Peter J.Brand, qui a publié une biographie complète sur ce Pharaon, souligne dans sa théorie
que les diverses décorations et reliefs dans les temples de Karnak et
Abydos qui
associent Ramsès II avec son père, ont effectivement été sculptés après la mort de
Séthi I par Ramsès II lui-même, et, par conséquent,
ne peuvent pas être utilisés comme preuve pour soutenir une corégence entre les deux monarques.
William Joseph Murnane qui avait
approuvé la théorie de la corégence a révisé son point de vue et rejette aujourd’hui l’idée que
Ramsès II avait commencé à compter ses propres années de règne alors que Sethi I était encore en vie.
Kenneth Anderson Kitchen pense lui
qu’il s’agit d’une erreur de lecture du terme et qu’il ne faut pas comprendre "corégence", mais
il décrit la carrière de Ramsès II comme "Prince Régent", où le jeune Ramsès a tous les attributs de la
royauté, y compris l’utilisation d’une
titulature royale, mais ne comptera ses années de
règne qu’après la mort de son père. Peter J.Brand précise que deux inscriptions importantes de Ramsès II, à savoir
à Abydos, datée de son an 1 et sur la stèle de Kouban,
présentent seulement ses titres comme ceux d’un Prince de la couronne, avec quelques titres militaires.
Par conséquent, aucune preuve claire ne soutient l’hypothèse qu’il fut Corégent de son père.
Thomas Garnet Henry James,
parlant de l’inscription d’Abydos,
nous dit que le texte en hyperbole ne donne guère de détails. Ramsès II affirme que son père lui avait
déjà donné l’Égypte par principe : “Quand j’étais dans l’œuf" ou "Alors que je n’étais qu’un enfant
dans ses bras". Séthi I déclara devant le
peuple : "Couronnez-le que je puisse voir sa beauté de mon vivant". Il s’agit là bien évidemment
d’un mythe, Ramsès II n’étant plus un enfant lorsqu’il devint "Corégent". Toujours selon
T.G.H.James,
il devait approcher les 25 ans. Comme on le voit la preuve formelle d’une corégence est assez ambigüe.
Ramsès II enfant et Houroun – Musée Égyptien du Caire
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Son règne
Manéthon lui compte 66 ans et 2 mois de règne (Josèphe Flavius)
ou 66 ans (Eusebius, Africanus). Cette durée semble correcte, ce qui fait dire aux spécialistes que Ramsès II dut vivre au moins
jusqu’à 90 ans, ce qui est exceptionnel pour l’époque. Il devient Roi vers l’âge de 25 ans. Beaucoup d’égyptologues, dont
Jurgen von Beckerath
pensent qu’il accéda au trône à la date précise du 31 mai 1279 (27e jour du IIIe mois de la saison
Shemou). Comme le précise
David O’Connor il va célébrer
14 fêtes Sed
(ou Heb-Sed) au cours de son règne. Brillant homme de guerre et grand bâtisseur, ce
Pharaon, à la descendance considérable est sûrement un des plus importants personnages de l’histoire de
l’Égypte. Son règne sera très marqué par une forte activité dans les mines d’or et les carrières du au développement de
Pi-Ramsès ; par une
importante activité de construction et par une politique étrangère très active en terme de campagnes militaires.
Très tôt Ramsès II regarda vers l’Est et commença à envisager des expéditions militaires dans une région qui fut dominée par
l’Égypte jusqu’à Amenhotep III (1390-1353/52). Son père avait
bien repris possession de ces territoires en pays de
Canaan, mais sitôt
son retour en Égypte une partie, au Nord, fut de nouveau perdus. Comme le précise
Thomas Garnet Henry James, la présence des
Hittites dans cette région du Nord de la
Palestine constituait un facteur
important dans un système d’équilibre des pouvoirs en Asie occidentale et l’instabilité
chronique de la région allait inévitablement mener à un conflit entre les deux nations.
Sa première bataille : L’an 2, les Shardanes
Dès l’an 2 de son règne Ramsès II va devoir prendre les armes pour
défendre son pays. En effet, les Shardanes (^rdn.w, ou Sardanes ou
Sherden ou Shirdana ou Chardanes), peuple de pirates
des mers, faisaient des ravages le long de la côte Méditerranéenne Égyptienne. Ils attaquaient les bateaux chargés
de marchandises qui voyageaient sur les routes maritimes vers le pays de Pharaon. Selon certains spécialistes, dont
Nicolas Grimal, c’était un
peuple qui venait probablement des côtes de
Ionie, où du Sud-ouest de la Turquie
actuelle. Joyce Anne Tyldesley nous
dit que Ramsès II ne va pas chercher l’affrontement direct, mais va user plutôt de ruses.
