Les  cités  d’Osroène  :
Nisibe  –  Zeugma
 

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Nisibe

 


 
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   Nisibe (ou Nusaybin ou Nisibis ou Nizibis, en Grec : Νίσιβις, en Kurde : Nisêbîn, en Syriaque : ܨܘܒܐ,  Ṣôbâ ou Beth Arabâyâ, en Araméen : ܢܨܝܒܝܢ Nisibin ou Naşibīna, en Akkadien : Naībīna, en Arménien : Մծբին Medzpine ou Mtsbin, en Persan : نصیبین  Nusaybin ou Arvastân) est une ville du sud-est de la Turquie actuelle, située dans la province de Mardin, à la frontière Turco-syrienne. En fonction des auteurs, la ville et sa région, font partie soit de la Haute-Mésopotamie, soit du Sud de l’Anatolie, sur le territoire de l’Osroène où de l’ancienne Commagène. Elle fut un haut-lieu de l’histoire du Christianisme de langue Syriaque. Nisibe est aussi connue comme l’ancienne Antioche de Mygdonie. La ville fut d’une grande importance religieuse et à partir de la délocalisation de la célèbre école d’Edesse elle devint en 489 un centre universitaire.

 


 

Ruines de l’église Saint Jacob

L’histoire….

 
   La ville de Nisibe est connue depuis le Xe siècle av.J.C où elle est citée pour la première fois lors de sa prise, en 901 av.J.C., par les troupes Assyriennes de l’Empereur Adad-Nirâri II (ou Adad-nirari ou Adad-Nerari ou Adad-nārārī, 912-891) lors d’une bataille contre le royaume de Tayma (ou Tema ou Teema). Selon Jona Lendering, Naşibīna (Nisibe) était un royaume Araméen.
 
   En 852 av.J.C elle fut entièrement annexée à l’Empire Assyrien et elle apparait dans les listes Assyriennes comme le siège d’un Gouverneur provincial nommé Shamash-Abua. De la moitié du IXe siècle, jusqu’à 612 av.J.C elle fut la capitale d’une province Assyriennes. Cette région fut appelée par Strabon (Géographe Grec, v.63 av.J.C-v.23 ap.J.C), Mygdonie (en Grec : Μυγδονία, en Latin : Mydonia). D’après le géographe Nisibe était au pied des montagnes Mont Masius (ou Karajah Dagh pour les arabes). Dès 608 elle passa sous annexion des Néo-Babyloniens (609-539), puis tomba aux mains des Perses Achéménides (549-331), et le resta jusqu’à sa prise, en 332, par le Roi de Macédoine, Alexandre le Grand (336-323).
 
   Sous l’Empire Séleucides (305-64 av.J.C), qui suivit, Nisibe fut appelée Antioche de Mygdonie (En Grec : ‘Aντιόχεια de Μυγδονίας). Elle fut mentionnée sous ce nom par Polybe (Général, homme d’État et historien Grec, v.205-126 av.J.C) dans sa description de la marche du Roi Antiochos III (223-187) contre le Général Molon et son frère Alexandre (Polybe, V, 51). Plutarque (Philosophe, biographe et moraliste Grec, 46-v.125) suggéra que la ville fut peuplée par des descendants Spartiates ?. Nisibe repris son nom à partir de 141 av.J.C. lorsque l’Arménie d’Artavazde I (ou Artavasdes ou Artavaside ou Artuasdes, 160-149 ou 160-123) prit possession de l’Adiabène (Royaume de Mésopotamie dont la capitale était Arbèles, aujourd’hui Erbil en Irak).
 


 

Ruines de l’École de Nisibe

   Autour du Ier siècle de notre ère, Nisibe fut la ville de Juda ben Bathyra (ou Judah Bathyra ou Beseira) qui y fonda une Yechivah (ou Yeshivah, centre d’étude de la Torah et du Talmud dans le Judaïsme). Puis à partir d’environ 36/38 ap.J.C. La cité fut prise et incorporée à l’Empire Parthe d’Artaban III (ou Artabano ou Artabanus ou Artabanos, ou Arsace XIX, 10/12-38/40), la nouvelle puissance de la région.
 
