) de la ville. Mégare perdit la ville portuaire de Minoa, protégée par le port fortifié de Nisée (ou Nisaea) au profit d’Athènes. Cette perte fut un facteur décisif des troubles civils qui suivirent. Peu après, une émeute des démocrates eut lieu à Mégare. L’oligarchie pro-Spartiate fut exilée et de nombreux exilés eurent l’autorisation par Sparte d’habiter la ville Béotienne de Platées pendant un an. Cette petite révolution ne conduisit toutefois pas Mégare à entrer dans le camp d’Athènes, mais lui laissa l’occupation du port Nisée (ou Nisaea) et de l’île de Minoa. Les Spartiates furent ensuite en mesure d’empêcher les interactions entre les Mégariens démocrates et les Athéniens sur Minoa. Ceux exilés à Platées, commencèrent des raids au Nord en Mégaride et sur Pagae. Avec des sympathisants encore dans la ville, les oligarques pro-Spartiate retournèrent à Mégare et la démocratie s’effondra.
 
   Cependant, en 425 Athènes prit Pylos en Messénie (Bataille de Pylos, été 425) détenue par l’armée de la Ligue du Péloponnèse, qui diminua l’importance stratégique de Mégare aux yeux d’Athènes. Les armées de celle-ci avaient également pris au piège avec succès des centaines de Spartiates sur l’île de Sphactérie près de Pylos (Bataille de Sphactérie, automne 425). Les Spartiates retirèrent alors toutes leurs forces militaires de Messine et demandèrent une trêve. Des Ambassadeurs furent envoyés à Athènes sans consulter les alliés de Sparte. Athènes avait des exigences importantes et Sparte demanda de négocier en privé. Les alliés de celle-ci prirent assez mal cette mise à l’écart.
 
   Mégare avait une certaine méfiance envers les Spartiates depuis les émeutes. Les Mégariens craignaient que la ville ne redonne Nisée (ou Nisaea), qui venait à peine d’être récupéré, aux Athéniens. Pendant ce temps, dans Mégare, les démocrates et les alliés de la Ligue du Péloponnèse complotèrent. Le leader du Parti Populaire soumit l’idée d’une nouvelle alliance en faveur d’Athènes, d’autant plus que les longs murs de la ville empêcheraient l’armée Péloponnésienne de commettre des raids. Les rebelles prirent contact avec le Généraux Athéniens Démosthène (ou Dêmosthénês, en Grec : Δημοσθένης, fils de Alcisthènes, † 413) et Hippocrates (En Grec : ‘Iπποκράτης), fils d’Ariphron, v.459-424). À Athènes la tentative de paix des Ambassadeurs Spartiates échoua et le conflit reprit.
 
   En 423, le Général Spartiate Brasidas occupa la ville. Il y rétablit un régime oligarchique et les longs murs furent rasés. En 421, Sparte et Athènes signèrent la paix (Paix de Nicias). Ce fut un succès pour Athènes, qui conserva son Empire intact tandis que ses ennemis étaient divisés, car cette paix ne fut conclue qu’entre Athènes et Sparte. Argos, Corinthe, Mégare et Thèbes refusèrent de la voter, car elle permettait à Athènes de garder ses prétentions territoriales et aux deux nouveaux "alliés" de se mettre d’accord pour modifier le traité comme ils souhaitent, sans en référer à la Ligue du Péloponnèse. Argos créa alors sa propre ligue concurrente de la Ligue du Péloponnèse, dont Mégare fit parti.
 
   Au IVe siècle, les Mégariens semble avoir retrouvé une certaine richesse. Ils passaient pour de pacifiques marchands et propriétaires qui s’adonnaient aux plaisirs de la table. On vantait leurs courtisanes, les Sphinges de Mégare. Mais la cité n’eut plus de véritable rôle politique. Elle resta neutre entre les Athéniens, les Béotiens et les Péloponnésiens. Mégare fut prise et pillée en 307 par le futur Roi de Macédoine Démétrios I Poliorcète (294-287). Bien qu’elle demeura relativement libre, elle subit quand même la domination Macédonienne. Pour tenter de contrer celle-ci, elle adhéra, en 251, à la Ligue Achéenne (ou Ligue Hellénistique), sur l’instigation d’Aratos de Sicyone (271-213).
 
