Localisation et généralités
Vue du site |
Éleusis (ou Elefsina, en Grec :
‘Eλευσίς) est une ville de l’Ouest de l’Attique. Elle est située à environ 18 km au Nord-ouest
du centre d’Athènes, dans la plaine Thriasienne, à l’extrémité Nord
du golfe Saronique. Au Nord d’Éleusis on trouve Mandra et Magoula. Dans l’Antiquité Grecque classique, elle fut un dème de
l’Attique. Aujourd’hui Éleusis est un centre industriel majeur, avec la plus grande raffinerie de pétrole de Grèce.
Elle est surtout connue pour avoir été le site des
Mystères d’Éleusis, l’un des événements religieux les plus
célèbres de la Grèce antique, et le lieu de naissance d’Eschyle, l’un des trois grands tragédiens de l’Antiquité.
Selon Pausanias (Géographe Grec, v.115-v.180),
la ville tira son nom du héros Éleusis (Le fils d’Hermès et d’Ogygos ou l’Océanide Daïra). Quand Perséphone,
fille de Déméter, fut enlevée par Hadès, Déméter vint à Éleusis où elle rencontra le Roi du lieu, Céléos. Le fils de Céléos,
Triptolème, fut le fondateur des
Mystères d’Éleusis, culte agraire rendu à Déméter, qui s’étendit à toute la Grèce et, à l’époque
Romaine, à tout l’Empire Romain.
L’histoire…..
Les premières traces
d’établissements remontent à 2000 av.J.C, la cité se développant au cours de la période
Mycénienne dans une grande enceinte fortifiée.
Ce fut vers 1500 que le culte de Déméter, divinité liée à la nature et de la culture fut mis en place.
Selon la tradition la cité fut rattachée à
Athènes lors du synœcisme de Thésée. En réalité, ce rattachement
daterait plutôt de la fin du VIIIe siècle ou du début du VIIe siècle. Au cours du VIIIe siècle, le sanctuaire acquis un
caractère notable et accueillit la fête panhellénique, il devint l’un des plus importants. Le Tyran
d’Athènes,
Pisistrate (ou Peisistratos, v.600-527) fit entourer le
sanctuaire d’un grand mur renforcé par des tours.
Vue du sanctuaire d’Artémis |
Selon
Hérodote (Historien Grec, v.484-v.425, Livre IX, 65),
en 480/479, pendant les Guerres Médiques, la ville fut dévastée
par les armées du Roi Perse Achéménide,
Xerxès I (486-465) et le temple de Déméter fut
brûlé. Elle le fut de nouveau pendant la
Guerre du Péloponnèse (431-404), lorsque
l’Attique fut envahie par le Roi
Pleistoanax
(ou Plistoanax, en Grec : Πλειστοάναξ, 458-409).
Le sanctuaire de la ville fut d’une grande renommée pour ses
Mystères. Après la tyrannie des
Trente à
Athènes, ceux-ci se réfugièrent à Éleusis où ils ne furent pas inquiétés.
Après une longue période de paix la ville et son sanctuaire redevinrent l’objet de convoitises guerrières à partir du
IIe siècle ap.J.C, époque où la pression barbare sur les frontières de l’Empire Romain s’affirmait. Vers 170, Éleusis fut
pillée par une tribu Dace, les Coïstoboces
(ou Costoboces). L’Empereur Marc Aurèle (161-180) contribua au relèvement du sanctuaire. Enfin, en 395 ap.J.C, Éleusis fut
détruite par les Wisigoths du Roi Alaric I (396-410) lorsqu’il ravagea la Grèce.
Les vestiges archéologiques
Parmi les monuments que l’on peu
encore trouver à Éleusis il y a :
▪ Le patio sacré, qui fut le lieu de rencontre des pèlerins et qui ponctuait la Voie Sacrée menant
d’Athènes à Éleusis. En son temps elle abritait une structure datant du
VIIIe siècle av.J.C dans lequel se trouvaient des autels pour les offrandes aux Déesses et le temple d’Artémis,
(IIe siècle av.J.C), dont ne sont conservées seulement que les fondations.