Il va poster des troupes et
des navires à des points stratégiques le long de la côte et patiemment attendre les pirates pour les attaquer
adroitement, par surprise, dans une bataille navale et les capturer tous en une seule fois. Une stèle érigée à
Tanis raconte cette bataille :
"Dans leurs navires de guerre au milieu de la mer aucun ne fut en mesure de résister devant Pharaon".
En fait cette bataille a plutôt du avoir lieu dans l’embouchure du Delta. Peu après de nombreux
Shardanes furent
enrôlés dans les armées de Ramsès II, certains dans sa garde personnel. Ils joueront un rôle crucial dans la
bataille de Kadesh. Ils étaient reconnaissables
à leur casque brillant avec une boule au milieu et des grands boucliers ronds.
Colosse assis de Ramsès II, à gauche de l’entrée principale de Louxor
|
La campagne de l’an 4 : La conquête de l’Amourrou
De son côté, en 1279, l’Empereur des
Hittites,
Mouwatalli
II
(ou Muwatallish ou Moutallou, 1295-1272) se rendit compte que l’arrivée au pouvoir de Ramsès II constituait un danger pour lui.
Il ne se trompait pas, la première campagne d’Asie du Pharaon eut lieu vers 1276/1275, nous manquons de précisions sue la
date exacte, seules deux inscriptions laissées par Ramsès II à
Byblos et à Nahr el-Kelb,
au Nord-est, près de l’actuelle Beyrouth, attestent de la véracité de cette campagne. Il n’existe pas en Égypte de trace de
ces faits. Les armées Égyptiennes auraient rapidement traversées le pays de
Canaan, puis l’expédition
militaire serait remontée jusqu’en
Phénicie et en
Amourrou
(Liban aujourd’hui). Dans ce dernier Ramsès II auraient réussi à convaincre le Roi
Benteshina (ou Bentešina ou Pendishena, 1280-1274, puis de 1260-v.1230) de changer de camps et de lui prêter
allégeance, alors que depuis le Roi
Azirou (v.1344-v.1315)
l’Amourrou était vassal des
Hittites.
Benteshina cassait ainsi le traité passé par son prédécesseur avec eux. On pense que cette campagne avait pour but
de préparer celle de l’an 5, en effet
Benteshina apportera un soutien décisif a Ramsès II lors de la
bataille de Kadesh (ou Qadesh)
fin Mai 1274.
Elle permit quand même au Pharaon de reprendre de nombreuses petites villes soumises à d’autres maîtres. Cependant le
changement d’allégeance du Roi
d’Amourrou
ne fit pas du tout l’affaire des
Hittites qui
étaient entourés de vassaux qu’ils mataient en cas de rébellions et dont la puissance reposait sur des
alliances stratégiques. Comme le précise
Thomas Garnet Henry James, de
plus l’Égypte était à l’abri d’une attaque directe, alors que par contre il lui était très facile de contrecarrer les
ambitions
Hittites.
La campagne de l’an 5 :
La
bataille de Kadesh
La rivalité entre les deux puissances ne pouvait
donc trouver une issue qu’en Asie. Elle se produisit à
Kadesh à l’Est de
l’Amourrou,
peu après le début de l’an 5 de Ramsès II.
T.G.H.James présente le
déroulement des faits ainsi : Au cours de l’hiver qui suivit la première expédition victorieuse de Ramsès II,
Mouwatalli
II
avait commencé à rassembler des forces autour de son Empire et avait concentré une énorme coalition de ses vassaux
Anatoliens et
Syriens.
Ramsès II, bien informé des mouvement de troupes
Hittites compris que sa deuxième campagne serait plus compliqué à gérer. Il prit des dispositions et leva une
importante armée en demandant une participation à ses alliés, dont
Benteshina
faisait maintenant parti.