   Quand le Roi de Sparte, Cléomène III (235-219), prit Corinthe, en 223, Mégare se trouva coupée de ses alliés. En 229, à la mort du Roi de Macédoine Démétrios II l’Étolique (239-229), Mégare rejoignit de nouveau la Ligue Achéenne. Après une période, de 224 à 192, où elle la quitta de nouveau, elle resta fidèle à la Ligue jusqu’à sa fin, en 146. Cette année la, pendant la guerre d’Achaïe, Mégare fut prise par le Général Romain Metellus (Quintus Caecilius Metellus Macedonicus). Au Ier siècle av.J.C une colonie Romaine s’y établit, qui prit même une certaine importance. la ville fut encore citée au Ve siècle ap.J.C. et disparut ensuite.

 

   Pour plus de détails voir :  La Ligue Achéenne  (ou Ligue Hellénistique) La bataille de Mégare

 
Bibliographie

 
   Pour d’autres détails sur la ville voir les ouvrages de :
  
Marie Claire Amouretti et François Ruzé :
Le monde grec antique, Hachette université, Paris, 1978.
Hans Rupprecht Goette :
Athens, Attica and the Megarid : An archaeological guide, Routldege, London, New York, 2001.
Barclay Vincent Head et Reginald Stuart Poole :
Catalogue of Greek coins : Attica, Megaris, Aegina, British Museum, Trustees [of the British Museum], London, 1888.
Ernest Leslie Highbarger :
Chapters in the history and civilization of ancient Megara, The Johns Hopkins press, Baltimore, 1927.
Ronald Philip Legon :
Megara : The political history of a Greek city-state to 336 BC, Cornell University Press, Ithaca, 1981.
Adrian Robu, Denis Knoepfler et Alexandru Avram :
La cité de Mégare et les établissements mégariens de Sicile, de la Propontide et du Pont-Euxin : Histoire et institutions, Université de Neuchâtel, Neuchâtel, Janvier 2008.
Adrian Robu :
Mégare et les établissements mégariens de Sicile, de la Propontide et du Pont-Euxin : Histoire et institutions, Peter Lang AG, Internationaler Verlag der Wissenschaften, Bern, 2014.
Philip J.Smith :
The archaeology and epigraphy of hellenistic and roman Megaris, Greece, John and Erica Hedges Ltd., Oxford, 2008.

 

 

Éleusis

 

Localisation et généralités

 


 

Vue du site

  Éleusis (ou Elefsina, en Grec : ‘Eλευσίς) est une ville de l’Ouest de l’Attique. Elle est située à environ 18 km au Nord-ouest du centre d’Athènes, dans la plaine Thriasienne, à l’extrémité Nord du golfe Saronique. Au Nord d’Éleusis on trouve Mandra et Magoula. Dans l’Antiquité Grecque classique, elle fut un dème de l’Attique. Aujourd’hui Éleusis est un centre industriel majeur, avec la plus grande raffinerie de pétrole de Grèce.

 


   Elle est surtout connue pour avoir été le site des Mystères d’Éleusis, l’un des événements religieux les plus célèbres de la Grèce antique, et le lieu de naissance d’Eschyle, l’un des trois grands tragédiens de l’Antiquité. Selon Pausanias (Géographe Grec, v.115-v.180), la ville tira son nom du héros Éleusis (Le fils d’Hermès et d’Ogygos ou l’Océanide Daïra). Quand Perséphone, fille de Déméter, fut enlevée par Hadès, Déméter vint à Éleusis où elle rencontra le Roi du lieu, Céléos. Le fils de Céléos, Triptolème, fut le fondateur des Mystères d’Éleusis, culte agraire rendu à Déméter, qui s’étendit à toute la Grèce et, à l’époque Romaine, à tout l’Empire Romain.

 

L’histoire…..

 
   Les premières traces d’établissements remontent à 2000 av.J.C, la cité se développant au cours de la période Mycénienne dans une grande enceinte fortifiée. Ce fut vers 1500 que le culte de Déméter, divinité liée à la nature et de la culture fut mis en place. Selon la tradition la cité fut rattachée à Athènes lors du synœcisme de Thésée. En réalité, ce rattachement daterait plutôt de la fin du VIIIe siècle ou du début du VIIe siècle. Au cours du VIIIe siècle, le sanctuaire acquis un caractère notable et accueillit la fête panhellénique, il devint l’un des plus importants. Le Tyran d’Athènes, Pisistrate (ou Peisistratos, v.600-527) fit entourer le sanctuaire d’un grand mur renforcé par des tours.


