Quelques  grandes  villes :
Saïs
 

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Sommaire
 

▪  Noms et localisation
▪  Les légendes
▪  L’histoire de la cité
▪  Archéologie sur le site
▪  La religion dans la cité
▪  Bibliographie

Vu d’une partie
du site –
Au fond le village
de Sa el-Hagar

 

ou  Saou   ou   Sau
Saou    saw

 

Noms  et  localisation

 


 

Autre vue du site – Sud-ouest de l’enceinte

   Saïs (En Grec : Σάϊς, en arabe : ‏صا الحجر‎ Sa al-Hagar ou ā al-Ḥaǧar, en Égyptien : Saou ou Sa ou Zau ou Sau) se situait sur la branche Canopique du Nil dans le Delta occidental. Elle est identifiée de nos jours au site du village de Sa el-Hagar (ou Sah el-Haggar, ne pas confondre avec Sân el-Haggar qui est le site de Tanis), à l’Ouest de Samannūd (ou Sebennytos). Saïs fut la capitale du 5e nome de Basse-Égypte, le nome "supérieur de Neith" ou "la cible du Nord" (nt mHt).
 
   La ville devint le siège du pouvoir durant les XXIVe dynastie (727-715) et XXVIIIe dynastie (404-399) et fut le berceau de la XXVIe dynasties (664-525). Ce fut à l’époque de cette dernière que la Déesse Neith devint la Déesse protectrice de la cité, mais son culte sur le site est attesté dès la Ière dynastie (v.3040-2828). Saïs vénérait aussi la Déesse Isis, qui y avait un magnifique temple.
 
   Il n’y a aujourd’hui aucune trace de cette ville avant de la fin du Nouvel Empire (1549-1080), soit vers 1100, en grande partie en raison de sa destruction massive par les chercheurs de Sebakh (Terme utilisé pour décrire des matériaux organiques décomposés qui peuvent être utilisés à la fois comme engrais agricole ou comme combustible) qui ont largement fait disparaître tout ce qui était en briques crues, ne laissant qu’un peu de blocs in situ. Saïs fut une des étapes principales des fêtes liées au couronnement ou au jubilé du Roi, la fête Sed (ou Heb-Sed).

 

Légendes

 
   Ce fut dans le temple d’Isis que Plutarque (Philosophe, biographe et moraliste Grec, 46-v.125) indique que sur le tombeau de la Divinité on trouve l’inscription à l’origine de la légende du Voile d’Isis : "Je suis tout ce qui fut, ce qui est, ce qui sera et aucun mortel n’a encore osé soulever mon voile". Selon Platon (Philosophe Grec, 427-346), dans le Timée, des Prêtres de Saïs auraient confié à Solon (640-558, Homme d’État Athénien) le secret de l’Atlantide. Les Grecs, comme Hérodote (Historien, v.484-v.425), Platon (Philosophe et mathématicien, 427-346) et Diodore de Sicile (Historien et chroniqueur, v.90-v.30 av.J.C), dans leur écrits, ont identifié Neith avec leur Déesse Athéna et il pensaient qu’il existait un lien primordial entre Saïs et Athènes. Diodore raconte qu’Athéna créa Saïs avant le déluge qui détruisit Athènes et l’Atlantide et que si toutes les villes Grecques furent détruites pendant ce cataclysme, les villes Égyptiennes, y compris Saïs, survécurent.
 


 

Psammétique I, XXVIe dyn.
– Musée du Louvre

L’histoire…….

 
   Le résultat de campagnes de fouilles récentes a révélé que la cité existait déjà aux temps néolithiques. Un niveau archéologique contenant des céramiques et autres artefacts confirme que Saïs fut dès cette époque un centre urbain important. Elle est connue dès le début de l’histoire Égyptienne, on a retrouvé des étiquettes en bois liées au Roi Horus Aha (v.2995-2974, Ière dynastie). Elles décrivent sa visite dans la cité. Il fut peut-être le premier à faire ériger dans la ville un temple consacré à la Déesse Neith. L’ascension politique de Saïs fut tardive, car il n’y a plus aucune trace de la cité avant la fin Nouvel Empire (1549-1080), soit vers 1100.
 