La bataille de Kadesh, représentation
dans le temple d’Abou Simbel
|
L’opération fut lancée au printemps 1274 et fin Mai le Pharaon partit de sa capitale
Pi-Ramsès vers le Nord à la tête
d’une immense troupe de 20 000 hommes, chars et infanterie, constituée de quatre divisions
portant les noms d’Amon,
Ptah,
Rê (P’re)
et Seth (Suteh). Malgré cette force,
"sa victoire", Ramsès ne va la devoir qu’à l’acharnement de sa garde, les
Shardanes (ou Sardanes ou Sherden ou Shirdana ou Chardanes) et le gros soutien de
Benteshina.
Ramsès II qui commande le premier corps d’armée se laisse abuser par des espions ennemis et se retrouve surpris alors que
son armée est au repos au campement. Les Shardanes vont résister jusqu’à l’arrivée de l’armée des Néarins (ou Ne’arin) de
Benteshina.
Cette bataille est décrite en détail dans un long poème épique connu sous le nom de Penthaour.
Ces conséquences vont avoir une importance considérable pour la suite du règne du Pharaon. Les armés Égyptiennes et
Hittites se
retirèrent après ce dur affrontement, à l’issue apparemment
indécise, dans leur territoire respectif. Ramsès II, sans hélas avoir pris
Kadesh, dans sa capitale du Delta, quand à
Mouwatalli II
ses forces ne firent pas immédiatement retraites vers leur capitale
Hattousa.
Du fait du recul des Égyptiens, les
Hittites
profitèrent de la situation pour descendre vers le Sud.
Benteshina se retrouva isolé et abandonné a ces derniers qui reprirent
l’Amourrou et
la région Syrienne de
Ube (ou Upe), près de la cité-État
Araméenne de
Damas.
Ils capturèrent le Roi et donnèrent son royaume à un homme de leur confiance, Shapili (ou Šapili, v.1274-v.1260) qui
fut nommé Roi d’
Amourrou. En dehors de sa nomination par
Mouwatalli
II on ne
sait rien à propos de cet individu. Le récit de la nomination de Shapili est brièvement décrit dans le traité du Roi
Shaushga-Muwa
(v.1230-v.1210) et dans des textes parallèles. Toutefois, menacés à l’Est par les
Assyriens, les
Hittites arrêtèrent là leur progression. Pendant plusieurs années, Ramsès II, qui avait bien d’autres préoccupations,
jugea plus prudent de ne pas renouveler l’opération en Asie. Il ne souhaitait pas s’engager dans une autre campagne sans
être certain d’une vraie victoire. Grâce à cette campagne, après le partage de la
Syrie avec les
Hittites,
l’Égypte gagnera une paix relative avec cet État de plus de quarante ans.
Représentation de la bataille de
Kadesh – Le Caire – Village pharaonique
|
La campagne de l’an 8 :
La conquête de l’Asie du Moab à Dapour
Cependant, un souverain comme Ramsès II, désireux
de restaurer son influence sur des territoires autrefois en possession de son pays se devait de ne pas rester inactif trop
longtemps. On a quelques traces de représentations sur des monuments, mais beaucoup moins que pour la campagne précédente,
qui indiquent que le Pharaon fit effectivement campagne en Orient. Au cours de l’an 8, Ramsès II mène une expédition militaire
énergique en Pays de Canaan,
marchant vers l’Est jusqu’en pays
Moab (Région à l’Est de la mer Morte)
où l’allégeance de certaines cités comme Kiriathaim, Baal-Me’on,
Dibon
(ou Dhiban en Jordanie) et Beth-jeshimoth donnait des signes de faiblesse.
Cliquez sur un nom de ville ou de région
|
Lors de cette campagne le Pharaon sera accompagné de son fil aîné
Amonherkhepshef, qui reçu même
l’autorisation de conduire sa propre expédition. L’existence de cette campagne au
Moab peut être vue sur les
colossales statues érigées à Louxor par Ramsès II. Sur la base de la deuxième statue en face du pylône Nord de son temple,
le terme Mu’ab figure parmi une série de pays conquis par le Pharaon. Le royaume de Moab est alors dirigé par Tsippor et
son fils Balak. Il semble que les armées Égyptiennes ne rencontrèrent que peu de résistance, et, continuant leur avancée,
il leur fallut peu de temps pour traverser le royaume
d’Ammon et arriver dans celui
de Damas,
où ils reprirent la ville et reconquirent ces territoires qui avaient redonné leur allégeance aux
Hittites
après la
bataille de Kadesh.