   Comme beaucoup d’autres villes elle fut un lieu où s’affrontèrent les luttes de pouvoir entre Romains et Parthes et elle fut souvent prise et reprise. Notamment une fois par Lucius Licinius Lucullus (115-57, homme d’État et Général Romain) après un long siège (Dion Cassius, XXXV, 6,7), puis à nouveau, en 115, par l’Empereur Romain Trajan (98-117), pour lequel il gagna le nom de Parthicus. Puis perdue et retrouvée contre les Juifs lors de la Guerre de Kitos (ou révolte des exilés, en Hébreu : מרד הגלויות Mered hagalouyot ou מרד התפוצות Mered hatfoutzot) qui fut une insurrection quasi-générale et simultanée des Juifs contre les Romains. Enfin elle fut reperdue au profit des Parthes en 194.
 
   Elle resta leur possession jusqu’à sa récupération par l’Empereur Romain Septime Sévère (193-211) à la fin du IIe siècle qui en fit son quartier général et y rétablit une colonie. À partir de cette époque, compte tenu de son emplacement idéal et de son importance économique et militaire, elle fut constamment disputée entre les Romains et les Perses Sassanides (224-651) et la ville changea à plusieurs reprises de propriétaire. La dernière bataille entre Rome et les Parthes eut lieu dans les environs de la ville en 217. Ces derniers furent remplacés comme puissance dominante de la région par la dynastie Sassanide. Leur Roi Châhpûhr I (ou Šāpūr ou Šābuhr ou Shapur ou Sapor, 241-272) conquis Nisibe, mais en fut chassé en 260 par les Romains.


 

Intérieur de l’église Saint Jacob

 
   En 298 un accord de paix (La paix de Nisibis) y fut conclu entre l’Empire Romain et les Sassanides à la suite de la victoire l’année précédente de l’Empereur Romain Galère (305-311) sur celui des Sassanides, Narses (ou Narseh ou Narseus ou Narsi, 293-302). Elle devint alors la ville Romaine la plus importante du Nord de la Haute-Mésopotamie et elle fut déterminée comme l’un des trois seuls endroits, où devaient avoir lieu, le commerce entre les deux grandes puissances. De 309 à 338 ap.J.C, Jacques de Nisibe (ou Saint Jacob) Évêque Chrétiens de la ville, y construisit une église, qui prit ensuite son nom et dont les ruines et sa tombe sont encore visibles. L’historien Romain, Ammien Marcellin (ou Ammianus Marcellinus, v.330-v.395) gagna sa première expérience pratique de la guerre, jeune homme à Nisibe sous le maître de la cavalerie, Ursicinus.
 
   En 338, 346 et 350 ap.J.C le Roi Sassanide Châhpûhr II le Grand (ou Šāpūr ou Šābuhr ou Shāhpur ou Schāpūr, 309 à 379) assiégea la ville, en vain. En raison de son importance stratégique à la frontière Sassanide Nisibe fut lourdement fortifiée. De 360 à 363, la cité fut le camp de base de la Legio I Parthica (ou Legio prima Parthica “1ère Légion Parthe“) qui était une légion de l’armée Romaine Impériale fondée en l’an 197 par l’Empereur Septime Sévère (193-211). Ammien Marcellin (ou Ammianus Marcellinus) appelle affectueusement Nisibe la “ville imprenable” (Urbs inexpugnabilis) et “rempart des provinces” (murus provinciarum).
 
   En 363 ap.J.C, Châhpûhr II le Grand fit une nouvelle tentative pour prendre la cité, face à l’Empereur Romain Julien l’Apostat (360-363). Dans le même temps, devant un ennemi supérieur en nombre il adopta une technique de guérillas et harcela les troupes Romaines qui furent obligées de se retirer vers l’Assyrie. Au cours de cette retraite Julien fut tué. Son successeur l’Empereur Jovien (Flavius Iovianus, 363-364), en Juillet 363, signa avec Châhpûhr II une paix déshonorante pour les Romains. Dans ce traité il laissa aux Perses la suzeraineté sur l’Arménie et une partie de la Mésopotamie, et Nisibe redevint possession Sassanide. Dans les négociations Châhpûhr II avait exigé à Jovien le départ de tous les citoyens Romains, y compris le Docteur de l’Église, Éphrem le Syrien (ou Afrêm Sûryāyâ ou Afrem Suryoyo ou Ephraim Syros ou Ephraem Syrus, 306-373) qu’il voulait remplacer par des familles Perses. Jovien, contraint d’accepter, donna trois jours à ses compatriotes pour quitter la cité. Beaucoup allèrent s’installer à Amida (ou Diyarbakır ou Amed ou Derbekir) une ville du Sud-est de la Turquie actuelle sur le Haut-Tigre. Ammien Marcellin (ou Ammianus Marcellinus) fut un témoin oculaire de cette période et condamna l’Empereur Jovien de l’abandon de la ville fortifiée, sans un combat. En cela il fut certainement en ligne avec l’opinion publique Romaine contemporaine.
 