 

Vue du sanctuaire d’Artémis

 
   Selon Hérodote (Historien Grec, v.484-v.425, Livre IX, 65), en 480/479, pendant les Guerres Médiques, la ville fut dévastée par les armées du Roi Perse Achéménide, Xerxès I (486-465) et le temple de Déméter fut brûlé. Elle le fut de nouveau pendant la Guerre du Péloponnèse (431-404), lorsque l’Attique fut envahie par le Roi Pleistoanax (ou Plistoanax, en Grec : Πλειστοάναξ, 458-409). Le sanctuaire de la ville fut d’une grande renommée pour ses Mystères. Après la tyrannie des Trente à Athènes, ceux-ci se réfugièrent à Éleusis où ils ne furent pas inquiétés.
 
   Après une longue période de paix la ville et son sanctuaire redevinrent l’objet de convoitises guerrières à partir du IIe siècle ap.J.C, époque où la pression barbare sur les frontières de l’Empire Romain s’affirmait. Vers 170, Éleusis fut pillée par une tribu Dace, les Coïstoboces (ou Costoboces). L’Empereur Marc Aurèle (161-180) contribua au relèvement du sanctuaire. Enfin, en 395 ap.J.C, Éleusis fut détruite par les Wisigoths du Roi Alaric I (396-410) lorsqu’il ravagea la Grèce.

 

Les vestiges archéologiques

 
   Parmi les monuments que l’on peu encore trouver à Éleusis il y a :
 
Le patio sacré, qui fut le lieu de rencontre des pèlerins et qui ponctuait la Voie Sacrée menant d’Athènes à Éleusis. En son temps elle abritait une structure datant du VIIIe siècle av.J.C dans lequel se trouvaient des autels pour les offrandes aux Déesses et le temple d’Artémis, (IIe siècle av.J.C), dont ne sont conservées seulement que les fondations.
 


 

Autre vue du site

Le propylée (vestibule conduisant à un sanctuaire) majeur, qui fut construit en marbre du Pentélique (Montagne au Nord-est d’Athènes). Sa structure imitait les Propylées de l’acropole de cette dernière. Il est daté de la seconde moitié du IIe siècle av.J.C. d’une inscription sur la façade intérieure dans lequel apparaissent également les noms des Empereurs Romains : Antonin le Pieux (138-161) et Marc Aurèle (161-180). On a retrouvé un buste de celui-ci dans le centre du fronton extérieur. Il a aussi été mis au jour le socle et les bases des colonnes. À l’origine, chacun des côtés du Propylée avait une rangée de six colonnes Doriques surmontées d’un fronton. L’intérieur était divisé en deux cadres séparés par une paroi transversale dans laquelle cinq portes s’ouvraient. Au dehors du porche, deux rangées parallèles de colonnes Ioniques indiquaient la direction du sanctuaire.
 
Le propylée mineur de style Ionique. Il fut construit par le Proconsul Appius Claudius Pulcher. Il s’agissait d’une sorte de vestibule à l’extérieur et un passage couvert était flanqué de deux cariatides (ou caryatide, statue de femme souvent vêtue d’une longue tunique, soutenant un entablement sur sa tête, remplaçant ainsi une colonne, un pilier ou un pilastre).
 
Le temple de Déméter ou Plutonion, les fondations ont été conservées du temple de l’époque de Pisistrate (v.600-527). Une statue de Perséphone qui y fut mise au jour est exposée au Musée d’Éleusis.
 
Le Télestérion (Grande salle pour l’initiation aux Mystères d’Éleusis) était une enceinte avec plusieurs entrées et huit niveaux de sièges sur les quatre côtés. Il permettait aux initiés des Mystères de participer aux rituels assis. Dans le centre se trouvait le mégaron (Pièce principale des habitations), dont seuls les Hiérophantes (Prêtre qui explique les mystères du sacré) pouvaient accéder pour les rites les plus secrets. Les vestiges montrent diverses interventions architecturales entre le Ve et IIe siècle av.J.C.


 

Le Plutonion d’Éleusis

 
L’arc de triomphe qui est une reproduction des arcs Romain ou Athénien. Il fut érigé devant le Propylée majeur. Il date d’après l’an 129 ap.J.C.
 
Le puits de Calíchoron qui fut le lieu, selon Homère (Poète Grec de la fin du VIIIe siècle), où Déméter se reposa lors de sa première visite à Éleusis. Pendant les célébrations en l’honneur de la Déesse des femmes dansaient autour de la fosse. Il est daté de la première moitié du Ve siècle av.J.C.
 