Autre vue du site |
▪ Le propylée (vestibule conduisant à un sanctuaire) majeur, qui fut construit
en marbre du Pentélique (Montagne au Nord-est
d’Athènes). Sa structure imitait les Propylées de l’acropole de cette
dernière. Il est daté de la seconde moitié du IIe siècle av.J.C. d’une inscription sur la façade intérieure dans lequel
apparaissent également les noms des Empereurs Romains : Antonin le Pieux (138-161) et Marc Aurèle (161-180).
On a retrouvé un buste de celui-ci dans le centre du fronton extérieur. Il a aussi été mis au jour le socle et les bases des
colonnes. À l’origine, chacun des côtés du Propylée avait une rangée de six colonnes Doriques surmontées d’un fronton.
L’intérieur était divisé en deux cadres séparés par une paroi transversale dans laquelle cinq portes s’ouvraient.
Au dehors du porche, deux rangées parallèles de colonnes Ioniques indiquaient la direction du sanctuaire.
▪ Le propylée mineur de style Ionique. Il fut construit par le Proconsul Appius Claudius
Pulcher. Il s’agissait d’une sorte de vestibule à l’extérieur et un passage couvert était flanqué de deux cariatides
(ou caryatide, statue de femme souvent vêtue d’une longue tunique, soutenant un entablement sur sa tête, remplaçant ainsi une
colonne, un pilier ou un pilastre).
▪ Le temple de Déméter ou Plutonion, les fondations ont été conservées du temple de
l’époque de Pisistrate (v.600-527).
Une statue de Perséphone qui y fut mise au jour est exposée au Musée d’Éleusis.
▪ Le Télestérion (Grande salle pour l’initiation aux
Mystères d’Éleusis) était une
enceinte avec plusieurs entrées et huit niveaux de sièges sur les quatre côtés. Il permettait aux initiés des
Mystères
de participer aux rituels assis. Dans le centre se trouvait le mégaron (Pièce principale des habitations),
dont seuls les Hiérophantes (Prêtre qui explique les mystères du sacré) pouvaient accéder pour les
rites les plus secrets. Les vestiges montrent diverses interventions architecturales entre le Ve et IIe siècle av.J.C.
Le Plutonion d’Éleusis |
▪ L’arc de triomphe qui est une reproduction des arcs Romain ou
Athénien. Il fut érigé devant le Propylée
majeur. Il date d’après l’an 129 ap.J.C.
▪ Le puits de Calíchoron qui fut le lieu, selon Homère
(Poète Grec de la fin du VIIIe siècle), où Déméter se reposa lors de sa première visite à
Éleusis. Pendant les célébrations en l’honneur de la Déesse des femmes dansaient autour de la fosse.
Il est daté de la première moitié du Ve siècle av.J.C.
▪ Le Plutonion (ou Ploutonion) était une grotte vénérée en tant que passerelle
vers le monde des morts. C’était un mur de soutènement de caractère rituel autour d’une grotte où, selon la tradition,
était apparu Pluton, Dieu des enfers. Il fut le lieu d’une représentation de la déclaration annuelle de Perséphone à
la terre. Il est daté d’entre la VIe et IVe siècle av.J.C.
Les Mystères d’Éleusis
Les Mystères d’Éleusis
(En Grec : ‘Eλευσίνια Μυστήρια) faisaient
partie d’un culte à mystères dans la religion Grecque antique, de nature ésotérique. Il
était effectué dans le temple de Déméter de la ville. C’étaient des cérémonies d’initiation organisées chaque année pour le culte
à cette Déesse et sa fille Perséphone. Ils sont les plus célèbres des rites religieux secrets de la Grèce antique.
Tout homme ou femme, libre ou esclave, parlant Grec et qui n’avait pas commis d’homicide pouvait être admis à participer aux rituels
et y être initié. C’était une grande fête au cours de l’époque hellénistique qui
plus tard s’étendit à Rome.