   Ce fut surtout à partir de la deuxième moitié de Troisième Période Intermédiaire (1080-656) qu’elle joua un rôle politique important, comme d’ailleurs d’autres cités du Delta, tels que Tanis ou Bubastis. Sous la XXIe dynastie (1070/69-945) les militaires Libyens engagé dans l’armée Égyptienne au cours des décennies précédentes devinrent un facteur politique important, particulièrement les militaires descendants d’anciens prisonniers de guerre Libyens, les Méchouech (ou Meshwesh ou Mâchaouach).
 
   Ils s’étaient installés partout dans le Delta et des colonies importantes existaient à Saïs, Mendès et Bubastis et ils détenaient la force armée du royaume. Leurs chefs devinrent très puissants et un de ceux-ci, Sheshonq I (ou Chechanq, 945-924), profita de l’anarchie dans lequel le pays tombait à la fin de la XXIe dynastie et fonda la XXIIe dynastie (945-715).


 

Néchao II, XXVIe dynastie
– Brooklyn Museum

 
   La rivalité dynastique et les compétitions entre différentes lignées de Rois pour le trône, plus la coexistence de plusieurs "royaumes", Thèbes, Héracléopolis, Hermopolis Magma qui se créèrent, affaiblirent la dynastie et amenèrent à la guerre civile. En 818, la XXIIe dynastie, installée à Tanis, perdit le contrôle du Delta central au profit d’une autre chefferie Libyenne. Le leader de celle-ci, un Prince Bubaste, Pétoubastis I (ou Padibastet I, 818-793), profita de ce cahot et des conflits de succession en l’an 8 de Sheshonq III (825-773) pour se faire couronner Roi de Léontopolis (ou Taremou "la terre des poissons"). Il fonda la XXIIIe dynastie qui régna parallèlement avec la précédente et se fit reconnaître par plusieurs grandes villes comme Héracléopolis, Memphis et Thèbes.
 

   L’autorité de e e e e e e e Pétoubastis I, comme celle de ses successeurs jusqu’à Osorkon III (787-759), fut également reconnue par les chefferies Mâ de Mendès et de Saïs. Cependant sous Takélot III (759-757), fils et successeur d’Osorkon III, cette chefferie Mâ constituée à Saïs vers 767 et dirigée par un Osorkon, étendit son pouvoir. Vers l’Ouest au détriment des chefs Libyens, vers le Nord en s’emparant de la ville de Bouto et vers le Sud en direction de Memphis. Takélot III ne contrôla plus alors que la Haute-Égypte. Á partir de ce Roi et de son homologue de la XXIIe dynastie, Sheshonq V (ou Chechanq, 767-730), ce fut la décadence complète de la puissance Libyenne.
 
   En 747, sous le règne de Sheshonq V à Tanis et de Ioupout II (754-715) à Léontopolis plusieurs petits royaumes qui existaient déjà dans le pays prennent leur indépendance : Héracléopolis, Hermopolis Magma et Lycopolis (ou Assiout). Les Chefs de Saïs, pour quelques temps firent allégeance au royaume d’ Hermopolis Magma afin de préserver leur cité. À cette date, le pays fut alors partagé entre cinq Rois : Sheshonq V à Tanis, Ioupout II à Léontopolis, Payeftjaouembastet (754-720) à Héracléopolis, Nimlot III (747-725) à Hermopolis Magma et Padimenti I (747-715) à Lycopolis. Les provinces et royaumes du Nord (des "Grands Chefs") reconnurent, au mieux, la suzeraineté d’un de ces Roitelets. À cette confusion générale il faut ajouter l’invasion du Sud du pays par les Kouchites de Napata (Nubie).
 

 

   Un de leur Roi, Kachta (760-747) se fit reconnaître comme "Roi de Haute et Basse-Égypte, fils de Rê, Seigneur des Deux Terres" à Éléphantine et fonda la XXVe dynastie. Son fils et successeur, Piânkhy (ou Piye, 747-716) partit avec son armée de sa capitale Napata et plaça rapidement sous son contrôle toute la Thébaïde. Puis il se fit couronner à Thèbes et devint "l’Horus qui a unifié les Deux Terres". Il y nomma sa sœur Aménardis I comme Divine Adoratrice d’Amon (v.740-720) afin de mieux contrôler ce clergé.
 