Le Plutonion (ou Ploutonion) était une grotte vénérée en tant que passerelle vers le monde des morts. C’était un mur de soutènement de caractère rituel autour d’une grotte où, selon la tradition, était apparu Pluton, Dieu des enfers. Il fut le lieu d’une représentation de la déclaration annuelle de Perséphone à la terre. Il est daté d’entre la VIe et IVe siècle av.J.C.

 

Les Mystères d’Éleusis

 
   Les Mystères d’Éleusis (En Grec : ‘Eλευσίνια Μυστήρια) faisaient partie d’un culte à mystères dans la religion Grecque antique, de nature ésotérique. Il était effectué dans le temple de Déméter de la ville. C’étaient des cérémonies d’initiation organisées chaque année pour le culte à cette Déesse et sa fille Perséphone. Ils sont les plus célèbres des rites religieux secrets de la Grèce antique. Tout homme ou femme, libre ou esclave, parlant Grec et qui n’avait pas commis d’homicide pouvait être admis à participer aux rituels et y être initié. C’était une grande fête au cours de l’époque hellénistique qui plus tard s’étendit à Rome.


 

Plaque votive en terre cuite peinte
représentant les éléments
des Mystères d’Éleusis – Musée
Archéologique National – Athènes

Photo avant retouches : wikipedia.org

 
   Il est estimé que la base des rituels viendrait d’un vieux culte agraire qui remonte probablement à la période Mycénienne (entre 1500/1450-1200). On pense que le culte de Déméter fut créé vers 1500, et les Mystères représentaient le mythe de l’enlèvement de Perséphone par le Roi des enfers Hadès, dans un cycle de trois phases : la descente (perte), la recherche et la montée, le thème principal étant la montée de Perséphone et les retrouvailles avec sa mère. Les rites, les cérémonies et les croyances ont été gardés secrets et toujours conservés dans l’antiquité. Les initiés croyaient que s’ils préservaient les secrets de la religion, ils connaîtraient eux aussi une vie après la mort à cause de leur initiation à ces mystères et qu’ils auraient une récompense dans l’au-delà.
 
   Il y a beaucoup de peintures et poteries qui représentent différents aspects des Mystères. Certains chercheurs actuels pensent que la puissance et la longévité des Mystères provenaient d’agents psychédéliques que les initiés prenaient ?. Ils ont supposé l’idée d’une consommation contrôlée de grains contaminés par l’ergot de seigle qui aurait été préparée par les Prêtres lors des Mystères. Le carpophore de l’ergot de seigle contient un hallucinogène proche dans sa nature du LSD. On peut souvent voir sur les gravures relatant les Mystères d’Éleusis ou en rapport avec eux, des représentations de personnages sacrés portant à la main des gerbes de blé ou de seigle.
 
   Selon la mythologie Grecque, Hadès enleva Perséphone, au cours d’une cueillette de fleurs dans les prairies d’Enna (Sicile), pour l’épouser et en faire la Reine des Enfers. Les cultures cessèrent de croître dans les champs alors que Déméter parcourait le monde à la recherche de sa fille. Un jour, alors qu’elle errait sur les terres de Grèce sous les traits d’une vieille mendiante, elle entra dans la cité d’Éleusis et demanda l’hospitalité. Les citoyens l’accueillirent avec une grande générosité et, en reconnaissance, la Déesse dévoila sa véritable identité et récompensa ses bienfaiteurs.
 


 

Relief votif en marbre pentélique
trouvé à Éleusis, dédié au sanctuaire
de Déméter et de Korè – Musée
Archéologique National – Athènes

   Elle leur dévoila ses mystères et la maîtrise de l’agriculture. Par la suite, Déméter retrouva Perséphone qui ne put être entièrement libérée des Enfers, puisque ceux qui mangent la nourriture des morts ne peuvent retourner chez les vivants et que Perséphone avait mangé sept pépins de la grenade (fruit associé au mariage) offerte par Hadès. Zeus décréta toutefois que Perséphone passerait la moitié de l’année sur terre (durant la saison des cultures) avec sa mère et le reste de l’année (l’hiver) en compagnie d’Hadès.
 

  Comme la divulgation des rites était strictement défendue et qu’aucun des acteurs ne trahissait les secrets, aucun écrit ne documente avec précision les cérémonies. On célébrait le culte dans le Télestérion d’Éleusis. Les rituels du culte des Mystères étaient toujours accomplis par les Premiers Prêtres de Déméter. Parmi les plus connus d’entre eux, on trouve : Le Roi Céléos (ou Celeus ou Keleus, en Grec : Κελεός) et son fils Triptolème (ou Triptolemus ou Buzyges, en Grec : Τριπτόλεμος, “triple guerrier“), ce dernier à qui Déméter donna la tâche d’enseigner l’agriculture et de semer le blé sur Terre ; le Roi Dioclès (ou Dioklēs, en Grec : Διοκλς) ; Eumolpos (ou Eumolpus, en Grec : Εμολπος) fils de Poséidon et Chione ; et Polyxène (ou Polyxenus ou Polyxeinus, en Grec : Πολύξενος ou Πολύξεινος). L’aspect principal du culte se construisait autour de la culture du blé et le cycle des cultures (entreposage, semis, renaissance).
 