Une liste des endroits prit (ou reprit) figure sur les murs du Ramesseum, mais des noms sont manquants.
Exhorté par son succès Ramsès II fit ensuite remonter ses armées vers le Nord sur des terres contrôlées directement par les
Hittites.
Après avoir consolidé son emprise sur les ports de
Phénicie, comme
Byblos, il se tourna
vers l’Est et se dirigea vers
Kadesh,
en traversant la vallée de l’Oronte. Il s’empara des petites Principautés de Tunip (ou Tounip) et Dapour (ou Dapur).
Comme le précise Christian Leblanc,
il fera ériger dans cette dernière une statue à son effigie et des représentations du siège de la ville furent gravées sur
les murs des temples de Louxor et du Ramesseum. Des tableaux représentent les différentes étapes de la bataille, depuis
l’attaque dans la plaine, jusqu’à la reddition du Prince de Dapour qui tend un encensoir en signe d’armistice.
Ramsès II installa également dans la cité une
garnison à demeure. La localisation exacte de cette ville est sujette encore à débat entre les spécialistes. Certains
l’identifient avec Tabor en
Canaan, alors que d’autres,
dont Kenneth Anderson
Kitchen prétendent qu’elle se trouvait au Nord de
Kadesh. Cette prise
représentait pour Ramsès II une "revanche" sur la semi-défaite de
Kadesh. En tenant cette position plus
septentrionale il démontrait sa capacité à prendre aux
Hittites un point stratégique d’importance séparant
l’Amourrou de
leur emprise.
Ramsès II sur son char charge l’armée de
l’Amourrou à la bataille de Dapour – Ramesseum
|
De l’an 10 à l’an 18 : Le statu quo en Asie
Le calme entre les deux puissances ne s’installa
cependant pas puisque l’on sait que des incidents entre Égyptiens et
Hittites éclatèrent encore.
Notamment en l’an 10, où Ramsès II va commémorer cette campagne par une grande stèle
qu’il fit ériger à Nahr el-Kelb, au Nord-est près de l’actuelle Beyrouth. Cette nouvelle incursion avait pour but,
semble t-il, de reprendre Tunip et Dapur qui étaient retombées aux mains des
Hittites.
Sur les reliefs de Louxor et du Ramesseum on voit des troupes Égyptiennes qui partent à l’assaut des deux cites.
Dans l’inscription qui accompagne la scène, le Pharaon se vante de n’avoir mis son armure que deux heures après le début
de la bataille. Faut-il y voir là l’interprétation d’une bataille facile pour le souverain ?. Ramsès II se livrait à
des provocations militaires car il était informé par ses espions que les
Hittites
traversaient une période difficile, harcelés à l’Est par des voisins hostiles, mais aussi par des querelles
internes de succession.
Lorsque l’Empereur Hittite,
Mouwatalli II mourut, son jeune fils,
qu’il eut d’une concubine, lui succéda.
Ourhitechoud (ou Urhi-Teshub ou Urhi-Teššup,
1272-1265) monta sur le trône sous le nom de règne de Moursil III (ou Mursili). Mais pour peu de temps car il dut faire
face à la forte influence de son oncle
Hattousili III (1264-1234) qui tenta de l’écarter. Ce dernier mena alors une révolution de palais
qui lui donna le pouvoir en 1264, lors de l’an 16 de Ramsès II.
Il exila son neveu en résidence surveillée à
Chypre, mais
Moursil III réussit à
prendre la fuite et alla se réfugier en Égypte auprès du Pharaon. Si aucun texte daté de cette période ne fait allusion à des
expéditions en Asie avant l’an 18, selon Thomas Garnet Henry James,
dans cet intervalle, il est fort possible que Ramsès II, ou l’un de ses fils, ou de ses généraux, aient dirigé des expéditions
vers le Levant. Elles ne furent cependant pas de grandes ampleurs car la guerre coutait de plus en plus cher à l’Égypte et
une relative paix était souhaitable pour Ramsès II afin de regarnir les caisses de l’État, ne serait-ce que part les
tributs des villes conquises. Pourtant il faut noter que les Égyptiens avaient sûrement reperdu une bonne partie de
l’Amourrou car
Benteshina
avait récupéré son trône et encore changé de camps, cette fois pour son nouveau protecteur l’Empereur
Hattousili III.