   Vers 730, le Prince de Saïs Tefnakht I (727-716) avec sa chefferie maître de Memphis, voulut reconquérir le Sud du pays sur les Éthiopiens. Il réussit à unifier presque tous les nomes du Delta et devint Grand Chef des Libous et des Mâ et Grand Prince des provinces Occidentales du Delta. Il tenta alors de ranger sous sa domination la Moyenne-Égypte. Il prit la tête d’une coalition comprenant Ioupout II (XXIIIe dynastie) et Osorkon IV 730-715, XXIIe dynastie) pour essayer de contrecarrer la monté en puissance de Piânkhy. Il commença par faire le siège d’Hermopolis Magma, puis finalement fit aussi alliance avec son souverain Nimlot III.
 
   Cette nouvelle force en marche mit le siège devant Héracléopolis, mais la ville fit appel aux Nubiens. Tefnakht I et sa coalition perdirent les batailles et le Saïte fut refoulé dans le Delta par Piânkhy. Toutefois, il réussit quand même à en garder le contrôle depuis Saïs et, en 727, il fonda la XXIVe dynastie en se proclamant Roi et fit de la ville sa capitale. En 726, Piânkhy, qui ne pouvait accepter cette semi victoire, repartit à la conquête du Nord du pays. Il soumit Nimlot III à Hermopolis Magma et Payeftjaouembastet Roi d’Héracléopolis. Il fit ensuite le siège et prit Memphis. Après cette victoire tous les chefs Libyens se soumirent. Piânkhy poursuivit la guerre contre Tefnakht I, qui finalement, dut reconnaître la suzeraineté du Roi de Napata et il lui versa un tribut afin de sauver sa ville.


 

Apriès, XXVIe dynastie –
Musée du Louvre

 
   Dans celle-ci, en 716, Bakenranef (ou Bocchôris, 716-715), fils de Tefnakht I, arriva au pouvoir. Il hérita du contrôle sur tout le Nord du pays et s’imposa comme le Pharaon à Saïs. Il fut reconnu aussi par Memphis, Tanis et Héracléopolis, mais il dut lutter contre Padimenti de Lycopolis qui s’opposa à son pouvoir et il resta sous la suzeraineté des Rois de Napata de la XXVe dynastie. Il tenta comme son père de mener le combat contre ces derniers, mais il fut finalement vaincu par le Roi de Napata Chabaka (ou Shabaka, 716-707/6) qui refit à son profit l’unité du pays. S’en fut fini de toutes ces petites dynasties qui gouvernaient le pays, les Kouchites restant seul maître du pouvoir.
 
   Manéthon rapporte que Bakenranef fut capturé et brûlé vif par Chabaka, ce qu’aucun document ne vient confirmer. Certains égyptologues avancent qu’a sa mort, Bakenranef était en négociation avec les Assyriens pour qu’ils lui viennent en aide contre les Nubiens, car la fin de son règne coïncide avec l’invasion de ceux-ci en Asie. En 716, l’Empereur Sargon II (722-705) atteignit El-Arich (ou Al-‘Arish ou Ouadi al-Arish ou ou Al-Arish) à la frontière Palestino-égyptienne. Chabaka, qui avait maintenant un contrôle sur le pays et toute la vallée du Nil, du Dongola Soudanais à la Méditerranée, ayant du mal à assurer sa légitimité sur tout le pays se chercha des soutiens. Il nomma "Gouverneur" (ou Régent) de Saïs, Ammeris le Nubien (715-695).
 
   Ce dernier et ses deux successeurs, Stephinates (ou Tefnakht II, 695-688) et Nechepso (ou Nekaub, 688-672) amorcèrent les prémices de la future dynastie Saïte. Les Assyriens devinrent menaçants aux portes du Delta Oriental et les Rois de Napata ne gardèrent l’Égypte plus très longtemps. Une première attaque sur le Delta se produisit en 701, mais l’Empereur d’Assyrie Sennachérib (705-681) se retira, rappelé par des problèmes en Babylonie, sans parvenir à entrer en Égypte. Puis les Assyriens attaquèrent l’Égypte de nouveau vers 677, mais l’Empereur Assarhaddon (681-669) écourta la bataille pour mater une rébellion au Nord de son Empire. En l’an 17 de son règne Taharqa (690-664) subit une nouvelle attaque des Assyriens, qui avant d’arriver en Égypte ravagèrent la Palestine. L’Empereur Assarhaddon prit la ville stratégique d’Ascalon (ou Ashkelon), aux portes du Delta. En 672 l’Assyrie lança à nouveau toute son armée contre l’Égypte. Assarhaddon nettement plus fort militairement s’empara du Delta, de Memphis et assit son autorité jusqu’à Assouan. La XXVe dynastie fut balayée par de ce nouvel envahisseur qui prit possession de l’Égypte.