Plaque votive en terre cuite peinte
représentant les éléments des Mystères d’Éleusis –
Musée Archéologique National – Athènes Photo avant retouches :
wikipedia.org
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Il est estimé que la base des rituels viendrait d’un vieux culte agraire qui remonte probablement à la période
Mycénienne (entre 1500/1450-1200).
On pense que le culte de Déméter fut créé vers 1500, et les Mystères représentaient le mythe de l’enlèvement
de Perséphone par le Roi des enfers Hadès, dans un cycle de trois phases : la descente (perte), la recherche et
la montée, le thème principal étant la montée de Perséphone et les retrouvailles avec sa mère. Les rites, les cérémonies
et les croyances ont été gardés secrets et toujours conservés dans l’antiquité. Les initiés croyaient
que s’ils préservaient les secrets de
la religion, ils connaîtraient eux aussi une vie après la mort à cause de leur
initiation à ces mystères et qu’ils auraient une récompense dans l’au-delà.
Il y a beaucoup de peintures et poteries qui
représentent différents aspects des Mystères. Certains chercheurs actuels pensent que la puissance et la longévité des Mystères
provenaient d’agents psychédéliques que les initiés prenaient ?. Ils ont supposé l’idée d’une consommation contrôlée de
grains contaminés par l’ergot de seigle qui aurait été préparée par les Prêtres lors des Mystères. Le carpophore de l’ergot de
seigle contient un hallucinogène proche dans sa nature du LSD. On peut souvent voir sur les gravures relatant les Mystères
d’Éleusis ou en rapport avec eux, des représentations de personnages sacrés portant à la main des gerbes de blé ou de seigle.
Selon la mythologie Grecque, Hadès enleva Perséphone, au cours d’une cueillette de fleurs dans les prairies
d’Enna (Sicile), pour l’épouser et en faire la Reine des Enfers. Les cultures cessèrent de croître dans les champs alors que
Déméter parcourait le monde à la recherche de sa fille. Un jour, alors qu’elle errait sur les terres de Grèce sous
les traits d’une vieille mendiante, elle entra dans la cité d’Éleusis et demanda l’hospitalité.
Les citoyens l’accueillirent avec une grande générosité et, en
reconnaissance, la Déesse dévoila sa véritable identité et récompensa ses bienfaiteurs.
Relief votif en marbre pentélique trouvé à Éleusis, dédié au sanctuaire
de Déméter et de Korè – Musée
Archéologique National – Athènes
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Elle leur dévoila ses mystères et la
maîtrise de l’agriculture. Par la suite, Déméter retrouva Perséphone qui ne put être entièrement libérée des Enfers,
puisque ceux qui mangent la nourriture des morts ne peuvent retourner chez les vivants et que Perséphone avait mangé sept
pépins de la grenade (fruit associé au mariage) offerte par Hadès. Zeus décréta toutefois que Perséphone passerait la moitié
de l’année sur terre (durant la saison des cultures) avec sa mère et le reste de l’année (l’hiver) en compagnie d’Hadès.
Comme la divulgation des rites était strictement défendue et qu’aucun
des acteurs ne trahissait les secrets,
aucun écrit ne documente avec précision les cérémonies. On célébrait le culte dans le Télestérion d’Éleusis.
Les rituels du culte des Mystères étaient toujours accomplis par les Premiers Prêtres de Déméter. Parmi les plus connus
d’entre eux, on trouve : Le Roi Céléos (ou Celeus ou Keleus, en Grec : Κελεός) et son fils
Triptolème (ou Triptolemus ou Buzyges, en Grec : Τριπτόλεμος,
“triple guerrier“), ce dernier à qui Déméter donna la tâche d’enseigner l’agriculture et de semer le blé sur Terre ;
le Roi Dioclès (ou Dioklēs, en Grec : Διοκλῆς) ;
Eumolpos (ou Eumolpus, en Grec : Εὔμολπος)
fils de Poséidon et Chione ; et Polyxène (ou Polyxenus ou Polyxeinus, en Grec :
Πολύξενος ou Πολύξεινος).