Buste de Ramsès II – Musée Égyptien du Caire
|
Le Roi
d’Amourrou à
la suite de son éviction était rentré dans l’entourage de celui-ci, frère de
Mouwatalli
II qui
l’avait détrôné et il le suivait dans ses campagnes. Lorsque
Hattousili III renversa son neveu Ourhitechoud, il récompensa
Benteshina pour sa fidélité en lui restituant la couronne
d’Amourrou.
Ce dernier restant un vassal obéissant. Cette alliance fut scellée par un traité et un accord réciproque de mariage entre
les maisons royales du
Hatti et de
l’Amourrou.
Ce qui n’arrangeait sûrement pas les affaires Égyptiennes. Les tensions s’aggravèrent entre Ramsès II et
Hattousili III lorsque le Pharaon donna asile à Ourhitechoud. Les sources
Hittites font
état d’une confrontation devenue inévitable. Celle-ci eut lieu vers 1262/1261. L’Empereur
Hittite exigea des Égyptiens qu’ils lui livrent Ourhitechoud, mais Ramsès II refusa.
Hattousili III se sentit humilié et la guerre menaça, le souverain sachant pourtant que la conjoncture n’était pas
favorable à une expédition vers le Sud. Quand à Ramsès II, il lui fallait maintenant montrer qu’il était désireux de se
battre pour Ourhitechoud, ce qui n’était peut-être pas le cas. Une grande inscription sur une stèle érigée à
Scythopolis (ou Beït Shéan ou Bethshan
ou Beth-Shan ou Beth-Shéan), dans la plaine de Jezraël (ou Jezréel ou Jezrahel
ou Jizreel ou Yizréel), au Nord du pays de
Canaan, fait des louanges
des hauts-faits du Pharaon dans la région, cependant sans faire une description précise des actions qu’il dirigea.
Comme le précise Thomas Garnet
Henry James, de ce fait, on ignore si Ramsès II accompagna son armée cette année là. La démonstration de
force du Pharaon fut toutefois payante car la guerre n’eut finalement pas lieu entre les deux puissances.
De l’an 19 à l’an 44 :
L’alliance avec les Hittites
Tête de l’un des colosses de
Ramsès II à l’entrée de la colonnade du temple de Louxor
|
Une relative paix régnait maintenant en
Syrie/Palestine et de
nouvelles grandes campagnes militaires d’un côté comme de l’autre auraient été hasardeuses. De plus l’Empereur
Hittite avait déjà fort à faire avec les
Assyriens qui représentaient
une menace de plus en plus grande à l’Est. Il n’était donc pas nécessaire de s’engager dans un conflit avec les Égyptiens.
Hattousili III prit alors une décision politique qui dut en surprendre plus d’un dans son entourage.
Il décida que dans ces conditions, il était pour lui maintenant préférable d’entretenir de bonnes relations avec
l’ancien ennemi juré, l’Égypte et de proposer à son souverain un traité d’assistance réciproque.
De longues négociations commencèrent qui ne prirent fin que vers 1259/1258, lors de l’an 21 de Ramsès II.
Thomas Garnet Henry James pense
que du fait que les Égyptiens n’étaient pas habitués à signer de grands traités avec d’autres nations, les négociations
préparatoires se firent en pays
Hatti.
En effet, du fait de la politique que menaient ses souverains, l’Égypte avait peu l’occasion de négocier avec d’autres pays
sur un pied d’égalité, alors que les
Hittites
faisaient régulièrement des traités officiels avec des puissances étrangères, voire avec des vassaux.
Les deux versions de ce traité ont résisté au temps et
nous sont parvenues dans une qualité exceptionnelle. Deux inscriptions, l’une à Karnak et l’autre au Ramesseum nous donnent
la version Égyptienne. Le texte
Hittite fut retrouvé lui sur une tablette d’argile dans leur capitale
Hattousa,
il est écrit en cunéiforme Babylonien. Il correspondrait à un accord rédigé à
Hattousa et envoyé à
Pi-Ramsès, où il aurait été traduit en Égyptien.
Le texte indique qu’il arriva à Ramsès II le 21e jour, du Ier mois de la
saison Peret de l’an 21, soit à la fin de
l’an 1259. Ce traité entre
Hattousili III et Ramsès II indiquait :
"Qu’il avait été fait afin d’établir entre les deux peuples une paix et une fraternité éternelle"…."que
les deux puissances s’engageaient à ne pas s’emparer du territoire de l’autre"…."si un ennemi
attaquait l’un, l’autre viendrait immédiatement à son secours" etc..."