 

Taharqa, XXVe dynastie –
Musée de Nubie – Assouan

 
   Les premiers souverains Saïtes profitèrent de la présence des Assyriens qui leur étaient favorables et de la fuite des Kouchites pour se rendre indépendants à Saïs. Néchao I (672-664) se vit confié le royaume par ceux-ci et son fils Psammétique I (664-610) fut nommé à la tête de l’ancien royaume d’Athribis (ou Het-ta-hérieb ou Tell-Athrib, cité du Delta). Les Saïtes prirent ainsi le pouvoir avec l’appui et la reconnaissance des envahisseurs. Les Assyriens repartis, Tanoutamon (664-656) nouveau Roi de Napata reprit la lutte et se rendit maître de la Haute-Égypte. Il se fit couronner Pharaon dans le temple d’Amon du Gebel Barkal et s’engagea immédiatement dans une campagne militaire contre Néchao I. Il assiégea et prit Memphis et Néchao I mourut au cours de la bataille. Psammétique I qui lui succéda garda cependant la main mise sur la Basse-Égypte où il avait obtenu la soumission des différents Princes locaux du Delta ainsi que d’Héracléopolis.
 
   La victoire de Tanoutamon sur son père fut de courte durée, sa reconquête de Memphis imposa aux Assyriens de prendre des sanctions. L’Empereur Assurbanipal (669-631 ou 626) lança un corps d’armée contre l’Égypte et la cité retomba aux mains des Assyriens. Tanoutamon se réfugia à Thèbes. Les Assyriens le poursuivirent, et en 663, la ville fut entièrement ravagée. Psammétique I mit de suite à profit la déroute du dernier Pharaon Kouchite pour prendre, en 656, le contrôle de la région. Il se retourna alors contre ses ex alliés et réussit à expulser les Assyriens grâce à des mercenaires Lydiens, Grecs et Cariens, et refit l’unité du pays.
 
   En mars 656, il expédia une flotte navale puissante qui annexa la région de Thèbes, que l’Empereur d’Assyrie, Assurbanipal avait ravagée et il y nomma sa fille Nitocris I, Divine Adoratrice d’Amon. Les Assyriens partis et le pays réunifié, Psammétique I réorganisa l’administration. Cependant au détriment de Saïs, ce fut Memphis qui devint la capitale. Le Pharaon se fera tout de même enterré dans la nécropole de Saïs, comme du reste ses successeurs. Psammétique I est considéré par beaucoup d’historiens comme le véritable fondateur de la XXVIe dynastie (664-525).
 
   Lors de cette dynastie on assista aussi à un accomplissement artistique avec une certaine innovation. L’activité monumentale fut importante à Memphis, où le Serapeum fut agrandi. Les constructions furent nombreuses à l’intérieur du Delta, en premier lieu bien sur à Saïs où le grand temple de la Déesse Neith devint un des principaux centres culturels et religieux du pays. Il sera réputé dans tout le monde antique pour son école de médecine. Ce fut auprès de ce temple de Neith qu’Hérodote (Historien Grec, v.484-v.425) apprit la technique d’écriture des scribes. Ce fut également à cette époque que furent écrit un grand nombre de textes religieux et funéraires. Saïs fut alors un foyer de civilisation si brillant que l’on a parlé de "renaissance saïte". La ville se vit dotée par les différents souverains de nouveaux monuments : Apriès (589-570) fit construire des obélisques pour le temple de Neith, Amasis (570-526) prolongea ce dernier, érigea des temples et des statues colossales. À cette époque Neith, la Déesse tutélaire de Saïs, supplanta Amon comme premier Dieu de la monarchie.
 