L’aspect principal du culte se construisait autour de la culture du blé et le cycle des cultures (entreposage, semis,
renaissance).
Annuellement, généralement lieu au printemps, il existait deux célébrations des mystères d’Éleusis : Les Grands
Mystères et les Petits Mystères. Les Grands Mystères duraient neuf jours, d’après la durée de l’errance de Déméter à la
recherche de sa fille. En Septembre, avant l’automne, on se préparait aux cérémonies préliminaires qui se déroulaient à
l’extérieur et qui sont mieux documentées. La première partie du rituel commençait par une procession durant laquelle on
transportait des reliques sacrées (les hiéra) jusqu’à
Athènes pour les placer dans l’Éleusinion, un sanctuaire à la base
de l’Acropole. Les Mystes (Candidats dignes des mystères) se plongeaient dans la mer pour se purifier.
Dans le Télestérion, après avoir rompu le jeûne en consommant le kykéôn (nourriture à base de blé), le
rite secret d’initiation avait lieu et les Mystes recevaient des révélations des initiés et accédaient au salut et à la vie
après la mort. Il y avait plusieurs niveaux dans l’initiation : Les premiers étaient les Mystes, les nouveaux initiés donc,
qui y participaient pour une première fois. Ils y retournaient une seconde fois pour passer à un niveau supérieur, les Époptes.
Ces derniers étaient passés à ce niveau et des Prêtres qui présidaient aux rites. Parmi ceux qui dirigeaient la cérémonie, on
trouvait 4 ministres : Le Hiérophante, celui qui révélait les choses sacrées, le Dadouque, le chef des
Lampadophores (Celui qui porte le flambeau dans les sacrifices), le Hiérocéryce, le chef des Hérauts sacrés et
l’Assistant, dont le costume symbolisait la Lune. Le Roi d’Athènes
était le surintendant de la cérémonie. Celle-ci était également dirigée par une multitude de Ministres subalternes
répartis en différentes classes.
Bibliographie
Pour
d’autres détails sur la ville voir les ouvrages de :
Marie Claire Amouretti et François Ruzé :
– Le monde grec antique, Hachette université, Paris, 1978.
Jan N.Bremmer :
– Ancient Mystery cults, De Gruyter, Berlin, 2013.
Maurice Brillant :
– Les Mystères d’Éleusis, Renaissance du livre, Paris, 1920.
Walter Burkert :
– Ancient mystery cults, Harvard University Press, Cambridge, 1987.
Paul François Foucart :
– Les mystères d’Éleusis, A. Picard, Paris, 1914.
Hans Gsänger :
– Eleusis, Verlag die Kommenden, Frieburg, 1961.
Karl Kerényi et Ireneusz Kania :
– Eleusis : Archetypal, image of mother and daughter, Princeton University Press, 1991 –
en Polonais, Eleusis : archetypowy obraz matki i córki, Homini, Kraków,
Janvier 2014.
François Lenormant :
– Recherches archéologiques à Éleusis : Exécutées dans le cours de l’année 1860 sous les auspices des ministères de
l’instruction publique et d’État : Recueil des inscriptions, Hachette, Paris, 1862.
Victor Magnien :
–Les Mystères d’Éleusis : Leurs origines, le rituel de leurs initiations
Payot, Paris, 1950.
Georges Méautis :
– Les Mystères d’Éleusis, Éditions de la Baconnière, Neuchatel, 1934.
– Les Dieux de la Grèce et les Mystères d’Éleusis, Presses Universitaires de France, Paris, 1959.
George Emmanuel Mylonas :
– Eleusis and the Eleusinian Mysteries, Princeton University Press, Princeton, 1961.
Charles Picard :
– Les Luttes primitives d’Athènes et d’Éleusis, F. Alcan, Paris, 1931.
Kalliope Preka-Alexandri :
– Eleusis, Ministry of Culture, Archaeological Receipts Fund, Athens, 1991 – 1995 – 2003.
Robert Turcan :
– Les religions à mystères dans l’antiquité, Religions & histoire 24, Faton, Dijon, 2009.
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