Un des colosses de Ramsès II – Temple d’Abou-Simbel
|
T.G.H.James nous précise que les
sources Égyptiennes ne firent aucune allusion à cet accord alors que celles
Hittites
témoignent de la joie et du soulagement des deux signataires. À cette occasion, les deux Reines
Poudoukhépa et
Néfertari échangèrent des cadeaux.
Il fallut toutefois des années avant que les deux
parties, qui s’étaient déchirées pendant une très longue période, arrivent à une confiance mutuelle. Ce fut enfin le cas
lorsque des négociations s’engagèrent en vue d’un mariage entre Ramsès II et
Maâthor-Néferourê, une fille
d’Hattousili III et de la Reine
Poudoukhépa (ou Poudouhepot ou Puduheba ou Puduhepa).
Le mariage eut lieu en l’an 34, soit vers 1246/1245, et les textes Égyptiens nous indiquent que la fille de l’Empereur fut
envoyée en Égypte avec de grandes quantités de métaux précieux, de bétail et d’esclaves et que Ramsès II fut enchanté
d’apprendre son arrivée. D’après
Thomas Garnet Henry James les circonstances du mariage furent différentes. Il affirme qu’un marchandage eut lieu
entre la Reine
Poudoukhépa et Ramsès II au sujet de la dot et aussi du fait que la Reine craignait que sa fille ne puisse
recevoir de visites
Hittites en Égypte et ne souffre ainsi d’isolement.
Le mariage semble avoir porté ses fruits sur le plan
politique car plus aucun différent entre les deux États n’est enregistré jusqu’à la fin du règne de Ramsès II.
Avec ces accords L’Égypte repoussait ses frontières. Le Sud de
l’
Amourrou et la plaine de
Damas étaient maintenant en sa possession. Les textes attestent de l’arrivée d’une seconde Princesse
Hittite en
Égypte, qu’il est convenu d’être encore une fille de l’Empereur, qui devint elle aussi une épouse de Ramsès II,
peu avant la mort
d’
Hattousili III, en l’an 44 du Pharaon, soit vers 1237. Ce mariage fut commémoré par deux stèles, l’une à
Coptos et l’autre à
Abydos, malheureusement le nom de la Princesse ne figure pas
sur les inscriptions.
Ramsès II et la Nubie
Au Sud, Ramsès II va pacifier le pays de Kouch (Nubie).
Dans le temple Nubien de Beit el-Ouali on trouve des bas-reliefs qui représentent des scènes de guerre. Une série
d’entre elles est consacrée à cette campagne de Nubie. On y apprend que les fils du Pharaon,
Amonherkhepshef (ou
Amonherounemef) et Khâemouaset y
prirent part. On peut voir aussi sur ces bas-reliefs le tribut qu’offrent les Nubiens sous le contrôle du vice-Roi de
Nubie Aménémopet, fils de Paser. Beaucoup de spécialistes pensent que si cette campagne eût effectivement lieu,
il est probable qu’elle se soit limitée à quelques escarmouches en Nubie inférieure. Les bas-reliefs de Beit el-Ouali
servirent de support à des récits de batailles héroïques, mais peu vraisemblables.
Statue de Ramsès II –
Musée Égyptien du Caire
|
Thomas
Garnet Henry James nous dit qu’en fait, pendant tout le règne de Ramsès II, la Nubie resta une terre pacifiée,
bien contrôlée par les Égyptiens, mais peut-être pas de manière permanente. Le Pharaon confiera ces terres à des vice-Rois,
portant le nom officiel de "Fils Royal de Kouch", qui lui étaient dévoués et qui gèreront si efficacement
la région qu’ils vont acquérir d’énormes richesses. Le souverain encouragea le développement urbain en Nubie et établit un
nouveau centre administratif à Amara, entre la IIe et la IIIe cataracte. L’endroit reçut le nom de
"Pi-Ramsès Mériamon" et devint la résidence du vice-Roi, qui vivait auparavant dans la forteresse de Bouhen.
Le vice-Roi Sétaou (ou Setau),
qui fut en poste vers la fin du règne de Ramsès II, est reconnu pour s’être très impliqué à maintenir la paix dans la région.