   Malheureusement, comme les Kouchites de la XXVe dynastie, qui furent balayés du fait d’un envahisseur, la dynastie Saïte connut le même sort. En Mésopotamie le pouvoir changea de main, il appartenait maintenant aux Perses Achéménides. Ces derniers assujettirent toutes les populations de Perse, de Babylonie, de Syrie / Palestine et d’Asie Mineure. Ils furent les maîtres du Golf Persique jusqu’à la méditerranée et bien sur arrivaient maintenant aux portes de l’Égypte. À Suse, Cambyse II (529-522) succéda à Cyrus II (559-529). Le Roi Perse, sitôt sa prise de pouvoir, marcha sur l’Égypte et, en Mai 525, il écrasa l’armée Égyptienne à la bataille de Péluse. Il envahit ensuite le Delta, continua sa progression et fit le siège de Memphis. Psammétique III (526-525) après seulement six mois de règne fut vaincu. Il capitula entraînant ainsi la soumission de tout le reste du pays. Cambyse II le déporta à Suse et le mit à mort. Ce fut la fin de l’Égypte Saïte qui passa sous domination des Achéménides et devint une satrapie.


 

Statuette d’Amasis, XXVIe
dynastie – Metropolitan
Museum of Art

   Cambyse II fonda la XXVIIe dynastie (525-401) en se faisant instaurer Pharaon par le clergé de Saïs. Toutefois, la position stratégique de la ville dans le Delta permit à ses Princes de se révolter efficacement contre les Perses. Un de ceux-ci, le Prince Amyrthée (404-399), fut de toutes les révoltes dès 411, menant des actions de guérilla dans le Delta occidental principalement autour de sa ville de Saïs. En 404, il profita de la mort du Roi Perse, Darius II (423-404) et des luttes de succession entre Artaxerxès II (404-401) et Cyrus le Jeune pour commencer à expulser les Achéménides d’Égypte. Il fonda la XXVIIIe dynastie, dont il fut le seul Roi.

 

   Selon Isocrate (436–338, un des dix orateurs attiques), Artaxerxès II rassembla une armée en Phénicie sous le commandement d’Abrocomas pour reprendre l’Égypte, mais les problèmes politiques avec son frère Cyrus le Jeune l’empêchèrent de continuer. Il laissa alors le champ libre à Amyrthée pour se lancer dans la reconquête du pays. Celui-ci prit rapidement le contrôle de toute l’Égypte. En moins de quatre ans, son pouvoir fut reconnu jusqu’à Éléphantine et Assouan. La ville de Saïs, connut alors une renaissance. Elle fut magnifiquement embellie et devint la capitale et un prestigieux foyer des sciences sacrées.

   Le pays n’en fut pas pour autant stabilisé, Néphéritès I (399-393), Prince de Mendès, une ville à l’Est du Delta, fonda la XXIXe dynastie (399-380) en renversant Amyrthée. Le papyrus 13 du musée de Brooklyn, retraçant les chroniques Araméennes de la communauté Juive d’Éléphantine, indique qu’il prit le pouvoir en octobre 399, après l’emprisonnement et l’exécution d’Amyrthée à Memphis, mais rien ne laisse supposer qu’il y eut d’autres luttes lors de cette prise de pouvoir. Néphéritès I continua la libération et la réunification de l’Égypte et la débarrassa totalement de la domination des Perses, aidé en cela par Sparte avec qui il passa une alliance. La capitale et la résidence royale furent déplacées de Saïs à Mendès qui avait une situation plus centrale, d’où le nom de Mendésienne souvent donné à cette dynastie.


 
Amasis – XXVIe dyn. – Musée du Louvre

 
   Saïs ne joua plus de rôle politique, mais resta très influente et continua de croitre et de s’enrichir, notamment sous le règne Nectanébo I (380-362) de la dynastie suivante (XXXe dynastie, 380-342). Le Pharaon lors de sa réorganisation du pays peu de temps après son arrivée au pouvoir en 380, édicta de nouvelles lois par l’intermédiaire de décrets qui furent inscrits sur des stèles en granit, placées dans toutes les grandes cités du pays. Par un de ceux-ci, afin de s’assurer le soutien politique des Prêtres, il attribua au temple de Neith à Saïs un dixième de la dîme que collectait le comptoir Grec de Naucratis. Ce "décret de Naucratis" en fixait les taxes que chaque marchand étranger qui empruntait la branche canopique du Nil, devait verser à la ville, ainsi que celles sur les produits fabriqués dans Naucratis.
 
   Assujettie à ce nouvel impôt Naucratis versa des sommes considérables au trésor pharaonique et à celui des Prêtres de Saïs. La stèle de Naucratis, découverte en 1899 dans la cité même, nous confirme comment cet argent fut récolté et affecté au temple de Neith de Saïs. Ce fut la création de la ville d’Alexandrie en 332, qui marqua le début du déclin de Saïs, comme d’autre ville du Delta, la privant peu à peu de ses débouchés commerciaux. L’antique cité garda cependant son prestige et devint un véritable lieu de pèlerinage pour les philosophes, les penseurs et autres savants d’un monde désormais tourné vers la Méditerranée et l’Occident.  
 