Tête probablement de Châhpûhr II
le Grand en argent doré –
Metropolitan Museum of art

   La ville fut le siège de l’École théologique de Nisibe, une des grandes écoles théologiques des premiers siècles du Christianisme, en prenant la suite de l’école d’Édesse, dite aussi école des Perses, après la fermeture de celle-ci en 489. Plus tard, Nisibe fut la métropole ecclésiastique de la province de Bit-Arbaye et dès le milieu du Ve siècle elle fut le siège épiscopal le plus important de l’Église d’Orient après Séleucie sur le Tigre et Ctésiphon.
 
   En 530, Nisibe fut le théâtre d’une bataille pendant la guerre d’Ibérie opposant l’Empire Byzantin sous le commandement du Général Bélisaire, aux Sassanides de Kavadh I (ou Qobad ou Kavad ou Kaveh ou Kobad ou Cabades, 488-496 et 498-531). Ce dernier, avec l’aide des Lakhmides, battit les forces de Bélisaire, résultant en une victoire totale Sassanide après la défaite de la bataille de Dara. À la fin du Ve siècle, les Romains exigèrent la restitution de Nisibe et les troupes impériales essayèrent au moins deux fois en 543 et en 572, en vain, de conquérir la ville. L’endroit était très proche du territoire Romain et représentait une des plus fortes, des plus grandes et des plus importantes forteresses Persanes.
 
   Pour faire face à cette menace, les Romains construisirent au VIe siècle, près de Dara une forteresse (Dara-Anastasiupolis) et y stationnèrent une puissante armée. Par le traité de paix de 591, Nisibe, qui était alors la possession du Sassanide Khosrô II (ou Khusrau ou Khosroes ou Khosro ou Khosrau ou Khosrow ou Husrav II, 589-590 et 591-628) repassa sous contrôle Romain Nisibe devint le siège des Métropolites (Titre religieux porté par certains Évêques des Églises d’Orient) et plus tard de l’église Nestorienne. Les Chrétiens Nestoriens, minorité religieuse persécutée dans l’Empire Romain, s’installèrent en grand nombre à Nisibe.
 
   La proche région fut connue au VIIe siècle, avant la conquête musulmane, en Syriaque comme Beth Arabâyâ, et en Persan comme Arvastân. Nisibe fut conquise par les arabes probablement au cours de 639/640 ap.J.C. Elle fut l’un des endroits où la connaissance de l’antiquité Gréco-romaine fut adoptée avec une intensité particulière par les conquérants arabes. Suite à un séisme en 717, la ville fut abandonnée, cependant elle avait déjà fortement déclinée souffrant de la perte du commerce frontalier entre les Romains et les Perses.

 


 

Ruines de colonnes Romaines

Paix de Nisibe

 
   La paix de Nisibis (ou Nisibe), fut un accord conclu entre l’Empire Romain et les Perses Sassanides à Nisibe en 298 selon la date traditionnelle (ou peut être en 299). Cet accord mit fin à la première guerre Perso-romaine faite suite à la victoire en 297 de l’Empereur Galère (305-311) sur celui des Sassanides, Narses (ou Narseh ou Narseus ou Narsi, 293-302) dont la famille et les trésors furent pris.
 
   Les Sassanides reconnurent la suzeraineté de Rome sur la ville qui devint alors la cité Romaine la plus importante du Nord de la Haute-Mésopotamie et elle fut déterminée comme l’un des trois seuls endroits, où devaient avoir lieu, le commerce entre les deux grandes puissances. Ils reconnurent également la suzeraineté Romaine sur le royaume d’Arménie où Tiridate IV (dit Hélios ou le grand, qui aurait régné de 298 à 330) s’était établi. Rome reçut outre l’Ingilène avec la Sophène dans l’ancienne Arménie-Mineure, cinq provinces de la Haute-Mésopotamie, des territoires situés au-delà du Tigre, les provinces Transtigritanes (En Latin : regiones transtigritanes) qui comprenaient l’Arzanène, la Corduène, la Moxoène, la Zabdicène et la Rehimène.
 