Cependant malgré cette paix relative,
Sétaou nous indique, sur une grande stèle érigée au temple
d’Ouâdi es-Séboua, une campagne contre Irem.
Irem était une région de Nubie dont ignore, encore aujourd’hui, la localisation exacte.
On la situe juste à l’Ouest du Nil, au Sud de la IIIe cataracte, dans une zone dominée autrefois par le royaume de Kerma.
Dans cette région éloignée du pouvoir Égyptien, une tradition d’indépendance y persistait, et déjà
Séthi I (1294-1279) avait dû
faire face à une révolte d’Irem. En l’an 38 de son règne, soit vers 1242, Ramsès II doit mâter une rébellion d’Irem qui
entraîne l’envoi d’une expédition punitive. Les murs de la ville d’Amara nous relatent cet épisode où le Pharaon fit 7 000
prisonniers. Plusieurs de ses fils participèrent à cette expédition, mais seulement le nom de deux d’entre eux nous
est connus, Mérenptah et son 8e fils
Amonemouia (ou Sethemouia).
Ramsès II saisit par les cheveux
trois ennemis : l’Asiatique, le Nubien et le Libyen – Détail d’une fresque – Musée du Caire
|
Les campagnes à l’Ouest
Sur une petite inscription, dans le temple
d’Ouâdi es-Séboua,
Sétaou indique qu’il envoya une
expédition punitive en l’an 44 de Ramsès II, soit en 1236, qui fut dirigée par un nommé Ramosé, contre le pays de Tjéméh,
afin de ramener des captifs pour construire ce temple. On pense que le pays de Tjéméh se trouvait à l’Ouest de la vallée du
Nil. Il abritait des peuplades qui tentaient de temps en temps de pénétrer sur les terres fertiles Égyptiennes.
Au cours
de la XIXe dynastie on voit apparaitre le terme
Tjéméhou qui désignait des tribus au Nord-ouest du Delta qui étaient peut-être les mêmes.
On sait qu’il n’y avait pas de grandes puissance à l’Ouest comparable aux
Hittites ou
aux Assyriens, mais comme en Nubie
il y avait beaucoup de tribus qui harcelaient sans cesse la riche Égypte et il fallait très souvent envoyer des expéditions punitives.
On a ainsi connaissance des Chasous (Bédouins de l’Est), de hordes Libyennes venant de Marmarique,
des Libou, des
Méchouech etc…, que Ramsès II devra refouler. Le Pharaon fera construire un rempart de forteresses
dans le désert pour protéger les abords Ouest du Delta. Ces forts étaient construits à deux jours de marche l’un de
l’autre. Le plus grand se trouvait à Zaouiyet Oumm el-Rakham à presque 350 km à l’Ouest de la future
Alexandrie. Son enceinte couvrait plus de 15.000m²
avec des murs de 4 m de haut flanqués de tours. Sous Ramsès II le commandant de ce fort avait pour nom Nebrê.
La fin du règne
L’Égypte pendant le règne de Ramsès II connaît
un essor économique important dut aux richesses recueillies auprès d’autres Empires. Le Pharaon développa le port et
les industries de Memphis. Il fit construire un grand port
sur la Mer Méditerranée où s’arrêtaient les marchands
Grecs et
Phéniciens,
port qui plus tard portera le nom d’Alexandrie.
II favorisa l’ouverture de la Religion Égyptienne aux Dieux étrangers, le souverain instaura le culte de Baal
(Dieu de l’orage dans une autre culture) dans sa capitale.
Ramsès II va avoir une fin de règne endeuillée par la disparition
successive de beaucoup de ses héritiers et épouses, en particulier sa préférée,
Néfertari. Il meurt âgé d’environ 90 ans après un règne
de 66 ans, qui correspond à plus de la moitié de la durée de la
XIXe dynastie. Les chercheurs ont identifié qu’il souffrait de graves problèmes dentaires, d’arthrite et d’un
durcissement des artères. Neuf autres Pharaons après lui prendront le nom de Ramsès en son honneur, mais aucun n’égalera
sa grandeur. Presque tous ses sujets pensaient que sans lui ce serait la fin du monde !. De ce fait il va devenir
le personnage légendaire qu’il avait voulu être de son vivant, mais ce ne sera pas assez pour protéger l’Égypte.
Moins de 150 ans après sa mort, le pays va tomber et le
Nouvel Empire prendre fin.