L’archéologie sur le site

 
  On sait que la cité existait dès les temps très reculés, on a retrouvé des étiquettes en bois liées au Roi Horus Aha (v.2995-2974, Ière dynastie) qui décrivent sa visite de la ville. Il fut peut-être le premier à faire ériger dans la cité un temple consacré à la Déesse Neith. Cependant, à aujourd’hui, il n’y a aucune trace mise au jour de la ville avant la fin du Nouvel Empire (1549-1080), soit vers 1100. Presque plus rien ne subsiste de la cité, même ses briques massives des murs de clôture ont été presque entièrement supprimés en grande partie en raison de la destruction massive de la ville par les chercheurs de Sebakh (Terme utilisé pour décrire des matériaux organiques décomposés qui peuvent être utilisés à la fois comme engrais agricole ou comme combustible) qui ont largement fait disparaître tout ce qui était en briques crues, ne laissant que quelques blocs in situ.
 

   Hérodote (Historien Grec, v.484-v.425), qui avait visité la ville, décrivait au Ve siècle av.J.C : Des grands obélisques, un lac sacré, des bâtiments tels que le Palais Royal, le temple de Neith, des statues et un naos de granit. L’égyptologue Labib Habachi, en 1942, suggère que la plupart des blocs trouvés à Rosette, dont la fameuse pierre de Rosette qui a fourni la clef pour le déchiffrement des hiéroglyphes, étaient originaires de Saïs. La majeure partie des informations que nous possédons sur le site viennent des écrits d’ Hérodote et des textes religieux trouvés dans des temples Égyptiens d’autres villes et aussi grâce aux nombreuses statues de dignitaires, objets façonnés, stèles que l’on a retrouvé dispersés dans divers musées dans le monde entier. La plupart de ces derniers datent de la XXVIe dynastie (665-525).
 
   L’identification du site remonte à vers 1800, lors de l’expédition en Égypte de Bonaparte. En 1828, Jean-François Champollion sera un des premiers à le visiter et l’étudier. C’est lui qui déterminera l’emplacement du grand temple de Neith dans la grande enceinte dont les vestiges étaient encore visibles à son époque. Puis ce sera Karl Richard Lepsius, au milieu du XIXe siècle, qui fera un relevé plus précis de l’enceinte en ajoutant des proportions et commencera un inventaire des vestiges encore visibles.


 
Statue d’un Roi non identifié de
la XXVIe dynastie trouvée à Saïs

   Il sera suivit par Auguste Edouard Mariette et Sir William Matthew Flinders Petrie qui effectuèrent les premiers sondages et revinrent quelques années plus tard commencer des fouilles, Cependant ils ne purent retrouver les ruines que Jean-François Champollion avait décrit quelques décennies auparavant, déjà à cette époque la plupart du site avait disparu du fait de la politique de mise en culture intensive du Delta du Nil.
 
   Puis plus personne ne s’intéressera au site jusque dans les années 1950 ou quelques études archéologiques seront effectuées. Ce n’est vraiment que depuis 1997 que des recherches approfondies sont faites, par l’Université de Durham et l’Egypt Exploration Society, dirigées par Penelope Wilson. Le premier résultat de ces années de campagnes a révélé que la cité existait déjà aux temps néolithiques.
 
   Un niveau archéologique contenant des céramiques et autres artefacts offrants des similitudes avec ceux contemporains découverts sur le site de Bouto confirme que Saïs était déjà, en ces temps, un centre urbain important. Les fouilles nous ont également permis de dresser un plan de la cité à cette époque, qui, comme Bouto, possédait deux quartiers biens distincts qui se faisaient face au Nord et Sud.

 
   À son extension maximale elle s’étendait sur près d’1,5 km de long sur 500 m de large. Au Nord du site ont été mis au jour les restes d’une grande enceinte de forme carrée de près de 700 m de côtés. Elle comprend deux monticules dont le plus grand, Kôm Rebwa, fait plus de 300 m de long. Sur ce dernier les fouilles ont déterminé des niveaux d’occupation datant des XVIIIe dynastie (1549-1295) et XIXe dynastie (1295-1186), indiquant l’extension de la ville à cette période. Au Sud du site, à environ 250 m de la grande enceinte, se trouvent les ruines d’un gigantesque tell de presque vingt hectares dont les niveaux remontent à l’époque Saïte (664-525) et au milieu duquel se trouve un lac. Les fouilles entreprises autour de celui-ci ont révélé plusieurs niveaux d’occupation tardifs, ainsi qu’ une grande structure en pierre qui comprenait un mur qui longeait le lac.
 