   Les Romains fortifièrent Amida (ou Diyarbakır ou Amed ou Derbekir) une ville du Sud-est de la Turquie actuelle sur le Haut-Tigre et Nisibe qui devint la principale place commerciale de la région. Dans le royaume d’Ibérie, où la suzeraineté Sassanides ne fut pas remise en cause, Rome reconnut la légitimité de Mirian III (ou Mihran ou Mirvan ou Meribanes, 284-361), mis en place par les Perses, qui reçut des Romains les insignes royaux et avec qui il noua des relations diplomatiques directes qui furent à l’origine de la Christianisation ultérieure du pays. Son fils aîné Rev II (ou Rew ou Rev Mart’ali, 345-361 ap.J.C), Co-Roi de Géorgie de la dynastie Sassanide, épousa Salomé la fille du Roi Tiridate III (287-330), et l’Empereur Romain Constantin I (305-337), reçut son autre fils Varaz-Bakour I (ou Bakar, Roi 363-365), comme otage à Rome. Selon l’historien Ammien Marcellin (ou Ammianus Marcellinus, v.330-v.395), Mirian III correspond au Roi Méribane d’Ibérie qui reçut vers 360 des présents de Rome, qui souhaitait obtenir son alliance contre les Sassanides. Par le traité de Nisibe la paix fut assurée pendant plusieurs décennies jusqu’à sa rupture par le Roi Sassanide Châhpûhr II le Grand (ou Šāpūr ou Šābuhr ou Shāhpur ou Schāpūr, 309 à 379) qui s’en empara à la quatrième tentative.

 

Bibliographie

 
   Pour d’autres détails sur la cité voir les ouvrages de :
 
Adam H.Becker :
Sources for the history of the school of Nisibis, Liverpool University Press, Liverpool, 2008.
Hendrik J.W.Drijvers :
Nisibis, pp : 573–576, Theologische Realenzyklopädie 24, De Gruyter, Berlin, 1994.
Jean-Maurice Fiey :
Nisibe, métropole syriaque orientale et ses suffragants des origines à nos jours (CSCO 388), Secrétariat du CSCO, Louvain 1977.
Jean Gagé :
La montée des Sassanides, Éditions Albin Michel, Paris, 1964.
René Grousset :
L’Empire du Levant : Histoire de la question d’Orient, collection : Bibliothèque historique, Payot, Paris, 1949-1979.
John Scott Harrel :
The Nisibis war (337-363 CE) : The strategic defense of the Roman Orient, California State University, Northridge, 2013.
Paul S.Russell :
Nisibis as the background to the life of Ephrem the Syrian, Hugoye. Journal of Syriac Studies 8, N°2, Syriac Computing Institute, Washington, 2005.
Kyle Smith :
Constantine and the captive Christians of Persia : Martyrdom and religious identity in late antiquity, University of California Press, Oakland, 2015.
Michael Sommer :
Roms orientalische Grenze. Palmyra – Edessa – Dura Europos – Hatra. Eine Kulturgeschichte von Pompeius bis Diokletian, Reihe Oriens et Occidens, Studien zu antiken Kulturkontakten und ihrem Nachleben, Band 9, Franz Steiner Verlag, Wiesbaden, 2005.
Arthur Vööbus :
History of the school of Nisibis, Secrétariat du Corpus SCO, Louvain, 1965.
Ephrem-isa Yousif :
Les villes étoiles de la haute Mésopotamie : Edesse, Nisibe, Amida, Mardin, Arbil, Kirkouk, Sulaymaniya, Dohuk, Harmattan, Paris, 2009.

 

 

Zeugma

 


 

Partie des ruines au-dessus du niveau de l’eau
Photo avant retouches : wikimedia.org

   Zeugma (en Grec : Ζεύγμα “pont de la ville” ou “pont-passage” ou “pont de bateaux“) était située sur l’Euphrate, aujourd’hui en Turquie près de la frontière Syrienne au Sud du pays, près de Birecik dans le district de Nizip et la province de Gaziantep. En raison de son pont/ponton, la ville était une étape importante sur l’antique route de la soie, dans l’ancienne Commagène, puis Osroène. En Octobre 2000, l’ancienne ville fut inondée dans une large mesure suite à la construction d’un barrage par les Turcs dans le cadre du Projet Anatolie du Sud.
 