   Annuellement, généralement lieu au printemps, il existait deux célébrations des mystères d’Éleusis : Les Grands Mystères et les Petits Mystères. Les Grands Mystères duraient neuf jours, d’après la durée de l’errance de Déméter à la recherche de sa fille. En Septembre, avant l’automne, on se préparait aux cérémonies préliminaires qui se déroulaient à l’extérieur et qui sont mieux documentées. La première partie du rituel commençait par une procession durant laquelle on transportait des reliques sacrées (les hiéra) jusqu’à Athènes pour les placer dans l’Éleusinion, un sanctuaire à la base de l’Acropole. Les Mystes (Candidats dignes des mystères) se plongeaient dans la mer pour se purifier.
 
   Dans le Télestérion, après avoir rompu le jeûne en consommant le kykéôn (nourriture à base de blé), le rite secret d’initiation avait lieu et les Mystes recevaient des révélations des initiés et accédaient au salut et à la vie après la mort. Il y avait plusieurs niveaux dans l’initiation : Les premiers étaient les Mystes, les nouveaux initiés donc, qui y participaient pour une première fois. Ils y retournaient une seconde fois pour passer à un niveau supérieur, les Époptes. Ces derniers étaient passés à ce niveau et des Prêtres qui présidaient aux rites. Parmi ceux qui dirigeaient la cérémonie, on trouvait 4 ministres : Le Hiérophante, celui qui révélait les choses sacrées, le Dadouque, le chef des Lampadophores (Celui qui porte le flambeau dans les sacrifices), le Hiérocéryce, le chef des Hérauts sacrés et l’Assistant, dont le costume symbolisait la Lune. Le Roi d’Athènes était le surintendant de la cérémonie. Celle-ci était également dirigée par une multitude de Ministres subalternes répartis en différentes classes.
 

  Pour plus de détails voir : Eleusinian Mysteries  (wikipedia – eng)

 

Bibliographie

 
   Pour d’autres détails sur la ville voir les ouvrages de :
  
Marie Claire Amouretti et François Ruzé :
Le monde grec antique, Hachette université, Paris, 1978.
Jan N.Bremmer :
Ancient Mystery cults, De Gruyter, Berlin, 2013.
Maurice Brillant :
Les Mystères d’Éleusis, Renaissance du livre, Paris, 1920.
Walter Burkert :
Ancient mystery cults, Harvard University Press, Cambridge, 1987.
Paul François Foucart :
Les mystères d’Éleusis, A. Picard, Paris, 1914.
Hans Gsänger :
Eleusis, Verlag die Kommenden, Frieburg, 1961.
Karl Kerényi et Ireneusz Kania :
Eleusis : Archetypal, image of mother and daughter, Princeton University Press, 1991 – en Polonais, Eleusis : archetypowy obraz matki i córki, Homini, Kraków, Janvier 2014.
François Lenormant :
Recherches archéologiques à Éleusis : Exécutées dans le cours de l’année 1860 sous les auspices des ministères de l’instruction publique et d’État : Recueil des inscriptions, Hachette, Paris, 1862.
Victor Magnien :
Les Mystères d’Éleusis : Leurs origines, le rituel de leurs initiations Payot, Paris, 1950.
Georges Méautis :
Les Mystères d’Éleusis, Éditions de la Baconnière, Neuchatel, 1934.
Les Dieux de la Grèce et les Mystères d’Éleusis, Presses Universitaires de France, Paris, 1959.
George Emmanuel Mylonas :
Eleusis and the Eleusinian Mysteries, Princeton University Press, Princeton, 1961.
Charles Picard :
Les Luttes primitives d’Athènes et d’Éleusis, F. Alcan, Paris, 1931.
Kalliope Preka-Alexandri :
Eleusis, Ministry of Culture, Archaeological Receipts Fund, Athens, 1991 – 1995 – 2003.
Robert Turcan :
Les religions à mystères dans l’antiquité, Religions & histoire 24, Faton, Dijon, 2009.

 

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