   Ce fut le professeur Paul Schliemann qui entreprit les fouilles sur le site du temple de Neith. Il lui faudra creuser le sol pendant cinq mois pour mettre au jour les ruines de l’ancien temple de la ville. Entre autres choses, son équipe découvrit une chambre funéraire construite pour "les grands musiciens" de l’époque.
 
   Dans ce tombeau, qui pourrait dater de la IIIe dynastie(2647-2575), furent dégagés un grand sarcophage ainsi qu’une collection d’instruments de musique, en bois, en porcelaine et un en cuivre, dont : Des trompettes, des harpes et des flûtes. Paul Schliemann trouva aussi un papyrus, qui n’a pas encore été déchiffré, qui laisse penser aux égyptologues qu’il serait dans une langue musicale qui est inconnue jusqu’alors.
 
  Le sarcophage comporte une inscription en hiéroglyphes qui nous dit que les instruments de musique appartenaient à "l’orchestre" du temple de Neith et qu’ils furent utilisés pour les cérémonies du couronnement du Roi Amenemhat I (1991-1962, XIIe dynastie). Parmi ces instruments, il y en a qui produisent des sons imitant : Le bruit du vent, le chant de certains oiseaux, le rugissement du lion ou encore le ressac de la mer.


 
Statue de Oudjahorresne –
Musée du Vatican

  À part Schliemann aucune fouille de grande ampleur n’ayant jamais été effectuée, on ne connaît pas vraiment le temple de Neith malgré quelques pièces trouvées. Certaines indications nous confirment que ce temple, à la grande époque de la cité, a pu rivaliser en taille et en splendeur avec le grand temple de Karnak.
 
   Les fouilles du site de la ville ont également permis de mettre au jour divers éléments architecturaux et quelques statues datant pour la plupart de la Basse Époque (656-332) qui sont pour le moment exposés dans un petit musée en plein air sur le site, ou dans les musées d’Europe. Notamment l’intéressante statue du Grand Prêtre de Neith Oudjahorresne (ou Oudjahorresnet), préservée aujourd’hui au musée du Vatican, qui officiait à la fin de la XXVIe dynastie (664-525) et dont la tombe fut retrouvée au Sud du site d’Abousir.
 
   En 525 av.J.C, il devint Chef médecin nommé par le Roi Perse, Cambyse II (529-522). Sa statue nous a livré une autobiographie décrivant les monuments de la cité et sa demande au Roi Perse d’ordonner la restauration rapide des sanctuaires de la ville.  

 

Pour plus de détail sur les fouilles depuis 1997 voir :
Le site de la mission archéologique – (EES/University of Durham)

 


 

Neith – Musée du Louvre

La religion dans la cité

 
   La Déesse Neith, dont l’emblème était un bouclier avec deux flèches croisées, semble avoir eu un centre de culte à Saïs dès le début de la période dynastique. On a retrouvé des étiquettes en bois liées au Roi Horus Aha (v.3080-v.3055) de la Ière dynastie (v.3040-2828). Elles décrivent sa visite au sanctuaire du culte de Neith. Il fut peut-être le premier à faire ériger dans la ville un temple consacré à la Déesse. Au moins deux Reines de cette dynastie eurent des noms composés avec l’élément Neith, Neith-Hotep épouse du Roi Narmer/Ménès (v.3040-v.2995) et Merneith (ou Meret-Neith, v.2914-v.2900) épouse du Roi Horus Djet (2927-2914).
 
   Neith était une Déesse redoutable de la guerre, une Déesse créatrice, qui fut représentée coiffée de la couronne rouge de Basse-Égypte, ce qui suggère qu’elle fut étroitement associée à cette région. Les Grecs l’ont identifié avec Athéna, une autre Déesse guerrière de leur Panthéon. Le sanctuaire de Neith était réputé et l’on y célébrait chaque année la fête des Illuminations. Des représentations de ce sanctuaire se retrouvent sur les parois de certaines tombes de l’Ancien Empire (2647-2150) jusqu’au Nouvel Empire (1549-1080) montrant une série de chapelles alignées et bordées de palmier le long d’un canal menant à un temple représenté en plan.
 