   La cité fut en fait constituée par la réunion de deux villes situées de part et d’autre du fleuve : Apamée sur l’Euphrate, sur la rive droite de l’Euphrate, maintenant inondée par le barrage de Bilecik (ou Birecik) et Séleucie de l’Euphrate sur la rive gauche. Cette configuration et le passage sur l’Euphrate qui constituait une position stratégique importante, est à l’origine du nom de la ville, Zeugma, signifiant en Grec, qui supplanta le nom d’origine, Séleucie. Du côté d’Apamée, une large plaine nécessita la construction d’un important rempart de 3 km. de pourtour. Séleucie, pour sa part, était située sur des collines remontant à partir du fleuve.

 

L’histoire….

 
   La ville fut fondée vers 300 av.J.C. par un Diadoque du Roi Macédonien, Alexandre le Grand (336-323), Séleucos I Nikatôr (305-280), fondateur de la dynastie des Séleucide. Grâce à son pont, la ville se développa rapidement et devint un centre commercial et administratif majeur. En 64 av.J.C., la riche cité fut conquise par la République Romaine. Ce fut à cette époque qu’elle prit le nom de Zeugma. S’ouvrit alors une période de développement et de prospérité due à sa position stratégique de traversée de l’Euphrate sur la route de la soie, entre la Chine et Antioche. À son apogée, elle contenait une légion Romaine et près de 70.000 habitants (on trouve aussi 80.000 ?). En 256 (on trouve aussi 252 ?), Zeugma fut prise et largement détruite par le Roi Sassanide, Châhpûhr I (ou Šāpūr ou Šābuhr ou Shapur ou Sapor, 241-272). Elle fut reconstruite mais les dommages causés par l’invasion étaient si importants que la cité ne fut pas en mesure de récupérer pleinement son lustre d’antan.


 

Reconstitution des peintures murales et des
mosaïques de sol – Musée de Zeugma

 
   Plus tard, elle fut victime d’un tremblement de terre qui dévasta une partie d’un pan de la montagne qui glissa dans le centre-ville et la zone résidentielle, enterrant la population avec lui. Les maisons sous-jacentes sont particulièrement bien conservées. Un égout qui partait vers le fleuve, fait de blocs de pierre calibrées a été mis au jour en parfait état. Pendant le reste de son histoire sous la domination Romaine, elle ne retrouva jamais la prospérité qu’elle avait atteinte. Au cours des Ve et VIe siècles, la ville fut gouvernée par Byzance et l’Empire Romain d’Orient. Puis suite aux raids arabes la ville fut plus ou moins abandonnée une fois de plus. Plus tard, dans les Xe et XIe siècles, une petite abbasside s’y installa elle fut occupée jusqu’au milieu du XIe siècle environ.

 

L’archéologie

 
   Le site fut fouillé dès le XIXe siècle. Il a été mis au jour près Zeugmas une nécropole avec des sols en mosaïque Romaine. En 1980 fut décidé la construction d’un barrage sur le fleuve, le barrage de Birecik, dont le lac de retenue allait engloutir la totalité d’Apamée et une bonne partie de Séleucie. En 1989, Guillermo Algaze de l’Université de Chicago, menait une enquête sur le site de la ville et dans la région lorsqu’il prit connaissance des plans du barrage et les rendit publique, mais il ne trouva personne pour répondre à son alerte. Le Directeur du musée de Gaziantep, Rifat Ergec et son assistant Mehmet Onal, furent alertés à nouveau en 1994. En 1995 alors qu’allait commencer la construction de l’important barrage, des fouilles d’urgence furent entreprises par des archéologues internationaux.
 


 

La gitane – Mosaïque du Musée de Zeugma

  Elles furent placées sous la direction de Rifat Ergeç et de Catherine Abadie-Reynal du Ministère Français des Affaires Étrangères. Ils reçurent également un certain soutien du Ministère Turc de la Culture. Le 7 Mai 2000, quelques mois avant l’inondation, un mécène Américain David W.Packard publia un texte dans le New York Times et décida spontanément d’une aide pour ces fouilles d’urgences. Il chargea une société Anglaise, l’Unité d’Archéologie d’Oxford (OUA), dirigée par Robert Earley, spécialistes de la mosaïque Italienne et une équipe Française de sauver les artefacts les plus précieux.
 

 

   Sous haute pression, 60 archéologues, 200 ouvriers et trois nouvelles pelleteuses travaillèrent d’arrache-pied pour un budget de cinq millions de dollars. Dans les excavations de Juin à Octobre 2000, ils mirent au jour 45 mosaïques, dont 22 à peu près intacts. Ils mirent également en évidence une organisation urbanistique très évoluée, de nombreux bâtiments importants, temples, théâtre, nécropole et grandes demeures Patriciennes Romaines qui livrèrent une quantité de peintures murales et de mosaïques d’un intérêt exceptionnel. Les mosaïques, peintures murales et objets découverts furent prélevés et rassemblés dans le musée archéologique de Gaziantep et publié en Mai 2011, puis un musée fut spécialement construit à Zeugma. Un examen du site fut mené après la première vidange du réservoir et les archéologues constatèrent que le site, en dépit des protections, avait grandement souffert de l’inondation et était malheureusement quasiment détruit.

 

Intérieur du musée de Zeugma Océanos et Téthys Eros et Psyché Dédale et Pasiphaé et le
triomphe de Dionysos

 

Bibliographie

 
   Pour d’autres détails sur la cité voir les ouvrages de :
   
Catherine Abadie-Reynal :
Séleucie-Zeugma et Apamée sur l’Euphrate : Étude d’un cas de villes jumelles dans l’Antiquité, pp : 7-24, Histoire urbaine 3, Maison des sciences de l’homme, Paris, 2001.
Zeugma III. Fouilles de l’habitat (2). La maison des Synaristôsai, Nouvelles inscriptions, TMO 62, Série recherches archéologiques, Lyon, 2012.
Catherine Abadie-Reynal et Alix Barbet :
Zeugma Bd. 1: Fouilles de l’habitat 1: La mosaïque de Pasiphae, De Boccard, Paris, 2012.
Zeugma Bd. 2: Peintures murales romaines, De Boccard, Paris, 2005.
Zeugma Bd. 3: Fouilles de l’habitat. 2: La maison des Synaristôsai. Nouvelles inscriptions, De Boccard, Paris, 2012.
Catherine Abadie-Reynal et Rifat Ergeç :
Zeugma I, Fouilles de l’habitat. La mosaïque de Pasiphaé, Institut Français d’Études Anatoliennes Georges Dumézil, Istanbul, diffusions de Boccard, Paris, 2012.
Ilhan Akşit :
Ancient civilizations and treasures of Turkey, Akşit Kültür Ve Turizm Yayincilik, Istanbul, 2004.
Robert Early :
Zeugma : Interim reports : Rescue excavations, Inscription of Antiochus I, Bronze statute of Mars, House and mosaic of the Synaristôsai, and recent work of the Roman army at Zeugma, Journal of Roman Archaeoloy, Portsmouth, 2003.
Rifat Ergeç et Nezih Başgelen :
Belkis – Zeugma, Halfeti, Rumkale – A last look at history, Archaeology and Art Publications, Istanbul, 2000.
Rifat Ergeç :
Belkis-Zeugma and its mosaics, Istanbul, Sanko, 2007. 
Alix Barbet :
Zeugma II : Peintures murales Romaines, Institut Français d’Études Anatoliennes Georges Dumézil, Istanbul, diffusions de Boccard, Paris, 2005.
Daniel Frascone :
Zeugma IV. Les monnaies, TMO 63, Série recherches archéologiques, Lyon, 2013.
Nadine Dieudonné-Glad, Michel Feugère et Mehmet Önal :
Zeugma V. Les objets, TMO 64, Série recherches archéologiques, Lyon,, 2013.
Jean-Pierre Darmon :
Merveilles de Zeugma, Turquie, pp.38-45, Dossiers d’Archéologie 346, Juillet-Août 2011. 
David Kennedy :
The twin towns of Zeugma on the Euhrates rescue work and historical studies, Journal of Roman Archaeology, Supplementary Series 27, Porstmouth, 1998.
Jörg Wagner :
Seleukia am Euphrat, Zeugma. Studien zur historischen topographie und geschichte, Reichert, Wiesbaden, 1976.

 

 
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