   Neith eut aussi la forme d’une vache divine qui recevait un culte particulier à Saïs même dont
Hérodote (Historien Grec, v.484-v.425) nous a peut-être laissé un témoignage lorsqu’il affirme avoir vu dans le palais royal du Roi Amasis (570-526) une salle dans laquelle était exposée à la vue de tous une statue en bois à l’image d’une vache couchée dont la tête dorée était coiffée de cornes enserrant un disque en or représentant le soleil. On reconnaît dans cette dernière description la coiffe traditionnelle des Déesses Égyptiennes, portée par Hathor ou Isis, avec lesquelles Neith se confondait à Saïs. D’autres Dieux possédaient leur sanctuaire à Saïs comme Atoum, Hathor, Isis, Osiris sous la forme de l’Osiris Hémag, Sekhmet etc…. Saïs comprenait comme Philae l’un des tombeaux d’Osiris, ce qui en faisait un des lieux les plus sacrés du pays.
 

Pour plus d’autres détails sur la religion dans la cité voir :
Les Dieux de Saïs  – (Wikipédia.fr)
La cité antique et ses cultes – (Wikipédia.fr)

 

Bibliographie

 
   Pour d’autres détails sur la cité et ses monuments voir les ouvrages de :
 
David Al Aston :
Tomb groups from the end of the new kingdom to the beginning of the Saite period, University of Birmingham – Birmingham, 1987.
Manfred Bietak :
Heilige Bezirke mit Palmen in Buto und Sais, Zwischen den Ewigkeiten, Festschrift G. Thausing, Vienne, 1994.
Hans Bonnet :
Sais, Lexikon der ägyptischen Religionsgeschichte, Nikol Verlag, Hamburg, 2000.
Jacques-Jean Clère :
Autobiographie d’un général gouverneur de la Haute-Égypte à l’époque saïte, pp. 85-100, BIFAO 83, Le Caire, 1983.
Georges Daressy :
Rapport sur des fouilles à Sa el-Hagar, ASAE 2, IFAO, Le Caire, 1901.
Ramadan El-Sayed :
Les rôles attribués à la Déesse Neith dans certains des textes des cercueils, Orientalia, 1974.
Documents relatifs à Saïs et ses divinités, BiEtud 69, IFAO, Le Caire, 1975.
La Déesse Neith de Saïs, I, importance et rayonnement de son culte, II, Documentation, BiEtud 86, IFAO, Le Caire, 1982.
Thorwald C.Franke :
Mit Herodot auf den Spuren von Atlantis könnte Atlantis doch ein realer Ort gewesen sein ?, Norderstedt Books on Demand GmbH, 2006.
Labib Habachi :
Saïs and its Monuments, ASAE 42, IFAO, Le Caire, 1943.
Gustave Jéquier :
Les temples ramessides et saïtes de la XIXe à la XXXe dynastie, MIFAO 48, IFAO, Le Caire, 1922.
François Leclère :
Les villes de Basse Egypte au Ier millénaire av.J.C. : Analyse archéologique et historique de la topographie urbaine, BiEtud 144, IFAO, Le Caire, 2008.
Alexandre Moret :
Sarcophages de l’époque bubastite à l’époque saïte, IFAO, Le Caire, 1912.
Olivier Perdu :
Recueil des inscriptions royales Saïtes : Psammétique Ier : Volume 1, Collection : Archéologie, Philologie, Histoire, Collège de France, Cybele, Paris, Janvier 2002 et Décembre 2002.
Hommage d’une princesse saïte à son précepteur, pp : 211-227, BIFAO 105, Le Caire, Janvier 2005.
Miroslav Verner :
– La tombe d’Oudjahorresnet et le cimetière saïto-perse d’Abousir, pp : 283-290, BIFAO 89, Le Caire, Janvier 1989.
Penelope Wilson :
Fieldwork, 1997-8 : Delta Survey, Memphis, Saqqara, Tell el-Amarna, Gebel Dokhan, Qasr Ibrim, pp.1-22, JEA 84, London, 1998.
The prehistoric period at Saïs (Sa el-Hagar), pp : 65-72, Archéo-Nil 13, Durham University, 2003.
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